Déguerpissement : En attendant la démolition des «Retrouvailles de Nzeng-Ayong»

A Libreville, les déguerpissements et les casses redessinent de plus en plus le visage urbain. Avec pour finalité l’amélioration des conditions de vie des populations, de réduire les inondations récurrentes, ils devraient permettre d’achever le canal de Nzeng-Ayong, du côté de l’échangeur éponyme, D’ici à là, Les Retrouvailles de Nzeng-Ayong, l’un des coins de détente les plus fréquentés et prisés du 6e arrondissement, devraient être détruites. Les locataires ont déménagé, laissant derrière des bâtisses «désossées».

Vues des boutiques déménagées, dont les toits, portes, fenêtres ont été enlevés en attendant la démolition de Les Retrouvailles de Nzeng-Ayong. © GabonReview
Au Gabon, le gouvernement a lancé début-juin une vaste opération de déguerpissement des zones prévues pour la construction des projets urbains à l’exemple des cités administratives, des bassins-versant, ainsi que des voies de communication. Cette opération vise également à lutter contre le mal logement, les inondations et à libérer les zones déclarées d’utilité publique.
Plus qu’une zone «zombifiée»
Alors que Plaine-Orety, les Charbonnages, la SNI-Owendo, ont, entre autres, été entièrement démolis, à Nzeng-Ayong, près de l’échangeur, l’hôtel de ville a marqué les constructions devant être détruites. «Les Retrouvailles de Nzeng-Ayong» dont les commerces ont été dégarnis de leurs toits, portes, fenêtres, etc. ne sont désormais plus qu’une zone «zombifiée» en attente de démolition.
Jadis coloré, bruyant, bondé de monde, pleines de vie, «Les Retrouvailles de Nzeng-Ayong» qui, en son temps, attiraient les Librevillois pour des moments de détente, ont été désignées comme vouée à la destruction. Alors qu’elles attiraient par les fumets de poisson, poulet et porc braisé, par des effluves de tous types de boissons émanent des bistrots, mais également par ses marchands à la sauvette, cet espace est passé de «lieu de joie, de loisir, de détente, de plaisir, de petit commerce» à celui de «tristesse et de désespoir», selon un habitué du coin.
Au plus fort des déguerpissements dans les quartiers de Libreville, la municipalité est entrée en jeu. Elle a marqué sur les maisons, servant toutes au commerce, «à démolir sans délai». S’il est question de «corriger les errements du passé en matière d’urbanisation», les personnes impactées, qui n’ont que peu d’informations sur le projet, indiquent que «les démolitions seront suivies de la construction du canal».
«On ne veut pas subir le même sort»

Quelques clichés de Les Retrouvailles de Nzeng-Ayong, le 7 juillet 2025. © GabonReview
En effet, le chenal de Nzeng-Ayong, dans le 6e arrondissement de Libreville, est débordé à chaque averse de forte intensité. Du côté de l’échangeur menant vers Nkembo, l’édifice n’a pas été achevé. Ce qui implique des dépôts d’immondices, des inondations à chaque grande pluie, entrainant la fragilisation de l’infrastructure. Les démolitions devraient donc permettre, selon les riverains, de construire un drain des eaux pluviales, de ruissèlement et de la rivière souterraine traversant le pont.
Alors que la municipalité a accéléré l’opération de destruction des constructions anarchiques dans certains quartiers, les occupants de «Les retrouvailles de Nzeng-Ayong» n’ont pas attendu pour quitter les lieux. Certains ont choisi d’enlever fenêtres, portes, tôles, tout le mobilier, de même que leurs marchandises afin d’éviter les surprises désagréables. «On a vu ce qui est arrivé aux habitants de Plaine-Orety et de Derrière l’Assemblée nationale. On ne veut pas subir le même sort», a indiqué un ancien occupant de la zone.
«Il faut respecter les citoyens dans la méthode … Il faut de vraies mesures d’accompagnement»
Qu’à cela ne tienne, cette opération s’inscrit dans une démarche de réorganisation urbaine, de respect du domaine public et d’amélioration du cadre de vie. Mais, les populations ne comprennent pas la méthodologie du gouvernement. «C’est trop facile de casser les maisons sous prétexte de la réorganisation urbaine», a dénoncé un riverain. Pour ce dernier, «il fallait donner un délai aux gens pour partir».
Les dégâts collatéraux de ces nombreuses casses dans Libreville sont la hausse des coûts des loyers. La spéculation est désormais de mise sur les loyers dans la ville. «Actuellement, on vit à Libreville avec le stress. On vous casse sans vous prévenir. Pour une petite chambre de rien du tout, on vous demande déjà les yeux de la tête», a fait remarquer un commerçant dont la boutique va être détruite. «Il faut respecter les citoyens dans la méthode. Transformer une ville, oui. Mais pas en humiliant les gens. Il fallait de vraies mesures d’accompagnement», a déclaré un habitant du 6e.

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