Gabon–Guinée équatoriale : vers une fraternité consolidée au-delà du contentieux

Moins de trois semaines après avoir officiellement reçu l’arrêt de la Cour internationale de justice sur le différend territorial avec la Guinée équatoriale, le président gabonais Brice Clotaire Oligui Nguema a entamé, le 4 juin 2025, une visite d’État hautement stratégique à Malabo. Première du genre depuis son investiture, ce déplacement vise à raffermir les liens bilatéraux dans un esprit de fraternité, à apaiser les tensions nées du contentieux de l’île Mbanié et à poser les jalons d’une coopération renforcée entre deux pays liés par l’histoire, la géographie et une volonté partagée de paix.

Le président Oligui Nguema et le chef d’État équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, le 4 juin 2025, à Malabo en Guinée équatoriale. © Communication présidentielle Gabon
Le président gabonais, Brice Clotaire Oligui Nguema, effectue depuis le 4 juin 2025 sa première visite d’État en Guinée équatoriale depuis son investiture. Un déplacement hautement symbolique, intervenant à peine quelques jours après la réception officielle, le 28 mai dernier à Libreville, de l’arrêt de la Cour internationale de justice (CIJ) confirmant la souveraineté équato-guinéenne sur les îles Mbanié, Cocotiers et Conga. Loin d’envenimer les relations entre les deux voisins, cette visite marque une inflexion majeure dans la diplomatie régionale, où le dialogue, la stabilité et la fraternité prennent le pas sur la confrontation juridique.
Une première visite d’État, aux accents de reconnaissance et de réengagement

L’arrivée d’Oligui Nguema à Malabo et instantanés de la séance de travail à la présidence de la Guinée équatoriale. © Communication présidentielle Gabon
Cette visite à Malabo a d’abord valeur de remerciement : le président Oligui Nguema y a tenu à saluer la présence du chef d’État équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, à sa cérémonie d’investiture. Mais elle s’inscrit aussi dans une dynamique plus large, visant à raffermir les liens historiques et géopolitiques entre Libreville et Malabo.
Des accords bilatéraux ont ainsi été signés, couvrant les domaines de la diplomatie, de la sécurité, de la culture et du sport. Une architecture de coopération renforcée, qui témoigne d’une volonté partagée de dépasser les crispations du passé pour asseoir un partenariat durable. À cet égard, les deux pays évoquent «la volonté commune de renforcer et promouvoir les liens bilatéraux, fraternels et historiques», en écho à une relation souvent affectée par les soubresauts du contentieux territorial.
Le différend de Mbanié : vers une sortie honorable et pacifique
Sujet sensible par excellence, la question de l’île Mbanié n’a pas été éludée. Bien au contraire. Conscients que «les deux pays sont héritiers de ce litige», selon les mots mêmes du président équato-guinéen, les deux chefs d’État ont affiché une position d’une rare maturité diplomatique.
Le président Obiang Nguema a fermement exhorté son peuple à s’abstenir de tout commentaire polémique, insistant sur le fait que ce contentieux ne doit en aucun cas rouvrir des blessures ou attiser des tensions inutiles. «Le Cameroun et le Nigeria ont su régler leur différend frontalier dans la dignité et le silence. Nous devons faire de même», a-t-il plaidé, soulignant l’impératif de la paix et de la coopération en Afrique centrale.
Brice Clotaire Oligui Nguema, dans une posture d’apaisement et de responsabilité, a embrassé cette logique. Il a proposé la création d’un comité conjoint d’experts, chargé d’examiner le dossier dans un esprit de dialogue constructif et de coopération, en vue de trouver une solution définitive, pacifique et consensuelle. La mise en place de ce comité représente, selon plusieurs observateurs, le fait le plus saillant de ce sommet bilatéral : un signal fort de maturité politique et de solidarité régionale.
La CEEAC en ligne de mire : au-delà du bilatéral, l’enjeu sous-régional
En marge de cette visite d’État, le président gabonais prendra part, le 7 juin prochain, à la 26e session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). Placé sous le thème : «Consolider les acquis de la réforme de la CEEAC pour accélérer l’intégration régionale et la construction d’une communauté de destin en Afrique centrale», ce sommet s’annonce déterminant.
Le rapprochement entre Libreville et Malabo, dans ce contexte, s’inscrit dans une vision plus large : celle d’une Afrique centrale soudée, politiquement stable, économiquement intégrée et stratégiquement alignée face aux défis contemporains. Le Gabon, sous la houlette d’Oligui Nguema, entend jouer un rôle actif dans cette dynamique de refondation continentale, en misant sur la diplomatie du respect mutuel et du bon voisinage.
Une diplomatie de la désescalade
Si l’arrêt de la CIJ aurait pu figer les positions ou provoquer des surenchères nationalistes, c’est une tout autre lecture de l’histoire qui s’est imposée : celle de deux nations conscientes que leur avenir ne peut se construire que sur la paix, l’écoute et la fraternité. Comme l’a sobrement exprimé le chef de l’État gabonais : «Nous n’avons pas besoin de tensions. Nous avons besoin de coopération.»
Dans un contexte géopolitique africain marqué par les incertitudes et les recompositions, la démarche des présidents Obiang et Oligui Nguema fait figure d’exemple. Celui d’une sagesse diplomatique où l’intérêt commun prime sur la revanche juridique, et où l’avenir s’écrit à deux voix.

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