Le RdB de plateforme citoyenne à parti politique : quel avenir pour ses alliés de la présidentielle ?

Avec la page électorale désormais tournée, le Rassemblement des bâtisseurs (RdB) entend mieux se construire politiquement. Esquissant les contours de l’après-élection ce lundi 14 avril, la coordination de la plateforme, à travers la voix de son coordonnateur général a annoncé une étape décisive : la transformation du RdB en parti politique structuré. Quel avenir donc pour les 84 partis politiques qui avaient accepté de taire leurs emblèmes ?

Anges Kévin Nzigou s’exprimant, le 14 avril 2025. © D.R.
«Le 12 avril restera à n’en point douter, une date fondatrice dans l’histoire politique du Gabon», a déclaré ce lundi 14 avril, Anges Kevin Nzigou le coordonnateur général du Rassemblement des bâtisseurs (RdB) soulignant que ce jour-là, le peuple exprimant un choix clair, a décidé de confier les rênes du pays à Brice Clotaire Oligui Nguema. Au-delà du résultat des urnes, le RdB revendique un rôle central dans cette dynamique. Plateforme de rassemblement, il a fédéré plus de 4 200 associations, 84 partis politiques ainsi que 22 000 adhérents individuels autour d’un projet commun. Si Brice Clotaire Oligui Nguema et ses porte-paroles affirmaient qu’elle allait être dissoute après la présidentielle, aujourd’hui elle aspire plutôt à devenir une force politique à part entière.
«On ne défait pas ce que l’histoire a béni. On ne disperse pas ce qui a su rassembler dans l’élan. On structure, in fait vivre, on transforme. C’est pourquoi nous avons décidé de convoquer une Assemblée générale du Rassemblement des bâtisseurs le samedi 19 avril 2025», a déclaré Anges Kevin Nzigou. «Cette Assemblée aura pour vocation de faire du RdB non plus une simple plateforme de soutien, mais un véritable parti politique structuré, démocratique, fidèle à l’idéal du Rassemblement et désormais prêt à devenir la matrice politique de la future majorité du président élu», a-t-il précisé. «Allons-nous laisser ce dissoudre cette plateforme populaire ? (…) La réponse est non», a-t-il soutenu.
Fusion ou partenariat ? Un choix stratégique à venir
Si le RdB explique cette nouvelle tournure par la nécessité de «donner une majorité cohérente» à Brice Clotaire Oligui Nguema, une question cruciale se pose : qu’adviendra-t-il des 84 partis politiques qui ont accepté de s’effacer temporairement au profit d’un front commun ? Mieux, Alexandre Barro Chambrier acceptera-t-il de brader le Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM) ? Raymond Ndong Sima acceptera de renoncer à son Alliance patriotique (AP) ? Le Parti démocratique gabonais (PDG) signera-t-il son arrêt de mort ? Quid de l’Union nationale (UN) et des autres partis politiques qui ont su s’imposer sur la scène politique mais qui ont cru renoncer à eux le temps d’une campagne ? Quel avenir pour les acteurs politiques qui incarnent ces différentes formations politiques ?
Anges Kévin Nzigou l’a reconnu lui-même : le RdB a été une structure souple, un espace d’union, de dialogue et de convergence. «Aujourd’hui, notre première mission est accomplie. Les différentes entités qui nous ont rejoints retrouvent leur autonomie. Mais devons-nous tout défaire ? Non. Le succès du RdB tient à sa capacité à rassembler, à transcender les clivages», a-t-il déclaré. Ce tournant soulève des enjeux politiques profonds du fait de ces formations certaines bien ancrées dans le paysage gabonais qui ont mis entre parenthèses leurs propres ambitions pour œuvrer à la victoire d’un projet commun. Seront-elles prêtes à se fondre dans une structure unique ? Accepteront-elles de renoncer à leur identité pour intégrer une nouvelle maison politique ? Préféreront-elles conserver leur autonomie tout en restant partenaires du nouveau parti en gestation ?

2 Commentaires
Grosse déception. Une erreur politique. À vaincre sans Gloire. Les gabonais ont adhéré à ce rassemblement, pas pour qu’elle se mue en partie politique, sachant que les gabonais au dialogue ont exprimé un sentiment négatif sur les parties politique. Le RdB devrait rester le RdB et Oligui pouvait créer son parti. Le RdB en rassemblant les personnes morales, des associations y compris de la société civile, des syndicats ne devrait pas se muer en instrument plus partisan.
C’est vraiment regrettable de voir Kevin Nzigou associé à cette initiative bancale en faveur d’Oligui. Le RdB aurait dû rester une plateforme ouverte à tous ceux qui souhaitent accompagner l’action politique du président de transition, et non se transformer en un parti politique.
Je ne sais pas si c’est parce qu’Oligui lit Machiavel, est mal conseillé, ou refuse simplement d’écouter les avis extérieurs… mais il est difficile de ne pas penser que les militants de l’UN, du RPM (pour ne citer qu’eux — on se fiche du PDG qui, franchement, devrait disparaître), sont en train de réaliser qu’ils ont soutenu, sans le savoir, un concurrent qui s’apprête à les effacer, sans même leur avoir dit clairement.
Qu’Oligui ne se méprenne pas : les 96 % de suffrages obtenus ne lui reviennent pas à lui seul. Ce résultat est aussi le fruit du travail d’Alternance 2023, des acteurs de la société civile et d’autres forces. S’il croit pouvoir maintenant phagocyter ces soutiens de force, comme si on lui avait signé un chèque en blanc, il risque fort de tomber de haut.
Il ne s’agit pas de voir disparaître des partis importants comme l’UN ou le RPM. S’il estime ne pas avoir besoin d’eux pour les législatives, alors qu’il les laisse aller aux urnes face à ses propres candidats. Mais ce que nous refusons, c’est l’instauration d’un grand parti unique dans un Gabon où l’opposition est déjà largement affaiblie.
Même au sein d’une coalition, l’indépendance des partis qui soutiennent Oligui est cruciale pour notre démocratie.