La décision du gouvernement de durcir les conditions d’attribution des bourses a provoqué le courroux des élèves, qui initient des marches sporadiques à travers le pays depuis deux jours. Leader de la société civile, Dieudonné Minlama invite le gouvernement à revoir sa copie, au risque que la colère des élèves ouvre la voie à un «chaos généralisé».

Dieudonné Minlama, membre de la société civile gabonaise. © D.R.

 

Gabonreview : Quel est votre regard sur la colère des élèves suite à la réforme sur les bourses ?

Dieudonné Minlama : Il y a quelques jours, j’ai attiré l’attention de l’opinion nationale sur le durcissement des mesures d’austérité prises par le gouvernement. Nous avons condamné ces mesures, car nous avons estimé qu’elles ont été prises sans une étude réelle préalable, à même d’en mesurer l’impact social, économique, politique et sur le vivre ensemble. J’avais alerté que ces mesures vont renforcer la fracture sociale, l’instabilité et l’état de pauvreté des populations. Parmi ces mesures, il y en a qui concerne les élèves avec le renforcement des conditions d’attribution des bourses. Résultats des courses, les élèves manifestent dans la rue. L’on dit souvent que chacun récolte ce qu’il a semé et cette situation regrettable en est la parfaite illustration. Le gouvernement veut l’excellence avec le 12 de moyenne au bac à 19 ans, pour l’obtention de la bourse. Mais en amont, ce gouvernement aurait dû semer les graines de l’excellence avant d’en prétendre récolter les fruits. Notre système éducatif est-il excellent ? Nous disons non !

Nous avons des problèmes d’infrastructures, ressources humaines, financières et matérielles. Nous avons des lycées qui fonctionnent sans enseignants, des salles de classe avec plus de 100 élèves, un déficit criard en établissements d’enseignement secondaire, l’absence de transport scolaire ou internats, les grèves à répétition des enseignants chaque année occasionnant les interruptions des cours…comment un système éducatif aussi médiocre peut-il présenter des résultats excellents ? Avant d’exiger l’excellence, le gouvernement aurait préalablement gagné à ériger un système éducatif qui s’y prête. L’on ne se lève pas un matin en exigeant l’excellence alors que l’on n’en a pas ensemencé les graines. La conséquence est ce que nous observons depuis deux jours avec la colère des élèves. Car notre système éducatif actuel ne permet pas d’arriver en Terminale avant l’âge de 19 ans.

En janvier dernier, j’ai milité pour l’organisation d’un débat national réellement inclusif, pour discuter des questions fondamentales comme l’éducation. Je regrette que le Premier ministre voie en cette proposition, une occasion de simplement distribuer les postes. Aujourd’hui, nous sommes face aux jeunes gabonais dont les pancartes exhibées durant leur mouvement disent en substance qu’ils ne sont pas responsables de notre incompétence, les détournements massifs des deniers publics, la gabegie financière… ils sont justes des victimes. Je continue de penser que la crise de l’éducation est une crise parmi tant d’autres. Que se passera-t-il lorsque les salaires des fonctionnaires seront réduits, ou une partie de la main-d’œuvre non permanente mise sur la touche ? Cela va renforcer la contestation et ouvrir une ère d’instabilité et d’insécurité pour notre pays.

Face à la position tranchée du gouvernement sur cette question, s’achemine-t-on vers un chaos dans l’éducation ?

Nous nous acheminons vers le chaos généralisé. Car il n’y a pas seulement que l’éducation. Lorsque vous licenciez un parent, vous affaiblissez l’éducation. Comme beaucoup, j’estime que cette question sur les bourses n’est pas la solution, car elle affaiblit notre système éducatif déjà moribond. Il faut plutôt y injecter davantage de moyens et surtout, une bonne gestion. Combien d’écoles sont sorties de terre depuis 2009 ? Combien d’enseignants ont été formés et intégrés à la Fonction publique ? Quels types d’éducation et formation souhaitons-nous ? Autant de questions sur lesquelles le gouvernement doit se pencher de manière sérieuse et urgente. Encore une fois, nous pensons que ce n’est pas en réduisant les investissements dans l’éducation que le gouvernement réalisera des économies. Et je reste convaincu que le principal problème du Gabon est le détournement des deniers publics et la mal gouvernance. Je vais d’ailleurs paraphraser Omar Bongo, qui disait que si chaque franc programmé pour l’éducation avait réellement été utilisé à cet effet, nous aurions le meilleur système éducatif d’Afrique.

Par ailleurs, le gouvernement n’a donné aucune indication sur l’utilisation des économies engrangées par ses différentes mesures d’austérité. Encore moins, le temps que dureront lesdites mesures. Il y a mieux à faire et nous pensons que le gouvernement doit mettre en place une politique de bonne gouvernance. C’est peut-être l’occasion de savoir à quel niveau se situe l’opération «Mamba», par exemple. Ou encore, que deviennent les dernières recommandations de la Cour des comptes ? Le gouvernement se doit de nous fournir un plan détaillé à même de mettre fin à la mal gouvernance. C’est le plus important.

Que proposez-vous dans l’urgence pour ramener la sérénité dans le secteur éducation ?

Il faut automatiquement annuler ces mesures d’austérité, dont celle en rapport avec les bourses. C’est clair comme de l’eau de roche. Si nous ne le faisons pas, je ne vois pas ce qui pourra arrêter cette contestation des élèves sur l’ensemble du territoire national. Il n’y a plus de bourses, la fonction publique ne recrute plus… où se trouve l’espoir dans ce pays ? Quelle Nation s’est développée sans un système éducatif performant ? L’éducation est la base de tout développement !

 
GR
 

5 Commentaires

  1. Hribar dit :

    Bonsoir
    Cela ne risque pas de changer dans les années à venir.
    Quand on voit l´age des enfants scolarisés, année blanche, professeur qui profitent des jeunes élèves, salle de classe vétuste, grève, transport, ect…
    Dans 500 ans vous aurez toujours besoin des étrangers, vous n arrivez pas à éviter la corruption

    • Plutonium 241 dit :

      Entre les griefs que vous énoncez à juste titre d’ailleurs,la corruption,et les étrangers dont « vous aurez toujours besoin », je ne vois vraiment pas le rapport… Quant au mêmes étrangers dont on aura toujours besoin, vous me faites bien rire, quand on sait qu’ils ne sont épargnés par aucun des griefs que vous relevez compris la corruption ils les vivent,les subissent et certains même en vivent comme tous les autres …On tourne en rond en fait…

  2. Ulys dit :

    Un gouvernement MÉDIOCRE qui exige L’EXCELLENCE à la jeunesse gabonaise. Lol !

    Ça me fait penser à la visite technique imposée (voutures), alors que le réseau routier est pitoyable. A Ntare Nzame !!! Pauvre Gabon !!!

  3. MONSIEUR A dit :

    Quand le GABON aura un Premier Ministre ou un Président de la République ayant obtenu le Bac C, D, E ou F avec une moyenne de 12/20 au baccalauréat, alors on pourra appliquer cette mesure d’octroi des bourses à 19 ans.

  4. contribution dit :

    Moussavou Jacques qui ne cesse de se déchainer en parlant “d’exiger la mise en place d’un collège des médecins qui va examiner Ali ; afin d’obtenir la vacance de pouvoir et aller aux élections”! Mais enfin, qu’est ce qui ne va pas chez vous (tous ceux qui soutiennent cette idée)? Toutes les expériences qu’on a eu avec ce système et la françafrique ne vous enseignent-elles pas? Vraiment! Vous n’êtes pas fatigués? DEPUIS 1993 que cette comédie dure vous n’êtes pas fatigués? Récemment vous êtes allés aux élections législatives contre l’avis de la majorité du peuple, qu’avez-vous rapporté? Qu’espérez-vous avoir dans des élections avec Mborantsouo, Bibalou (président du Centre gabonais des élections choisi par Mborantsouo), Matha … en place? Vous avez la mémoire tellement courte que vous avez déjà oublié ce qu’ABOGHE ELLA (lui aussi mis en place par Mborantsouo sa belle sœur) a fait lors des dernières élections ? Ce qui lui a d’ailleurs valu une très forte ovation le jour de la prestation de serment d’Ali !
    Alors que les Bongo (Ali, Mborantsouo, Pascaline, Patiente….) et compagnie n’ont jamais varié d’un seul iota dans leurs positions, vous de votre coté vous étalez une faiblesse déconcertante en ballotant constamment dans tous les sens ? Doit-on conclure que dans ce pays les seuls hommes forts sont les Bongos et alliés ?
    Avez-vous entendu le dernier discours d’YVES LE DRIAN à propos du Gabon (alors qu’il est le premier à contester l’élection de Tsissékedi en RDC par ce que le candidat soutenu par l’Elysée a perdu! Et que dans le cas du Venezuela, son pays et lui sont engagés dans la déstabilisation du patriote Maduro pour installer leur sous préfet, le perdant Juan Gaido)!
    Admettons que par miracle on puisse obtenir la mise en place d’un collège des médecins gabonais (et même Français) pour examiner Ali. Pensez-vous, après les épisodes de 5 actes de naissance établis au Gabon, d’une simple fiche d’identité (qui n’est pas un acte de naissance à proprement parlé) soit disant retrouvée à NANTES en France et à laquelle était annexée un courrier de Mme LEGAL comme pour authentifier ladite fiche et l’autoriser à se présenter aux élections en 2016 (Mme LEGAL fut la responsable de la cellule africaine de l’Elysée du temps de HOLLANDE. Ce courrier a été lu par Ali lui même le jour du dépôt de sa candidature en juillet 2016), après tous les mensonges sur les soit disant diplômes d’Ali (dont la fausseté a été confirmé récemment par le documentaire de France2), après le mensonge du siècle sur les 99,99% des suffrages obtenus dans le haut Ogooué (avec 40 abstentions sur toute la province; alors que rien qu’à Moanda on avait déjà plus de 400 abstentions), après tous les mensonges sur sa pathologie et tout ce qui a suivi, ….pensez-vous après tout cela, que ce fameux collège des médecins vous dira la vérité sur le cas d’Ali ; sachant que cela aura pour conséquence sa mise à l’écart alors que le système qui dirige le Gabon (Bongo-PDG-AJEV-Françafrique-Deltasynergie-Olam-le roi du Maroc) n’a pas encore fini de peaufiner la stratégie qui lui permettra de mettre au pouvoir un autre valet ? Vous rêvez ou quoi ? Savez-vous les intérêts qui sont en jeux là ? Croyez-vous que les Bongos et compagnie sont près de laisser les18% de tout le pétrole Gabonais (qui font la banque BGFI et l’existence de l’agence Cty bank du Gabon) à une autre famille ? Pensez-vous que la France est prête à laisser le Gabon s’émanciper économiquement ; alors qu’au travers du BRGM (un organisme français chargé de l’évaluation des richesses du sous sol) ils ont déjà fini d’évaluer toutes les richesses du sous sol gabonais ; et que cela s’est révélé être un scandale géologique, des trésors inestimables que le Gabonais lui-même est encore loin d’imaginer ?…
    Croyez-vous que c’est pour jouer les bons samaritains que Mme LEGAL, qui n’est pas un responsable de l’état civil colonial en France, mais qui était plutôt un haut responsable de l’Administration Hollande s’est personnellement impliquée pour donner une sorte de crédibilité (la caution de l’Elysée)à un document qui devait permettre à Ali de se présenter aux élections 2016
    En observant l’attitude de Mborantsuo (son front, son coup et la manière dont elle gesticule quand Ali reçoit des gens depuis son AVC), ça vous dit quoi à vous qui vous vantez d’être des grands spécialistes de la spiritualité ? Moi, je « lis » au travers de ces signes que Mboratsouo a déjà pris une décision irrévocable de mettre sa vie sur l’autel du sacrifice pour la défense de ce système. Elle ne reculera devant rien. Pour elle, plutôt mourir que de laisser le système sombrer. Alors, que pouvez-vous faire quand celle qui a déjà pris une telle décision est en même temps le juge de vos fameuses élections ? Pensez-y.
    Pour terminer, je dirai que la solution pour la libération du Gabon ne viendra pas des nouvelles élections (anticipées ou en 2023). Car, comme je viens de le démontrer plus haut, le système en profitera pour mettre encore à la tête du pays un des leurs, au détriment du peuple. La solution ne consiste pas non plus à réclamer l’installation de Ping (dont la victoire est incontestable, n’en déplaise à NZOUBA Ndama qui n’est plus avec vous mais qui est déjà avec MBORANTSOUO, CHAMBRIER , OYE MBA….), car lui aussi n’a pas pu prendre ses distances envers la France. S’il prend le pouvoir, le système françafrique va continuer avec lui; alors que la nouvelle génération veut désormais une indépendance totale qui permettra d’amorcer le vrai développement de notre pays.
    Ping ne pourra pas mener les combats qui doivent suivre tel que celui de la sortie du FRANC CFA, du démantèlement de la base Française du 6ème BIMA, etc… Mais on aura besoin de lui pour restaurer la diplomatie gabonaise qui est totalement par terre et inexistante en ce moment.
    La véritable solution à mon humble avis est dans un soulèvement brutal et général de la population, comme ce qu’on a vécu en 1990. Un soulèvement qui va déboussoler la France et ses sbires et remettra tout à plat. Ensuite les élections seront organisées avec une nouvelle classe politique.

Poster un commentaire