Face au remous médiatique suscitée par la désignation d’eTech SAS comme agrégateur exclusif des flux financiers liés aux jeux en ligne, le ministre de l’Intérieur, Hermann Immongault, n’a pas manqué de défendre une réforme qu’il qualifie de «stratégique», «souveraine» et alignée avec la vision du président Oligui Nguema. Retour sur les faits et clarification d’une décision qui divise. Ce qui est passé inaperçu dans un précédent article de GabonReview sur le sujet.

Pour Hermann Immongault, le choix d’eTech SAS n’est pas un passe-droit, mais une stratégie de régulation souveraine au service de l’intérêt national. © GabonReview

 

Depuis la publication de l’arrêté ministériel du 23 avril 2025, les critiques se sont multipliées sur la place publique, mêlant interrogations légitimes, soupçons d’irrégularité et lectures alarmistes. Accusé d’opacité et de favoritisme, le gouvernement a finalement rompu le silence pour expliciter et justifier une décision qu’il inscrit dans une dynamique de réforme profonde.

Un arrêté vivement contesté

Le 23 avril 2025, un arrêté ministériel signé par Hermann Immongault désignait la société eTech SAS comme agrégateur exclusif des flux financiers du secteur des jeux et paris en ligne au Gabon. La nouvelle, relayée par qualques médias et largement commentée sur les réseaux sociaux, a suscité un tollé. On dénonçait une décision opaque, sans appel d’offres, menaçant les entreprises locales et leurs emplois, au profit d’une société nouvellement créée et à capitaux majoritairement étrangers.

Certains observateurs s’interrogeaient sur la chronologie troublante du dossier : une lettre anticipée envoyée par eTech SAS avant même la signature officielle de l’arrêté, un site internet lancé après les faits, et la présence controversée de figures étrangères dans l’organigramme de l’entreprise, dont le Camerounais Gaetan Donlap. Des accusations de favoritisme, de collusion, voire de violation de la liberté d’entreprendre ont été brandies, plaçant le gouvernement sous le feu nourri des critiques.

La mise au point du ministre de l’Intérieur

Aussi, le mercredi 21 mai 2025, lors des travaux de la Commission supérieure des jeux de hasard qu’il présidait, Hermann Immongault a tenu à rétablir les faits. Selon lui, la désignation d’eTech SAS procède d’un partenariat public-privé souverainement assumé entre l’État gabonais et la société canadienne ST Media INC. L’objectif : assainir un secteur miné par le désordre, l’opacité et les fraudes, tout en en faisant un levier de développement économique.

«Il fallait mettre fin aux pratiques déviantes qui vont à l’encontre de l’intérêt supérieur de la nation», a-t-il déclaré, soulignant que la décision a été recommandée à l’unanimité par les membres statutaires de la Commission supérieure des jeux. eTech SAS, bien qu’opérateur unique dans cette première phase, n’est selon lui qu’un instrument transitoire de régulation appelé à être transféré intégralement à l’État gabonais à la fin du contrat.

Immongault s’est voulu rassurant sur les retombées sociales : «Il n’y a aucun péril en la demeure. Mieux encore, cette régulation devrait générer plus de 10 000 emplois à terme.» Il souligne également que 95 % des postes seront occupés par des Gabonais, et que l’entreprise assumera seule le financement de la plateforme technique. Quant aux opérateurs historiques, ils ne sont nullement exclus, mais appelés à se conformer à un cadre réglementaire jusque-là ignoré par beaucoup.

Un test pour la gouvernance de la Transition

Le ministre insiste sur les garanties offertes par le système : traçabilité intégrale des flux, lutte contre le blanchiment, protection sociale, transparence fiscale, et centralisation des données sensibles à disposition des autorités. «C’est une question de souveraineté numérique et de responsabilité publique», tranche-t-il.

Si certaines inquiétudes demeurent — notamment sur la gouvernance interne d’eTech SAS et les liens présumés de certains de ses membres avec des figures contestées du passé —, les explications livrées par Hermann Immongault tranchent avec les accusations initiales. En misant sur un outil de régulation unifié, l’État gabonais affirme vouloir reprendre le contrôle d’un secteur stratégique et instable, en y injectant ordre, redevabilité et vision de long terme.

L’enjeu dépasse ici le seul marché des jeux : c’est toute la crédibilité du discours de rupture et de transparence porté par Brice Clotaire Oligui Nguema depuis le 30 août 2023 qui est en jeu. Le pari est risqué, mais assumé.

 
GR
 

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