2029 : le Gabon ferme la porte au manganèse brut et ouvre celle de l’industrie

En interdisant l’exportation du manganèse brut à compter du 1er janvier 2029, le président de la République engage le Gabon dans une nouvelle ère industrielle. La décision s’inscrit dans une politique de transformation locale des ressources naturelles, amorcée en 2010 avec l’interdiction d’exporter le bois en grumes et récemment renforcée par la reprise d’actifs stratégiques dans le secteur pétrolier.

En interdisant l’exportation du manganèse brut à compter du 1er janvier 2029, le président de la République engage le Gabon dans une nouvelle ère industrielle. © GabonReview
Lors du Conseil des ministres du 30 mai 2025, le président de la République a annoncé l’interdiction formelle d’exporter du manganèse brut à partir du 1er janvier 2029. Cette mesure ambitieuse, saluée comme un acte fort de souveraineté économique, vise à imposer la transformation locale de cette ressource stratégique, dont le Gabon est le deuxième producteur mondial.
Par cette décision, l’État entend passer d’une économie d’extraction à une économie de transformation et de valeur ajoutée, où les matières premières gabonaises seront traitées localement pour générer des emplois, dynamiser l’outil industriel national et renforcer la résilience économique.
Une suite logique à un processus enclenché depuis 2010
L’interdiction prochaine de l’exportation du manganèse brut s’inscrit dans la continuité des choix politiques amorcés il y a quinze ans. Déjà en 2010, le Gabon avait franchi un cap majeur avec l’interdiction d’exporter le bois en grumes, mesure qui avait permis de développer la filière bois locale, de créer des emplois industriels et de poser les bases d’une économie forestière plus intégrée.
Plus récemment, l’État a multiplié les initiatives pour renforcer sa souveraineté énergétique et minière, notamment avec le rachat progressif d’actifs clés dans le secteur pétrolier (Assala Energy, Tullow Oil, SMP Afrique). Ces opérations traduisent une volonté affirmée de reprendre le contrôle stratégique sur les richesses nationales et de redéfinir les termes du partenariat avec les opérateurs privés.
Un délai de trois ans pour une transition structurée
Conscient des implications économiques et techniques d’une telle décision, le gouvernement a accordé une période transitoire de trois ans aux entreprises concernées. Ce délai doit permettre aux opérateurs de réaliser les investissements nécessaires dans les unités de transformation, la logistique, la formation et l’énergie, afin d’assurer une bascule maîtrisée et irréversible vers l’industrialisation.
Cependant, pour garantir la réussite de cette réforme, Brice Clotaire Oligui Nguema a exigé du gouvernement un accompagnement robuste et cohérent. Il s’agira d’abord de créer un fonds d’investissement public-privé spécifiquement dédié à la transformation industrielle du manganèse, afin de mobiliser les capitaux nécessaires à l’implantation d’unités de production sur le territoire national.
Parallèlement, des incitations fiscales ciblées seront accordées aux projets industriels, pour encourager les opérateurs à s’inscrire dans cette dynamique souveraine. Le gouvernement prévoit également de lancer un programme national de formation professionnelle en lien direct avec les besoins des secteurs concernés, notamment dans les domaines de la métallurgie, de la maintenance industrielle, de la logistique et de l’énergie.
Le renforcement de l’infrastructure énergétique est aussi prévu, pour accompagner efficacement l’industrialisation et répondre aux besoins croissants des nouvelles usines. Dans le même esprit, les capacités opérationnelles de l’Agence nationale de la promotion des investissements (ANPI-Gabon) seront optimisées afin de fluidifier les démarches administratives et accélérer la concrétisation des projets industriels.
Enfin, l’État entend nouer des partenariats internationaux en matière de transfert de technologie et de compétences, afin d’accélérer la montée en puissance technique de la main-d’œuvre gabonaise et de favoriser l’émergence d’un savoir-faire local de haut niveau.
Des retombées économiques majeures attendues
À terme, cette réforme vise une croissance substantielle du PIB, la création de milliers d’emplois qualifiés, la diversification de l’économie et la réduction de la dépendance aux importations. En renforçant les capacités de transformation sur le sol national, le Gabon compte aussi réduire durablement le coût de la vie, augmenter ses recettes fiscales et améliorer la gouvernance des ressources publiques.
Ce chantier est aussi une opportunité pour structurer de nouvelles filières industrielles (alliages, batteries, produits dérivés du manganèse), et positionner le Gabon comme un acteur compétitif dans la chaîne de valeur mondiale des métaux stratégiques. La réussite de cette transition dépendra de l’engagement des partenaires industriels, de la mobilisation des compétences nationales et de la rigueur dans la mise en œuvre. Le rendez-vous est pris pour 2029, mais le véritable chantier commence dès maintenant.

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