Dans la commune d’Owendo, les habitants de la cité Setrag (ex-Eurotra) vivent depuis quatre ans sans accès à l’eau courante. Une situation ubuesque, d’autant plus absurde qu’ils n’ont qu’à traverser la route pour voir couler l’eau… chez leurs voisins du lycée technique. Cette route, en apparence anodine, est devenue une frontière invisible entre deux mondes : celui de l’accès à l’eau, et celui de la débrouille quotidienne.

Dans la commune d’Owendo, les habitants de la cité Setrag (ex-Eurotra) vivent depuis quatre ans sans accès à l’eau courante. © GabonReview

 

D’après les témoignages recueillis par Gabon Review ce mercredi 6 aout 2025, depuis 2021, les robinets de la cité Setrag sont restés désespérément secs. Aucune goutte d’eau n’a coulé, forçant les habitants à adopter des stratégies de survie dignes d’un système dit permanent. Le paradoxe ? Juste en face, à quelques mètres, les résidents du lycée technique disposent d’un accès normal au réseau d’eau potable.

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« On vit une injustice flagrante. Nous sommes dans la même commune, dans le même quartier, mais juste parce qu’on est de l’autre côté de la route, on est oubliés. C’est incompréhensible », témoigne Julienne E. habitante de la cité depuis plus de dix ans.

Ce manque est d’autant plus une corvée quand il semble que chaque jour c’est la même routine : bidons, seaux et brouettes en main, les habitants, enfants comme adultes, traversent la route pour aller puiser de l’eau au lycée. Une situation qui crée frustration, tensions et fatigue. « On prend l’eau au lycée technique mais les épaules sont fatiguées, les enfants aussi. On prépare à manger comment aux enfants ? », s’interroge une habitante de la cité.

Avec l’obligation pour tous les habitants de se réfugier au lycée technique Omar Bongo pour s’approvisionner en eau, l’attente pour remplir les récipients devient de plus en plus pénible. La prudence est également de mise, comme le soulignent plusieurs riverains.  « On se lève à 5 heures du matin pour faire la queue. Parfois, on se dispute avec les gardiens du lycée ou avec d’autres personnes venues chercher de l’eau. Ce n’est pas une vie », se plaint Thierry, un jeune père de famille. Faute de mieux, certains sont contraints d’envoyer leurs enfants, ce qui les inquiète fortement, car ceux-ci doivent traverser la route à chaque fois, ce qui n’est pas sans danger.

Silence des autorités

Les appels à l’aide se sont multipliés au fil des années, mais les réponses restent rares. Les résidents affirment qu’à un moment il y avait des coupures d’eau au lycée mais l’eau est revenue. Les agents de la Seeg ne cessent d’apporter des factures alors que les compteurs donc ne sont pas actifs. La réalité que vit cette population leur procure un sentiment d’abandon. «Il faut que les gens sachent que ce n’est pas la joie ici. On nous apporte des factures de trente mille francs alors qu’on a pas d’eau, est-ce normal ? Est-ce qu’on n’est pas des citoyens comme les autres ? », demande amèrement Maman Germaine, une retraitée de la cité.

La situation de la cité Setrag illustre de manière criante une fracture urbaine. Cette route, censée faciliter la mobilité, est devenue le symbole d’une inégalité profonde, celle de l’accès à un droit fondamental qui n’est autre que l’eau, source de vie.

Alors que le gouvernement gabonais multiplie les annonces en faveur de l’amélioration des services de base, les habitants de la cité Setrag, eux, attendent toujours que leur calvaire prenne fin. En attendant, chaque jour, ils traversent cette route, bidon à la main, en quête de ce bien aussi essentiel qu’insaisissable.

Auteure : Thécia Nyomba

 
GR
 

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