Après quelques dates manquées du fait d’un chamboulement survenu à la rédaction, Ika Rosira revient exceptionnellement un lundi, pour rappeler le parcours, l’importance et la responsabilité de la présidente de la Cour constitutionnelle quant à la permanence de l’«oligarchie» gabonaise. Le blues d’une petite gabonaise du siècle. 

© D.R.

© D.R.


 
Il me semble qu’on a parfaitement compris comment notre pays le Gabon est devenu une oligarchie. Ce vocable désigne la forme de gouvernement dont le pouvoir est réservé à un infime groupe d’humains qui constituent la classe dominante. Inutile d’utiliser des mots comme argyrocratie ou mandarinat pour parler de cette classe sociale privilégiée, inspirée, dirigée, obnubilée par l’argent et le pouvoir de l’argent. Employons des mots simples, des mots terre-à-terre.
Au-delà de la mascarade, des supercheries politiques, économiques et sociales ; au-delà du pillage de nos ressources minières, pétrolières, forestières et même de la désorientation sexuelle, spirituelle, économique de nos intelligences ; au-delà du grand foutage de gueule qu’on nous sert tous les jours à travers les médias et les réseaux sociaux, il est évident que tant que Mborantsouo et tous les Mborantsuo potentiels, seront les garants de notre ersatz de Constitution, le Gabon restera cette oligarchie qui nourrit les horreurs, qui nourrit les supplices, qui nourrit les drames et qui transforme l’histoire de notre pays en véritable tragédie.
Enfants, nous avons été nombreux à avoir l’impression que Marie Madeleine Mborantsouo, Paulette Missambo, Victoire Lasseni Duboze, Angélique Ngoma, Christiane Bitougat (kiééééé Bitougat eeeh !!!) et toutes les femmes qui s’illustraient dans ce milieu d’hommes, étaient des Mères pour notre Nation, des femmes dotées d’un mélange de sensibilité, de génie et de force de caractère pour opérer quelque chose d’admirable et de salutaire pour le Gabon, surtout qu’en tant que filles, on prend toujours pour modèle les femmes qu’on voit, souvent, à la télévision.
Même si, quand elle parlait des conditions de vie des professeurs, quand elle parlait le langage syndicaliste, quand elle s’opposait au régime et revendiquait avec une certaine hargne les droits de ses confrères et clamait une reforme complète du système éducatif, Bitougat motivait le respect, ne parlons pas d’elle. Taisons notre rage à son égard. Concentrons-nous sur Mborantsouo, ce nom qu’on étouffe, qu’on pustule, ce nom qui représente tout ce qu’on déteste, tout ce qu’on insupporte, tout ce qui nous parait indigeste aujourd’hui.
Sincèrement, l’ancienne Miss Franceville est une femme brillante, absolument brillante, quand on regarde son parcours. Au-delà de son statut de Reine de beauté, elle a obtenu son Bac A4 en 1975 ; une maîtrise en Droit en 1979 ; un diplôme en finances publiques et en fiscalité et en Droit Constitutionnel à Paris en 1981. En 1983, elle devient Présidente de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême après avoir été conseillère du ministre de la Planification, Auditrice de la Chambre des Comptes et enseignante à l’Université Omar Bongo et à l’Institut de l’Économie et des Finances (IEF).
En 1991, 10 ans seulement après être sortie de la Sorbonne, elle devint «Présidente de la Cour suprême». C’est elle qui a été chargée de rédiger la Constitution qui consent enfin au multipartisme. C’est en effet elle qui a rédigé l’Acte qui transige avec les revendications qui ont mis fin à 22 ans de dictature ouverte, limpide et indiscutable pour laisser place à une dictature silencieuse et sournoise. 10 ans plus tard, en 2001, elle se lance sur une thèse de Doctorat qu’elle obtient en 2005. Entre temps, elle assure la présidence d’une association de Cours constitutionnelles francophones, occupe des fonctions à l’Unesco, auprès de la Banque Mondiale et auprès des Nation Unies. Elle écrit deux livres qui parlent de Constitution, obtient la Grande Croix de l’Étoile Équatoriale du Gabon, le grade de Grand officier du Mérite Gabonais, de Commandeur de la légion d’Honneur de la France et celui de Chevalier de l’Ordre National du mérite centrafricain. Pour couronner le tout, elle est mère de 3 enfants, dont 2 avec Bongo-père.
Sans employer des termes comme promotion canapé, n’insistons pas sur le fait que son élogieux parcours et son ascension prodigieuse ne sont certainement dus qu’à son intimité avec notre ancien président (celui qui détient, après Fidel Castro, le record Guinness de longévité au pouvoir – 42 ans – et qui a fait d’elle la garante de notre Constitution depuis 24 ans aujourd’hui !!!).
Marie Madeleine Mborantsouo a prouvé que la beauté seule ne suffit pas, qu’il ne faut pas se contenter d’être belle. Elle est même une inspiration pour toutes les reines de beauté du Gabon, de l’Afrique et du monde. L’horreur est dans le fait qu’elle est en «flagrant conflit d’intérêt» sur lequel même notre l’opposition gabonaise a fermé les yeux. C’est un peu comme si le fait d’éradiquer une Constitution qui s’est évertuée à proclamer vainqueur l’homme qui dormait dans le lit de la Présidente de la Cour Constitutionnelle, n’était pas un assez bon motif d’insurrection populaire. C’est comme s’ils voyaient dans cette Constitution un intérêt quelconque. C’est comme s’il n’était pas dans leur intérêt que le Gabon limite la durée des mandats présidentiels et indique qu’un candidat ne puisse se représenter plus de 2 fois aux élections présidentielles comme au Bénin, au Sénégal et aux États-Unis pour ne citer que ces pays là. On préfère brandir l’article 10 de cette pseudo Constitution comme si tout le reste en valait vraiment la peine, comme si notre Constitution reflétait une réelle et indiscutable Démocratie.
Certains prétendent que de toutes les façons, Ali n’aura qu’à remplacer Mborantsuo par un(e) autre Mborantsuo. En effet, ce n’est pas ce qui manque au Gabon, des gens capables d’utiliser le Droit pour maintenir des dictateurs au pouvoir indéfiniment, des gens capables d’utiliser la Loi pour distiller un semblant de Justice et d’Équité ; des gens capables d’user du Droit constitutionnel pour confisquer le pouvoir au peuple. C’est pour cette raison que tant que Mborantsouo et tous les Mborantsouo potentiels, seront les garants de notre pseudo Constitution, le Gabon restera cette oligarchie qui nous répugne tant.
En toute sincérité, on rêve tous d’une Constitution qui mettra fin à notre tragédie et protégera notre peuple de toutes les dictatures potentielles, éventuelles et envisageables et le seul moyen démocratique de l’obtenir c’est d’exiger une Conférence nationale souveraine qui entérinera une loi qui limitera les mandats présidentiels autant sur la durée que sur la possibilité de se représenter plus de deux fois pour tous les candidats. Ce qui signifie qu’en tant que candidat, si le peuple ne t’a pas élu à deux reprises, trouve-toi un autre rêve ! En tant que président, si le peuple te réélit une nouvelle fois, tâche de faire mieux que durant ton premier mandat et laisse la place au suivant ! Ce qui signifie surtout que tout homme politique quelque soit son parti aura le droit d’envisager la présidence. Ce qui signifie que si Ali avait réellement l’intention d’agir différemment, d’apporter un renouveau politique, Mborantsouo ne serait plus là et ces lois sur la durée des mandats et la représentation des candidats auraient déjà été sa priorité pour inspirer une réelle Démocratie. Mais peut-on espérer du Parti dit Démocratique, une loi qui créerait l’alternance démocratique et garantirait la chance à tous, surtout à ceux qui ne s’appellent pas Bongo Ondimba, de briguer la présidence du Gabon ?
Nous sommes à Bongoland, et à Bongoland non seulement tu peux te présenter indéfiniment aux élections présidentielles en tant que Bongo et accaparer le pouvoir, mais ici, les élections sont d’une mascarade, d’une supercherie si exaspérante que celui qui nous sert de président aurait dû être destitué pour usage de faux documents, si Mborantsouo et tous les Mborantsouo potentiels et existants ne servaient pas l’Intérêt supérieur de la famille Bongo Ondimba et de leurs machines humaines.
#bringbackmycountry
 

 
GR
 

0 Commentaires

  1. La Dimension dit :

    Vraiment bonne description du bongoland. vraiment nos mamans la hein!! c’est pas la peine

  2. Moukagni-Iwangou dit :

    Chère IKA, Bravo.
    Le jeudi 22 octobre 2014 Place de la Nation, j’ai prononcé ces mots, je cite: « C’est sur le sol de Paris, cimetière symbolique du joug des monarques sur les Peuples, que j’appelle à la libération du Peuple gabonais du joug d’une famille. »
    C’est la « Déclaration de Paris ». Regard froid, jeté sans complaisance sur les avatars du système gabonais, cette Déclaration fustige dans les mêmes termes que toi, le conflit d’intérêt permanent dans lequel se trouve madame Mborantsouo.
    Mais cette Déclaration va naturellement au-delà. L’appel à un dialogue inclusif et la nécessité d’aboutir, dans le respect de nos différences à un consensus fort, dont les résolutions doivent faire autorité (donc une conférence nationale souveraine), y est abordé.
    C’était simplement pour te rassurer. En plus de Youtube qui l’a produite, je vais m’atteler à la rendre disponible au plus grand nombre.

  3. Moukagni-Iwangou dit :

    Je ne voudrais pas manquer d’élégance. Gabon Review a évoqué la question, sous le tire: « Jean de Dieu Moukagni-Iwangou : «Nous appelons à la tenue d’un dialogue inclusif»
    Merci

  4. le puant dit :

    Belle analyse de la situation politique de notre pays.
    C’est vrai , la vie politique de notre pays est tributaire du sexe , crimes rituels , trafic d’influance,comme Vous l’aviez si bien relevé .BONGO père qui se retrouve dans le lit de Mborantsouo pour féconder 2 deux enfants et pour la boucle se faire rédiger une constitution sexuelement taillée sur mesure ,et l’inamovilité de madame au poste de garant de la constirution pour loyaux services .
    C’est vraiment dommage pour notre pays qui regorge au tant d’intellectuels .

  5. manami dit :

    Sans commentaires,bien dit.

  6. Mickaela kors dit :

    Gabon dabors bravo

  7. petit dit :

    la Cour Constitutionnelle du Gabon est comme la Tour de Pise, elle penche toujours du meme coté.

  8. raphael bandega lendoye dit :

    Vous faites une peinture très flatteuse du parcours de madame Mborantsuo. Si la jeune et jolie Francevilloise a fait se pâmer ses contemporains en raison de sa plastique avantageuse, l’étudiante bosseuse n’ a pas généré une juriste remarquable. Elle a tiré profit de tout ça et de l’air du temps, presque victime de provenir du Haut-Ogooue, d’être femme et belle. Elle ne rédigea pas la Constitution; elle était l’une des membres de l’équipe qui y était préposée. Elle n’était même pas la mieux placée pour assurer la direction de la Cour constitutionnelle mais le doigt qui devait y pouvoir était celui de son amant. Les journaux de l’époque attestent que l’Opposition vida la salle une fois le choix connu.Cela ne changea rien car cela était fait du prince ou acte de souveraineté. Installée depuis lors elle s’est imposée comme la plus sourcilleuse des gardiennes du temple dont l’un des rôle est de faire accepter à l’Opposition la décision déjà prise par le pouvoir. Elle prit tant de place se rendit si indispensable qu’elle fait dire à la constitution ce qu’elle veut, tenant aujourd’hui pour constitutionnel ce que demain elle jugera contraire, s’arrogera le droit de sanctionner, d’élaborer des textes, de conseiller le gouvernement, etc… Elle a dégoûté les plaideurs d’une institution qui a presque toujours penché en faveur d’un camp. Ses décisions de validation des élections présidentielles sont des modèles du genre. Pierre Mamboundou, que Dieu garde son âme en est tout retourné. La validation d’un acte de naissance grossièrement faux permet désormais de se poser franchement la question de l’utilité d’une telle institution dans notre pays.

    • Antsie dit :

      Merci de nous en avoir dit davantage sur cette dame. Je trouvais un peu flatteur le parcours détaillé de cette dame quoique peut etre IRONIQUE .
      Le canapé a beaucoup à y voir plus que les qualités de juriste.
      Disons le franchement cette dame n’a jamais su dire le droit; ne le chérit pas; n’en comprend pas la finalité dans un Etat ou dans une société . Sinon,elle aurait demandé à quitter cette fonction par amour du DROIT et et par amour de ce que cette matière apporte à l’édification d’une société moderne et équilibrée.

  9. rodrigue dit :

    Voilà une dame qui ne fait pas honneur aux femmes, dommage ! elle avait pourtant l’occasion d’inscrire son nom en lettre d’or dans l’histoire du Gabon…, mais, hélas elle a cruellement manqué de courage et patriotisme. Tout le monde n’est pas Chambrier fils

  10. Powè powè dit :

    J’ai toujours su que le mal du Gabon c’est Marie-Madeleine Mbourantsouo parce que c’est elle qui confirme les résultats truqués des élections depuis qu’elle est à la Cour Constitutionnelle.
    C’est elle qui nous a imposé un faussaire à la tête du Gabon. Si le Gabon va mal aujourd’hui, ce n’est pas à cause d’Ali et sa légion étrangère mais la faute est à Mbourantsouo et ses complices Aboghe Ella, Nzouba Ndama, Rose Rogombe, Boukoubi et consort. Arrêtez de diaboliser seulement Ali Bongo et sa légion étrangère ; Ils sont tous comptables de ce qui arrive aujourd’hui au Gabon. L’Histoire va les rattraper, ils vont tous passer à la CPI comme GBAGBO et les siens.

Poster un commentaire