Libreville abrite du 11 au 12 avril la campagne «Vision Zéro» de l’Association internationale de la sécurité sociale (AISS), dont l’objectif est de limiter significativement les accidents du travail. Une rencontre à laquelle participe activement la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), à travers notamment sa direction de la prévention des risques professionnels. Le responsable de cette direction revient sur le bienfondé de cette campagne, non sans éluder les missions et défis de son département.

Jacques Emmanuel Roy, directeur de la prévention des risques professionnels à la CNSS, le 11 avril 2019 à Libreville. © Gabonreview

 

Gabonreview : Quel est l’intérêt pour le Gabon d’abriter le lancement de «Vision Zéro» ?

Jacques Emmanuel Roy : La CNSS, à travers sa direction générale, a mis en place une direction de la prévention des risques professionnels depuis un an et demi. Cette direction a pour objectif principal la préservation de l’intégrité physique et mentale des travailleurs, et la diminution des coûts liés aux accidents du travail et maladies professionnelles. Ses activités s’articulent autour de l’information, la sensibilisation, la formation et le contrôle en prévention. Mais aussi, les études et la recherche en matière de sécurité et de santé au travail. Le lancement de la campagne «Vision Zéro» avec ces sept règles d’or, s’inscrit parfaitement dans le cadre de ce que nous faisons au Gabon. Et nous en sommes heureux.

Quelles sont ces sept règles d’or ?

Pour faciliter une approche plus systématique et plus intégrée en matière de prévention, la campagne «Vision Zéro» repose en effet sur sept règles. Il s’agit de faire preuve de leadership ; définir les objectifs ; garantir un système sûr et sain ; assurer la sécurité et la santé sur les machines, équipements et lieux de travail ; améliorer les qualifications ; investir dans la personne. Les employeurs et administrations notamment, doivent s’approprier ces règles.

Comment est structurée votre direction ?

Nous tenons à rappeler qu’il y a une dizaine d’années, il n’y avait aucune structure de prévention des risques professionnels au sein de la CNSS. En 2009, une structure a été mise en place mais elle n’était qu’une simple division. Fin 2017, avec l’arrivée du Dr Nicole Assélé à la tête de la CNSS, une direction de la prévention des risques professionnels a été mise en place, s’inscrivant pleinement dans les directions métiers de la CNSS. C’est un grand pas en avant. Dans le cadre de nos activités, nous avons deux divisions : une division support, chargée de la relation employeur ; et, une division métier (santé et sécurité au travail), avec des activités régaliennes et celles prévues dans l’article 73 du Code de Sécurité sociale.

Pourtant, les mécanismes de prévention des risques professionnels ne sont pas toujours présents dans le privé…

L’organisme de sécurité sociale assure les salariés du secteur privé. Et l’existence de notre direction permet de sensibiliser et former les travailleurs sur les problématiques des risques dans tous les secteurs d’activités. C’est un travail de longue haleine. Car c’est un domaine peu connu, aussi bien des employeurs que des salariés. Et notre rôle est de vulgariser les bonnes pratiques en matière de sécurité santé au travail.

 
GR
 

1 Commentaire

  1. Aristide DOUMINGOU dit :

    Cet objectif de la CNSS, arboré sous la terminologie « Vision zéro » est très intéressant pour favoriser le bien-être au travail dans toutes les sphères de compétence de notre pays, que ce soit au privé comme au public. Cela va inexorablement avoir pour conséquence une réduction très significative des accidents du travail sur l’ensemble du territoire national… Parler de « VISION ZÉRO » peut n’être qu’une simple vue de l’esprit difficilement réalisable sur l’écran de l’espace et du temps, mais ce standard très élevé n’est toutefois pas sans générer d’excellents résultats si les choses sont faites de manière objective, réaliste et sans admettre le moindre laxisme dans la réalisation de cet objectif très noble. Et en la matière, le pouvoir exécutif (au plus haut niveau de l’Etat) serait un excellent levier de commande pour plier tous les milieux de profession, quels qu’ils soient, à la stratégie qui sera mise en place. Vous parait-il stupide ou inapproprié que l’Etat, entendez les instances dirigeantes, impose à toutes les entreprises ou les milieux de profession l’existence d’un service de prévention des risques professionnels en leur sein ? J’ignore ce qui est prévu par la CNSS, je crois que si elle ne prend pas en compte cette problématique que je soulève, cet objectif (même atteint dans une moindre mesure) serait difficile voire impossible à réaliser. Ma modeste expertise du fait de mes expériences antérieures dans le domaine m’a conduit à faire un certain nombre de constats dignes d’intérêt. Il m’est apparu que la majorité des chefs d’entreprise clame à grands cris la nécessité à prendre en compte les problèmes liés à la sécurité des salariés. Pour certains d’entre eux, cette aspiration à la sécurité débouche sur la construction ininterrompue d’un système de prévention des accidents et des risques professionnels, mais celui-ci est bien souvent mis à rude épreuve par des salariés qui, par bêtise ou ignorance, font fi du règlement et des consignes diverses qui réglementent pourtant les activités pour assurer leur propre sécurité.
    Pour d’autres chefs d’entreprise, c’est la négligence, l’insouciance. Pour ces derniers, l’aspiration à un vrai Système de gestion de la Santé et de la Sécurité au travail (notion utile à définir) n’est qu’un vernis extérieur, qui n’a aucune réalité objective ; sur le plan pratique ou dans les chantiers de production, les activités ne font référence à aucun souci de sécurité dans les pratiques professionnelles, et cela, sous le prétexte de la production.
    Avec un personnel dénué de formation, d’information, de sensibilisation et parfois physiquement inapte aux opérations entreprises, on comprend avec effroi pourquoi tant d’accidents sont enregistrés dans les milieux de profession, dans les sociétés. Même si je souligne un éveil dans ce sens pour la majorité d’entreprises, c’est avec quelques restrictions qu’il faut le reconnaître car les efforts consentis jusque-là ne sont pas encore de nature à impulser un réel souci de sécurité dans les comportements des travailleurs, sur les installations et dans les opérations. Que faire pour changer cet état de fait ?
    Votre concept de « Vison zéro » est une manière de montrer aux opérateurs économiques et autres que vous y avez déjà réfléchi… Et je vous tire mon chapeau.
    Plus haut, j’ai indiqué qu’il soit nécessaire que l’Etat impose à tous les « milieux de profession » (notion utile à définir) l’existence d’un service de prévention de risques professionnels, il serait en outre capital d’insister sur le facteur humain car il est directement ou indirectement responsable de la majorité des accidents. Le comportement au travail ou dans l’exercice d’une activité n’est pas à négliger, vous devez savoir que le sens du risque professionnel, l’esprit de sécurité, est une attitude d’esprit faite de réflexion, d’attention, de prudence, etc. Il convient de la développer chez les travailleurs exposés et à tous les niveaux où se pratique une activité économique ou autre par des actions éducatives ou de sensibilisation; c’est une réelle action sociale de terrain à laquelle devraient se livrer les instances ou acteurs qui auront été retenues.
    Toutefois, dans les milieux de profession, la lutte contre les accidents du travail devrait privilégier la prévention technique car les résultats à attendre des actions éducatives sont toujours précaires et incertains. L’être humain oublie vite ce qui lui est désagréable. Il est naturellement négligent. Il nie facilement le danger ou le sous-estime par accoutumance. Il manque d’objectivité, chacun pense qu’il échappera à l’accident. Autre aspect, le fait que l’accident grave est heureusement exceptionnel, et qu’il se produise dans des circonstances imprévisibles, ne favorise pas non plus la prévention. Ce que je dis ici est d’autant plus vrai qu’un chef d’entreprise m’a dit un jour :  » Pourquoi prendre des mesures de prévention, il n’y a jamais eu d’accident ici?
    Il faut plus que la simple sensibilisation ou autre car la méthode qui ferait dépendre uniquement la prévention du respect des consignes, c’est-à-dire de la seule initiative des travailleurs ou des dirigeants serait inopérante et même dangereuse. La protection doit avant tout être envisagée sous forme des moyens matériels à mettre en place qui font d’ailleurs l’objet de prescriptions réglementaires. Les consignes viennent ensuite. Ainsi les défaillances humaines n’auront pas de conséquences graves, les dispositifs de protection ayant précisément pour but de faire obstacle aux gestes. dangereux.
    Quelque part dans ce petit commentaire, j’ai parlé de production que beaucoup de chefs d’entreprise opposent malheureusement souvent à la prévention des accidents. Ils disent toujours que les préventeurs perdent du temps avec leurs activités de sensibilisation, contrôles en tout genre envers les travailleurs actifs dans les milieux de production. Pourtant, aucune sécurité ou production n’est possible sans une vraie prévention, et cette sécurité doit intégrer un ensemble de paramètres ou de choses si vous voulez.
    Je crois que la prévention ne doit pas être séparée de la production et constituer une gêne pour cette dernière. A cet effet, les dispositifs de protection (je l’ai dit plus haut) doivent être incorporés aux machines, aux installations, ne pas sous-estimer aussi la sensibilisation et actions éducatives des travailleurs quant aux risques intrinsèques aux taches réalisées…, on doit en tenir compte dans l’organisation du travail et dans les modes opératoires. C’est cette conception d’ensemble qui constitue la sécurité intégrée.
    Vous avez beaucoup à faire, c’est un défi de taille auquel chaque habitant, chaque citoyen, opérateur économique… devrait se sentir véritablement concerné. Pourquoi ? Parce qu’on travaille pour gagner sa vie, pas pour la perdre. Il n’existe aucune personne sur cette terre qui puisse faire mentir cela. Vision zéro, c’est plus qu’un objectif noble. A ceux qui lisent ces lignes, n’y voyez pas une forme de prétention à n’enregistrer le moindre accident du travail au cours d’une année. Si cela arrive, nous n’en serions que très flattés… mais nous savons c’est impossible. Je reconnais toutefois que c’est un standard très élevé, et en la matière, les résultats à obtenir seront au-delà de ce qu’on a toujours espéré.
    Pour ma part, je vous souhaite bon courage !

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