L’intelligence artificielle n’est plus seulement un outil de modernisation technologique : elle devient une passerelle vers une Afrique plus inclusive. Face à une fracture numérique qui marginalise encore des millions de citoyens, cette révolution silencieuse pourrait transformer l’accès à l’éducation, à la santé, aux services financiers et à la connectivité. Mais pour que cette promesse tienne, encore faut-il que l’IA soit pensée et déployée au service de tous, en tenant compte des réalités du continent. C’est ce que démontre l’analyse fouillée d’Armel Onas Ongbwa Ollomo, Conseiller technique du Directeur général de l’ANINF, qui plaide pour une intelligence artificielle éthique, inclusive et résolument africaine.

L’intelligence artificielle représente une opportunité majeure pour réduire la fracture numérique en Afrique (…) à condition d’être conçue et déployée de manière responsable et inclusive. © GabonReview

 

Conseiller technique du Directeur général de l’Agence nationale des infrastructures numériques et des fréquences (ANINF), Armel Onas Ongbwa Ollomo possède une expérience d’ingénieur et de gestionnaire de projet au haut niveau dans l’administration gabonaise. © D.R.

1. Introduction

L’intelligence artificielle (IA) s’affirme comme une technologie de rupture, capable de transformer en profondeur les sociétés. En Afrique, où la fracture numérique constitue un frein majeur au développement, l’IA peut jouer un rôle stratégique pour favoriser l’inclusion numérique en réduisant les inégalités d’accès aux technologies. L’intégration de l’IA dans les politiques de développement est donc une priorité pour bâtir une société plus équitable et résiliente.

  1. Contexte de la fracture numérique en Afrique

Malgré des progrès notables, l’Afrique reste confrontée à de fortes disparités en matière d’accès à Internet, aux équipements numériques et aux compétences technologiques. Les zones rurales, les femmes, les personnes handicapées et les populations défavorisées sont souvent exclues de la révolution numérique, ce qui entraîne des conséquences sociales (exclusion, marginalisation), économiques (frein à l’innovation et à l’emploi) et éducatives (accès limité au savoir). L’inclusion numérique est donc un impératif pour garantir l’égalité des chances.

  1. L’intelligence artificielle : définition, enjeux et potentiel inclusif

L’IA désigne l’ensemble des technologies capables de simuler des fonctions cognitives humaines telles que l’apprentissage, le raisonnement ou la perception. Elle repose sur des algorithmes, des données et des systèmes d’apprentissage automatique. Les enjeux de l’IA sont multiples : éthiques (respect de la vie privée, transparence), techniques (qualité des données, infrastructure) et sociaux (impact sur l’emploi, inclusion). En Afrique, l’IA peut être un outil puissant pour réduire les inégalités, à condition d’être conçue et déployée de manière responsable et inclusive.

  1. Applications concrètes de l’IA pour l’inclusion numérique

L’IA offre des solutions innovantes pour améliorer l’accès aux technologies et aux services essentiels à travers le continent :

Éducation : L’IA permet de créer des plateformes éducatives adaptatives, qui tiennent compte du niveau, du rythme et de la langue de chaque apprenant. Elle facilite la traduction automatique en langues locales, rendant les contenus accessibles à tous et peut également pallier le manque d’enseignants dans les zones reculées grâce à des assistants virtuels.

Accessibilité : Grâce à la reconnaissance et à la synthèse vocale, ainsi qu’à la vision par ordinateur, l’IA améliore l’accès aux outils numériques pour les personnes malvoyantes, malentendantes ou à mobilité réduite. Elle permet une meilleure intégration dans les systèmes éducatifs et professionnels.

Connectivité : L’IA peut optimiser l’installation des infrastructures de télécommunication en analysant les besoins locaux et permet la gestion intelligente de réseaux communautaires à faible coût, améliorant l’accès à Internet dans les zones isolées.

Services essentiels : En santé, l’IA facilite le diagnostic à distance et la gestion des épidémies. En agriculture, elle aide à la prévision des récoltes et à la gestion des ressources. Dans les services financiers, elle favorise l’accès au crédit et à l’assurance via des solutions mobiles intelligentes.

  1. Défis liés à l’implémentation de l’IA en Afrique

Malgré son potentiel, le déploiement de l’IA en Afrique se heurte à plusieurs défis :

Infrastructure : Le manque d’électricité stable, de connectivité et de matériel freine le déploiement de l’IA dans de nombreuses régions.

Compétences : La pénurie de spécialistes en IA et en science des données limite la capacité locale à concevoir et à maintenir des solutions adaptées.

Biais : Les modèles d’IA entraînés sur des données non africaines peuvent produire des résultats discriminants ou inefficaces. Il est crucial de développer des bases de données représentatives.

Réglementation : L’absence de politiques claires sur la protection des données, la transparence des algorithmes et la responsabilité limite la confiance et l’adoption de l’IA.

  1. Stratégies pour une IA inclusive

Pour maximiser les bénéfices de l’IA en Afrique, il est essentiel de mettre en œuvre des stratégies :

Partenariats : La collaboration entre gouvernements, entreprises et ONG est essentielle pour mobiliser les ressources nécessaires au développement de l’IA inclusive.

Initiatives locales : Les projets portés par les communautés permettent de répondre aux besoins réels et de garantir l’appropriation des technologies.

Formation : Investir dans l’éducation numérique, former les jeunes et les femmes, et sensibiliser à l’éthique de l’IA sont des leviers fondamentaux pour une transformation durable.

  1. Études de cas et initiatives inspirantes

De nombreux projets démontrent le potentiel de l’IA en Afrique :

Afrique de l’Est : Des plateformes d’apprentissage en ligne en langue swahili et des outils de diagnostic médical à distance illustrent le potentiel de l’IA dans cette région.

Afrique de l’Ouest : Des applications agricoles basées sur l’IA et des systèmes de reconnaissance vocale en langues locales montrent l’adaptabilité des solutions.

Programmes panafricains : Des initiatives comme AI4D et Masakhane favorisent la recherche collaborative, la création de données africaines et le développement de modèles linguistiques inclusifs.

  1. Perspectives d’avenir

L’avenir de l’IA en Afrique s’annonce prometteur :

Démocratisation : L’essor des technologies open source et des outils accessibles permet une appropriation plus large de l’IA.

Rôle des États : Les politiques publiques doivent soutenir l’innovation, garantir l’équité et encadrer l’usage de l’IA.

IA éthique : L’avenir de l’IA en Afrique repose sur sa capacité à respecter les valeurs locales, à inclure toutes les voix et à répondre aux besoins du continent.

  1. Conclusion

L’intelligence artificielle représente une opportunité majeure pour réduire la fracture numérique en Afrique. En favorisant l’accès à l’éducation, aux services essentiels et à la connectivité, elle peut transformer les sociétés africaines. Toutefois, son déploiement doit être accompagné de stratégies inclusives, éthiques et durables. Une mobilisation collective des gouvernements, des entreprises, des chercheurs et des citoyens est indispensable pour que l’IA devienne un véritable levier de justice sociale et de développement.

Armel ONAS ONGBWA OLLOMO, Conseiller technique du Directeur général de l’ANINF

Pour en savoir plus : https://aninf.ga/

 

 

 

 
GR
 

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