Notre Stanley Kubrick national (du fait d’avoir été un autodidacte du cinéma) a quitté la planète bleue il y a huit ans déjà. Plus exactement le 24 août 2009. 50 jours déjà qu’on aurait dû y penser. L’oubli de Gabonreview est concomitant à celui de la télévision nationale dont il était pourtant un bon fournisseur de contenu, aussi bien pour ses productions que pour ses interviews et participations à des talk-shows.
Flash-back sur cet outsider du 7e art national, précurseur du film indépendant gabonais, instaurateur d’une facture locale du vidéo-clip et lauréat du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco)

André Ottong. © Facebook

 

Fragments de vie. © Collecté par Gabonreview

S’il a gravité autour et avait fini par en bénéficier un tantinet, il ne faisait réellement pas partie de la caste officielle des cinéastes gabonais, regroupés alors au Centre national de cinéma (Cenaci), devenu Institut gabonais de l’image et du son (Igis). Pour cela, il n’avait jamais pas pris part aux œuvres collectives de l’instance faîtière du 7e art gabonais, notamment « L’auberge du salut » (1995) et « Les années école » (2005). Mais il aura su se frayer un chemin dans le petit maquis de cette corporation au Gabon, au point qu’il deviendra l’inspirateur de tous les vidéastes indépendants réalisant des films de fiction aujourd’hui au Gabon, à l’instar de Eric Mabadi, Melchy Obiang ou de Patrick Bouémé.

Parce qu’il s’était formé presque tout seul, certains disaient avec ironie qu’il était le Stanley Kubrick du Gabon. L’homme ne s’est pourtant jamais affublé de pseudonyme. Il était tout simplement André Côme Ottong, connu du public pour avoir réalisé en amateur la série télévisée « La Chambre des filles » et, sans aucune aide des pouvoirs publics, les longs métrages « Sy » et « La cithare« .

« Affaire Voisins »

« La Chambre des filles« , qui met en scène le quotidien de quatre filles partageant le même appartement a reçu, en 2001, le Prix population et développement (télévision) au Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), manifestation à laquelle il accède avec l’aide du Cenaci (Igis) qui avait fini par lui ouvrir les bras. Le réalisateur avait par ailleurs participé à la première édition du Festival du film du monde francophone à Alger en mars-avril 2006.

André Côme Ottong arrive au cinéma du fait d’une rencontre, en 1982, avec Marcel Sandja, cinéaste gabonais et réalisateur, entre autres, de « Oréga » et « Affaire Voisins« . Celui-ci anime alors une troupe d’art dramatique dénommée Ajeciga (Association des jeunes cinéastes gabonais). On y retrouve alors, Michel Ndaot, Pierre Ndongo et Patrick Bouémé, entre autres. Ottong y apprend les rudiments de la comédie et finit par tourner dans un film de Marcel Sandja. Celui-ci l’entraîne par la suite, avec la même troupe, dans le projet de TéléAfrica. En préparation à la création de cette télévision, des spots publicitaires et des courts-métrages sont tournés. Très réceptif et volontaire, il devient l’assistant de Marcel Sandja et lorsque celui-ci repart aux études en France, il se met à tourner pour son propre compte des spots publicitaires à partir de 1990.

André Ottong, qui avait à peine terminé ses études primaires, a amélioré sa « tchatche » et sa culture entre temps. Il déborde alors d’imagination et d’énergie, casse la baraque à la télévision avec des déclarations aussi fracassantes qu’iconoclastes sur le cinéma gabonais. Il se fait alors des ennemis dans la corporation et il restera longtemps en marge de celle-ci.

« Confession Finale »

Au début des années 90, il commence la réalisation des vidéo-clips et révolutionne les choses avec la chanson « Bovengagoye » de Vickoss Ekondo dont les scènes étaient inspirées des ballets et de la rigueur technique du film « Un Prince à New York« . Sur une longue période les clips gabonais ont eu du mal à se départir des normes posées par Ottong : Ballets méticuleusement synchronisés, décors de villages africains, maquillages traditionnels ou guerriers, raphia et pailles en vrac.

André Ottong fait la fierté du Gabon en remportant lors de la 21e édition du Fespaco (février-mars 2009), le prix International Planned Parenthood Federation (IPPF) d’un montant de 2.000.000 francs CFA pour son dernier film « Confession Finale« . Ce titre était-il prémonitoire ? Le lundi 24 août 2009 à 2 heures du matin, il est emporté par «une longue et pénible maladie», selon le quotidien L’Union. Deux ans durant il aura stoïquement lutté contre cet effroyable monstre en lui. Il avait 45 ans et des projets plein la tête.

(Lifting d’un article écrit par François Ndjimbi sur Gaboneco, le 25 août 2009, un jour après le décès de l’artiste)

 
GR
 

2 Commentaires

  1. Che Guevara dit :

    A Bongoland, on ne valorise pas les talents, et on ne rend pas hommage à ceux qui le méritent. C’est comme ça quand un pays est géré par des incultes!

  2. Le Bantou de "Makata ma ngoye" dit :

    Pourquoi valoriser un talent au Bongoland?quand on sait que pour les émergents il faut promouvoir la médiocratie?Et de plus OTTONG n’était pas un de leurs.

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