Les Gabonitudes de Lybek à l’Université : quand la BD devient miroir de société

Le département de Littérature africaine de l’Université Omar Bongo a organisé, le 5 juin 2025, sa traditionnelle Journée de Littaf. L’édition de cette année a mis à l’honneur la bande dessinée francophone à travers l’œuvre engagée de l’auteur gabonais Lybek. Entre réflexions identitaires, citoyenneté et critique sociale, étudiants et intervenants ont exploré les passerelles entre littérature et neuvième art.

Lybek (en chemise africaine) découvrant ses œuvres reprises par les étudiants, le 5 juin 2025. © GabonReview
Le 5 juin 2025, le département de Littérature africaine de l’Université Omar Bongo a tenu sa traditionnelle Journée de Littaf, cette année consacrée au thème : «Littérature et bande dessinée d’Afrique francophone : entre réflexivité et représentation du social à travers l’œuvre de Lybek».

L’auteur des Gabonitudes face aux étudiants et aux enseignants et la visite des stades. © GabonReview
Cette initiative s’inscrit dans une dynamique d’ouverture entre la littérature et les autres formes d’art. «C’est une tradition du département qui consiste à associer l’art de manière générale à la littérature. On essaie d’établir ce qu’on appelle l’intermédialité entre la littérature et les autres formes d’art. Donc, nous avions commencé avec le cinéma, nous avons eu la musique et la chanson particulièrement, et là, nous avons la bande dessinée, que nous allons essayer de mettre en l’honneur ici, aujourd’hui, avec l’artiste Lybek», a expliqué le Dr Mounziegou-Mombo, chef du département.
L’évènement a mis en évidence la manière dont la littérature africaine contribue à la réflexion sur l’identité et la citoyenneté. «Aujourd’hui, on parle de la citoyenneté, par exemple, qui sont des éléments vers lesquels on doit ramener la jeunesse. La littérature aussi a eu cette capacité, par le fait du livre, par le fait de la lettre, de redonner à la jeunesse, justement, ces lettres de noblesse. Du point de vue de la citoyenneté, du point de vue du respect des valeurs. Le retour aux valeurs s’inscrit aussi dans l’apprentissage de la littérature», a poursuivi le Dr Mounziegou-Mombo.
La rencontre a été marquée par une analyse approfondie de l’œuvre de Lybek, notamment sa série Gabonitudes. Les étudiants ont présenté leurs lectures critiques, suscitant la reconnaissance de l’artiste. «Ça m’a fait beaucoup de plaisir. Ils ont fait leurs recherches, ils ont apporté leurs analyses. Il y a eu du vrai, il y a eu du bon, mais ça fait plaisir de voir que mon œuvre est décortiquée comme ça par les jeunes scientifiques. Je les ai entendus citer les auteurs occidentaux qui ont réalisé des travaux autour de la bande dessinée», a confié le célèbre dessinateur, auteur de fresques sociales dans le quotidien L’Union. Il espère que ces jeunes chercheurs deviendront demain des références : «qu’ils soient aussi cités, que leurs références soient citées pour les ateliers à venir».
Lybek puise son inspiration dans la réalité quotidienne du Gabon. «Moi je dessine la femme gabonaise parce qu’elle est au centre de la vie d’une famille. C’est la femme qui éduque les enfants, c’est la femme qui fait marcher la maison, c’est elle qui s’occupe de tout. Et donc quand je dessine la femme, c’est pour qu’elle se remette aussi elle-même parfois en question», explique-t-il, avant d’ajouter : «et puis je ne dessine pas des femmes que j’invente. C’est vrai que j’exagère sur les traits, sur les formes, mais c’est du vécu, c’est du vu. Sortez, vous regardez, allez à Mbolo, marchez partout, vous verrez des femmes vêtues comme je les dessine».
À travers ses planches, l’artiste aborde des thèmes variés tels que l’éducation, la santé ou encore les violences sociales. «J’ai l’impression que le Gabon se renouvelle toujours dans ce désordre. A chaque fois, j’ai des planches qui datent de 2010, et lorsque je les regarde, j’ai l’impression que rien n’a évolué, parce que ce sont des planches que je peux rediffuser, mais qui collent toujours à l’actualité», note-t-il avec lucidité. Lybek travaille actuellement à la réalisation du quatrième tome des Gabonitudes et est à la recherche de financements pour concrétiser ce nouveau projet.

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