Le liquidateur de l’Agence nationale de gestion et d’exploitation des infrastructures sportives et culturelles (Anageisc), Jean Frédéric Ndong Ondo, esquisse dans cette interview accordée à Gabonreview, les contours de la liquidation des droits du personnel de cette structure mis au chômage.

Le liquidateur de l’Agence nationale de gestion et d’exploitation des infrastructures sportives et culturelles (Anageisc), Jean Frédéric Ndong Ondo, le 9 octobre 2019 à Libreville. © Gabonreview.

 

Gabonreview : Pourquoi cette liquidation ?

Jean Frédéric Ndong Ondo : Le Gouvernement avait d’abord créé l’Office de gestion du stade omnisports Omar Bongo. Par la suite, on a créé l’Agence nationale de gestion et d’exploitation des infrastructures sportives et culturelles (Anageisc). Elle a été créée pour prendre le passif et l’actif du stade omnisports président Bongo qui n’était pas déjà actif.

Ensuite, on a créé l’Anageisc. Elle a été créée pour doter le peuple gabonais d’un parc important de stades. A titre de comparaison, nous avons l’un des meilleurs parcs d’Afrique centrale. Pour gérer tous ces stades, il fallait une organisation. C’est pour cela qu’on a créé l’Agence qui a été placée sous la tutelle de la présidence de la République et qui devrait s’occuper naturellement de ce parc avec deux fonds. Un fonds public avec le budget de l’Etat et un autre fonds tiré de l’événementiel qui tournait autour de l’Anageisc. Pour faire court, au bout d’un certain nombre d’années, les courbes se croisaient. La courbe des charges montait alors que celle des recettes baissait. Résultat des courses, l’Anageisc ne pouvait plus fonctionner. L’Etat a donc décidé de la supprimer.

La meilleure conduite aurait été de créer un organe de gestion. On a recréé une autre organisation qui devait prendre le passif et l’actif de l’Anageisc. Sauf qu’on n’a pas pris en compte les difficultés de l’Anageisc : le personnel, les créanciers, la gestion même des structures. Ma mission est d’abord de faire une analyse, sans complaisance, pour voir ce qu’il en est, ce qui n’a pas marché pour qu’on ne répète pas les mêmes erreurs. Nous devons régler tout ce qui est passif. Je parle des salaires des gens, des créanciers. Avant qu’on arrive à transmettre à la nouvelle structure, l’Office, qui est créée, une structure raisonnable et saine pour ne pas refaire les mêmes erreurs.

Qu’est-ce qui n’a pas marché pour qu’on en arrive-là ?

Beaucoup de choses n’ont pas marché. C’est une chaine de responsabilités. Il y a d’abord l’Etat. Il a pris l’engagement de donner des crédits par le canal du Trésor public. Ces subventions n’arrivaient pas régulièrement et au fils des années, les situations se sont amoncelées au point où on est arrivé à 200 millions pour des charges qui avoisinaient 400 millions de francs CFA. Or, l’entretien des installations coûte cher.

N’y avait-il pas de contrôles ?

L’état de la pelouse du stade d’Angondjé. © Gabonreview

A mon avis, ce n’était pas aussi évident que cela. Parce que si le contrôle était fait au jour le jour, on se serait rendu compte que si on demande un milliard, je prends un chiffre, que cela corresponde effectivement à 500 millions pour louer l’avion, pour faire les stades etc. On aurait pris conscience des dépenses qui en découlaient. C’est la première responsabilité. Par ailleurs, au sein de l’Anageisc il y avait comme un conflit de compétence.

Certaines structures sous la responsabilité de l’Anageisc étaient gérées par des tiers. Si vous donnez la gestion d’un bien de l’Etat à quelqu’un, il y a une méthodologie. Malheureusement, dans le cadre de nos stades, cela n’a pas été respecté. Le stade aujourd’hui, dans les grands pays, n’est plus un instrument isolé. On devait avoir autour du stade des salles de fitness, de mariage, des boutiques, un environnement qui devrait faire vivre les stades.

Un an après la suppression de cette Agence, quelle est la situation des agents ?

Il faut commencer par le bon bout. Ce personnel bénéficie d’un licenciement économique. On est en octobre, cela fait un an qu’on a supprimé l’Anageisc. Si on avait licencié les gens en ce moment-là, on n’aurait pas plusieurs mois de salaire à payer. En tant que liquidateur, j’ai déjà écrit à l’inspecteur du travail. Il vient de désigner deux inspecteurs. Ils vont être avec moi. Nous allons recevoir le personnel. On va leur notifier leur licenciement économique, mais nous allons négocier individu par individu. Parce que derrière le licenciement, il y a des préavis, le côté social, il y a tout un environnement que nous allons tenir en compte. C’est la première chose. Et nous avons beaucoup avancé. J’ai osé quand même écrire au ministre de l’Economie en lui disant qu’on veut bien licencier ces gens, mais nous devons reconnaitre leurs droits.

Nous avons envoyé une liste au ministère de l’Economie et des Finances pour voir si on peut payer. Dans les négociations, ces gens ont acquis une certaine expérience dans la gestion des stades. Dans la négociation, nous allons dire à la nouvelle structure, l’Office nationale de développement des sports et de la Culture (ONDSC) de récupérer un certain nombre de gens qui ont une expérience. C’est-à-dire qu’au lieu de donner un préavis, il faut les placer en priorité dans le recrutement qui va arriver.

Combien sont-ils et combien cela va-t-il coûter à l’Etat ?

Ils ne sont que 200. Lorsque j’ai discuté avec les responsables de l’Anageisc, ils n’ont même pas dépassé les ratios convenus dans ce genre de situations. Le plus important dans tout cela est de dire qu’il y a des Gabonais qui sont au chômage aujourd’hui. Il faut donc régler cela. Ce qui est important pour nous, c’est de se projeter dans l’avenir. Je prends la pelouse du stade d’Angondjé, elle est à refaire. Vous n’avez pas besoin d’être un expert de la Fifa (Fédération internationale de football association) pour voir que nos pelouses, aujourd’hui, en dehors de celle de Nzeng-Ayong qui est synthétique, sont à refaire.

Je vais donc avoir besoin des experts parce que généralement dans une liquidation, on essaie de voir ce qu’on peut vendre. Mais, on ne vend pas les stades. Par contre, on essaie d’évaluer ce qu’il y a à faire. Et pour cela, je travaillerai avec des spécialistes. Mais l’Anageisc avait déjà fait ce travail, avait déjà dit que pour remettre les choses en place, on doit regarder telle chose. Il faut donc remettre ce contrat à jour. Sur ce plan, nous regardons tous pratiquement Libreville. Le Gabon ne s’arrête pas à Libreville. Nous avons de belles structures dans le Haut-Ogooué. Nous avons de belles structures dans le pays qu’il ne faut pas laisser à l’abandon. Si on crée autour des stades des parcs d’attraction, des restaurants, tout ce qu’il faut, si vous êtes à Oyem-ville et que vous voulez aller au stade d’Engong, s’il y a des bus, ce sont des sorties saines. Il peut même avoir des gens qui peuvent venir des trois frontières. Nous devons avoir un service de communication et markéting efficace qui fera en sorte qu’on fasse de l’événementiel à Franceville, Port-Gentil etc. Je crois que nous en sommes capables.

Combien de temps pour éponger définitivement ce dossier ?

Je crois que si l’Etat met les moyens, cela peut être plus court que vous ne l’imaginez. Mais dans la programmation, parce qu’il faut être responsable, j’ai listé toutes les actions à mener et j’ai fait une programmation de 12 mois. Dans la phase actuelle, c’est la prise en main du dossier. Nous avons fait une liste des actions, nous pensons tout logiquement qu’un an est suffisant, voire moins s’il y a des moyens.

 
GR
 

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