Après avoir «flingué», selon l’expression de La Lettre du continent, le diplomate français Christophe Billaudé, le quotidien L’union vient de s’en prendre au ministre français chargé du Développement, Pascal Canfin. Les faits et les interrogations induites.
gabonreview.com - Le ministre français chargé du Développement, Pascal Canfin - © Michel Stoupak

 

Dans son billet Makaya du 2 juillet 2012, le quotidien gabonais a passé au laminoir le diplomate français Christophe Billaudé, premier Secrétaire de l’ambassade de France au Gabon. Celui-ci était accusé d’avoir délivré des visas aux membres de l’opposition et de la société civile gabonaise, en partance pour Paris, fomentant une opération de lobbying autour de la rencontre François Hollande-Ali Bongo. Makaya a présenté le diplomate comme «un barbouze du nom de Billard ou Billaude, qui (…) aurait mérité d’être un collabo fasciste IIIe Reich plutôt qu’un diplomate en poste dans une Afrique qui change.» Traité de «petit paperassier», il lui a été rappelé que le Gabon offrait aux siens «soleil, plages, lune, arc-en-ciel, argent facile, nanas, bref tout à l’œil».

Christophe Billaudé a quitté le Gabon il y a quelques jours. Non à cause de ce billet Makaya, mais pour avoir été affecté ailleurs après un peu plus de trois ans en poste au Gabon. Ce n’était donc qu’un au revoir. Mais quel au revoir.

Presque sur la même lancée, Makaya a récidivé le 30 juillet. Cette fois avec Pascal Canfin, ministre délégué auprès du ministre français des Affaires étrangères, chargé du Développement. Membre d’Europe Écologie, ancien député européen spécialisé dans les questions de régulation financière et ancien journaliste, Pascal Canfin est présenté par Makaya comme «un pôvre ex-pisse-copie bombardé par la grâce de son seigneur, chargé du développement au Quai d’Orsay». Le quotidien L’union lui reproche ses propos sur le Gabon et sur Ali Bongo dans une interview accordée à Mediapart. Makaya indique que les propos du ministre français dans cet entretien comportent des «vieux clichés» et du «paternalisme», mais surtout ils classent le Gabon «dans sa liste des pays qui ne respectent pas les droits humains.» Et de s’écrier : «Oh ! là là. Il parle de quel Gabon ? Nul en géographie comme tout bon Français.» Sans doute à juste titre, L’union rappelle qu’il n’y a pas de prisonniers d’opinion au Gabon, que la liberté de la presse «est une réalité». Par ailleurs, les compatriotes de Canfin «parmi lesquels des pédophiles, des sans-papiers vivent chez nous sans crainte.»

Dans son interview à Mediapart, le ministre français explique avoir «normalisé les relations entre la France et l’ensemble des états concernés, en Afrique et ailleurs» avec notamment la dissolution de la cellule Afrique de l’Élysée par François Hollande dès le début de son mandat. Pour Pascal Canfin, «c’est une nouvelle étape qui correspond aux aspirations de tout le monde, de celles des français, de celles de populations concernées et de celles des chefs d’états». Abordant la visite du président gabonais à l’Élysée, Canfin, qui mentionne au passage une spécificité gabonaise, explique que cette visite «était l’occasion de dire en face à Ali Bongo un certain nombre de choses. Le président de la République a saisi cette opportunité pour parler des droits de l’homme, des élections et de la démocratie». Les raisons de la colère.

Le journal L’union étant tenu par un proche de Laure Olga Gondjout, on en vient à penser que le secrétaire général de la présidence de la République pourrait être à l’origine de ces sorties anti-françaises. On pense en effet que Lin-Joël Ndembet, qui dirige le titre, ne saurait, de son propre chef, prendre une telle initiative dans un contexte où l’on se moque beaucoup du communiqué du PDG qui ramenait le Parti socialiste français à l’ordre pour son commentaire sur les législatives de décembre 2011.

Interrogé au sujet de la sortie de L’union contre Pascal Canfin, un cadre du ministère des Affaires étrangères du Gabon s’est refusé à s’étaler sur ce qu’il a qualifié de «nouvelle faute diplomatique», non sans souligner que «tout le monde sait que Makaya est souvent rédigé sous la dictée de la présidence de la République.» Comment et pourquoi, en effet, ce journal réputé gouvernemental se permet-il cette volée de bois vert ? Que fera-t-il si ce ministre, chargé du Développement, en venait à visiter le Gabon ?

En 2008, un reportage sur les avoirs du président Omar Bongo réalisé par France 2 et relayé en par France 24 et TV5 Monde avait été considéré par Libreville comme un acte destiné à nuire à l’honorabilité du président du Gabon. Libreville estimait alors que si France 2, une chaine publique française, avait traité et passé ces informations c’est qu’elle en avait reçu l’ordre des plus hautes autorités françaises. Les relations diplomatiques en prirent d’ailleurs un coup et ne revinrent à la normale qu’après l’éviction de l’ancien ministre français à la Coopération, Jean Marie Bockel, pour ses propos maladroits qui avaient envenimé la situation.

Que penser, a contrario, lorsque qu’un titre comme L’union, présenté comme le « quotidien officiel » du Gabon, s’en prend depuis un moment à des diplomates ou hommes politiques français ?  Que le Gabon voudrait amorcer un bras de fer avec son principal partenaire économique et commercial ? Pour affirmer sa souveraineté, le Gabon a-t-il donc entrepris d’agir ainsi ?

 
GR
 

17 Commentaires

  1. Eric Nguéma Mba dit :

    Droles de questions, que celles du journaliste de gabonreview! Canfin raconte des conneries dans un organe français, l’union lui répond avec la même violence et la même legereté. Où est le problème. quant au diplomate gabonais anonyme, c’est franchement un rigolo. Un obscur (parce que Canfin n’est pas autre chose, désolé)ministre français insulte le Gabon et son Président et je suppose que notre grand cadre diplomate veut qu’on applaudisse!ça s’appelle ici aux USA un nègre oncle tom!

    • Rank dit :

      @ Eric Nguéma Mba
      Faut pas cautionner les dérives au nom d’un chauvinisme de mauvais aloi. Et il ne fut affirmer que ce dont vous sûr. Pascal Canfin n’a jamais insulté Ali Bongo. L’article résume très bien ce qui a été dit dans cette interview. D’ailleurs, voici les extraits de cette longue interview dans lesquels Canfin parle d’Ali Bongo et du Gabon. Cherchez l’injure.
      Mediapart :
      On a pourtant vu défiler à Paris certains chefs d’États africains qui incarnent la vieille « coopération ». François Hollande devait-ilrecevoir Ali Bongo, sans recevoir les représentants de l’opposition ou de la société civile gabonaises ?
      Pascal Canfin :
      Les ONG gabonaises ont dit de cette visite, et je trouve cela assez positif, qu’elle était l’occasion de dire en face à Ali Bongo un certain nombre de choses. Le président de la République a saisi cette opportunité pour parler des droits de l’Homme, des élections et de la démocratie. La question est de savoir quel mode de relation est efficace avec des pays qui n’ont pas d’organisation démocratique. Parce que là, on parle de l’Afrique, mais on pourrait aussi parler de la Chine par exemple. Si on est dans le boycott, on n’a aucun levier et cela ne correspond pas à la réalité du monde. Si on est dans la surenchère et la polémique permanentes, on n’a aucun moyen de pression. Doit-on plutôt utiliser la relation bilatérale pour dire en privé ce qu’il faut dire ? Je pense que c’est la bonne ligne.
      Mediapart :
      Mais vous n’avez pas vu Ali Bongo et votre cabinet a reçu des représentants d’ONG gabonaises… Pourquoi ?
      Pascal Canfin :
      Il n’a pas demandé à me voir et je ne l’ai pas non plus sollicité, parce qu’il y a effectivement un problème spécifique avec le Gabon. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas avoir de discussions. Par exemple, nous en avons d’assez poussées sur la protection de la forêt. Au nom des droits de l’Homme qui ne sont pas respectés dans ce pays, doit-on renoncer à travailler sur les questions forestières ? Je pense qu’il faut avoir, en privé, un discours ferme sur les droits de l’Homme et, par ailleurs, travailler ensemble sur certains dossiers. Je pousse aussi pour que les entreprises françaises agissent de manière transparente et qu’elles soient encadrées. C’est tout l’objet du texte discuté actuellement au niveau européen pour imposer la transparence aux grandes entreprises. Quand Aung San Suu Kyi est venue à Paris, elle a délivré deux messages principaux : “Venez investir pour conforter la transition démocratique, mais faites-le dans un cadre totalement transparent pour éviter les dérives”.

    • Le fils de la Veuve dit :

      @Eric Nguéma Mba. Où avez-vous des injures dontre le Gabon ? Paul Marie Gondjout interdit de quitter le Gabon semedi dernier, n’est-ce pas une atteinte au droit constitutionnel d’aller et venir ? L’Union Nationale dissoute sans base légale, n’est-ce pas une atteinte à la liberté d’association ? Montrez moi dans quel texte de loi avez-vous vu la référence à la dsssolution ? La loi évoque la suspension. Il ya nuance…. Des compatriotes interdits de soldes ou révoqués pour délit d’opinion, n’est-ce pas une atteinte aux libertés publiques ? Des militaires se livrant à des opérations de policee, n’est-ce pas une atteinte aux libertés. Vous parlez trop et comme tout émergent vous vivez dans le déni de réalité….
      Pour Lin Joël Ndembet, qu’il cite les noms des pédophiles, sinon il se rendra coupable de complicité…..

  2. La Fille de la Veuve dit :

    « des pédophiles… vivent chez nous sans craintes ». L’Union du 30 aout 2012.
    Dans le billet « Makaya » du lundi 30 aout 2012, objet de votre article, j’ai pour ma part été plus que surprise par cette déclaration « Il apprendra que ses compatriotes parmi lesquels des pédophiles, des sans-papiers vivent chez nous sans crainte. »
    Ainsi donc, l’Union, journal Gouvernemental, dirigé par Lin-Joël Ndembet, très proche d’Ali Bongo Ondimba, affirme, poussé par la haine subite du Francais, qu’au Gabon, sous le régime de l’Emergence, « des pédophiles… vivent sans craintes » !
    Soit le Directeur de la publication, par ignorance et incompétence ne mesure pas la portée d’une telle affirmation, soit il sait de quoi il parle et la haine qui a inspiré son billet a eu toutes les peines du monde à dissimuler ce secret jusque-là plutôt bien gardé.
    En tout cas, c’est le moment pour toutes les personnes morales publiques et privées dont la mission est de défendre les enfants de se mobiliser et de demander des comptes a Lin-Joël Ndembet, en sa qualité de Directeur de la publication de l’Union afin qu’il fasse toute la lumière sur cette affaire. La pédophilie étant un crime, toute personne qui en a connaissance sans la dénoncer se fait complice de ce crime. Lin-Joël Ndembet qui a laisser publier ce billet en connaissance de cause est de fait complice de crime de pédophilie.

    • Isidore dit :

      @ La fille de la veuve dans la partie dont vous parlez de cet article makaya ne dit rien de nouveau il y a deja eu des procédures judiciaires au sujet de pédophiles français, un exemple : http://www.gaboneco.com/show_article.php?IDActu=24328 en ce qui concerne les français sans papier on en parle même plus.

      • La Fille de la Veuve dit :

        Isidore,
        Ne vous sentez pas tenu de répondre aux commentaires au seul motif qu’ils vous déplaisent.
        L’article de Gaboneco que vous citez et dont le titre est « Gabon : Arrestation d’un pédophile français à Libreville » parle de l’affaire d’un citoyen français arrêté. Le billet de Makaya parle quand à lui de pédophiles qui vivraient sans crainte au Gabon. L’article de Gaboneco datant du 21 décembre 2011 et le billet de Makaya du 30 août 2012, nous pouvons au moins convenir que ce n’est point de cette affaire dont parle Lin-Joel Ndembet.
        Lin-Joel Ndembet doit savoir de quoi il parle, pour preuve il ne dit pas que tous les citoyens français sont impunis, mais des Citoyens français. Je serai le procureur de la République, je le convoquerai dès demain matin! Mais, là c’est juste du rêve !

  3. L'Ambassadeur Kinguele dit :

    C’est pas étonnant,ils sont aux abois .. Cela montre aussi la fin d’un régime dictatorial… Les prémices sont déjà présents dans leurs petites têtes. Cela ne sert a rien d’insulter les gens,comme le fait Michel Ogandaga ou d’autres apparatchik du parti totalitaire.Mais,qu’ils sachent que le moment venu chacun répondra de ses actes stupides.

  4. Fax1 dit :

    Il faut attendre à présent que la clique au pouvoir tire à boulets rouges sur l’administration US et son ambassadeur au Gabon, pour parachever cet ultime exercice de tir dans le pied. C’est peut être une nouvelle discipline que le Gabon a l’ambition de présenter aux prochains JO.

  5. MEYE Jean Julien dit :

    Je suis d’accord avec La fille de la Veuve, tous les parents doivent demander des explications au Directeur de publication du journal l’Union, car c’est lu qui a mis au grand jour cette information que les français résidents au Gabon pratiquent la pédophilie. Pourquoi avoir garder une importante information et la publier pour un problème politique ? Au lieu d’insulter l’autre, il faut utiliser les arguments politiques comme Mr Canfin l’a fait. Qu’est ce qu’il est nul celui qui a écrit ce billet makaya. Manque d’arguments valables pour mettre l’autre en mal. Les injures n’arrangent rien mon pote. Il est journaliste Mr Canfin, toi aussi tu es un autre, utilise les vrais arguments pour convaincre l’opinion au lieu d’injurier l’autre. Bande d’amateurs aux ordres du kalaba.

  6. Mangondo dit :

    cela ressemble lorsque le régime Gbagbo tirait à sa fin.
    les médias et les pros Gbagbo passaient leur temps à injurier la France et les Français en cote d’ivoire, et voilà les mêmes choses se répètent au Gabon.
    un régime élu démocratiquement ne se reproche de rien, le pdg dénigre le gouvernement d’une grande puissance comme la France c’est qu’ils ont fait fort.
    et si les Français ne réagissent pas, c’est qu’en France il y a un sérieux problème avec le dossier Gabon.

  7. sinotables dit :

    C’est de la boxe ça. Et la violence des coups peut amener les deux adversaires à un respect mutuel.

  8. Isidore dit :

    Bon je ne vois pas en quoi cet article de Makaya est plus violent que ce que nous voyons tous les jours dans la presse française au sujet du Gabon ou d’autres pays il y va de la liberté de la presse et point barre. On est loin de l’incident diplomatique comme semble le dire un « fonctionnaire anonyme » du ministère des affaires étrangères.

    • La Fille de la Veuve dit :

      Isidore,
      Primo, personne ne remet en cause la liberte de Makaya de publier ce qu’il veut. Par contre, reconnaissez a tous les autres le droit de porter une appreciation, donc de commenter ce qui est ecrit dans le billet Makaya.
      Ensuite, vous condamner donc les suspensions reccurentes de TV+, Echos du nord, Edzombolo et tous les autres journaux qui osent critiquer Ali Bongo et les siens. Au nom de la Liberte de la Presse, condamnez-vous cela ?

      • Isidore dit :

        @ La fille de la veuve, au risque de vous décevoir je condamne toutes les entraves à la bonne marche de la presse chez nous. Je ne suis ni là pour défendre makaya ni pour interdire à ceux qui ne sont pas d’accord avec makaya de l’exprimer.
        J’ai juste donné mon point de vue. Néanmoins qlq soit l’organe de presse je préfère juste qu’il soit sure et certains de la véracité de ses allégations. Donc oui TV+ à autant le droit de critiquer le pouvoir que makaya des responsables français.

  9. Nickson dit :

    Tout le monde sait que les billets de « Makaya » émanent de LJN, qui au nom de sa soumission au régime des étrangers se permet de nier l’évidence. Son billet l’affirme de fait puisque le Gabon protège les droits des étrangers (y compris les Français) au détriment des nationaux. Les exemples sont légions et les faits parlent d’eux-même. Si nous autochtones de ce pays ne prenons pas nos responsabilités, bonjour l’invasion et l’assujettissement des Gabonaises et des Gabonais dans leur propre pays, triste réalité

  10. scha dit :

    j’ai lu ces billets Mackaya!!! et franchement, verser dans l’injure , c’est pas du tout professionnel!la vérité blesse et le fait que le ministre Canfin ait évoqué une réalité( non-respect des droits de l’homme au Gabon)dérange.quelle étroitesse d’esprit de la part de celui qui rédige ce billet Mackaya!c’est un vrai torchon!!!!sans compter qu’il fait aveux sans le savoir de choses qui pourraient lui être préjudiciables( référence à la pédophilie).

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