Au Gabon, où l’exécutif intensifie sa politique de valorisation des ressources minérales à travers la transformation locale, Havilah Mining Gabon (HMG), filiale du groupe sud-africain Havilah Consolidated Resources (HCR), s’inscrit pleinement dans cette dynamique. Depuis 2018, l’entreprise est engagée sur le permis G5-694, dans la perspective de développer la future mine de fer de Milingui, dans la province de la Nyanga. Un projet stratégique à l’heure où le secteur minier représente un levier majeur pour la diversification de l’économie nationale. Neuf mois après la validation de l’étude d’impact environnemental et social par le panel interministériel, GabonReview a rencontré le professeur Baojin Zhao, président du conseil d’administration de HCR, pour faire le point sur l’agenda du projet. Entretien exclusif à découvrir ci-dessous.

Le professeur Baojin Zhao. © D.R.

 

GabonReview : Monsieur le Président du Conseil d’Administration, où en est-on concrètement avec le projet d’exploitation du fer de Milingui aujourd’hui ?

Pr Baojin Zhao : Le projet fer de Milingui fait l’objet de travaux depuis près de 6 ans. Dès la première obtention du permis de recherche, la société a immédiatement entamé des travaux sur le terrain. Ainsi, nous avons travaillé intensément, et ce dans l’intention d’amener rapidement le projet en phase d’exploitation. Nos travaux nous ont amenés à conclure une étude de faisabilité de phase 1 que nous avons déposée au ministère des Mines. Par la suite, il nous a été demandé par l’administration de compléter ce dossier en effectuant des études d’impact environnemental et social, qui comprenaient deux volets : le premier concernant l’exploitation et les installations classées pour la protection de l’environnement, et le second, une notice d’impact environnemental et social pour l’ouverture de la route d’accès au site d’exploitation. Ces deux études nous ont pris environ 19 mois pour être finalisées et validées par l’administration.

Quels ont été les principaux résultats des recherches géologiques transmises à la Direction générale des Mines et de la Géologie ?

Nous avons effectué d’énormes travaux de recherche sur le terrain y compris des études géologiques, géochimiques, métallurgiques, etc. Ces travaux nous permettent d’établir une première exploitation minière à ciel ouvert suivant une capacité de production de 2-4 Mt/an en phase 1 pouvant évoluer à 5-7 Mt en phase 2 avec un aménagement de solutions logistiques d’acheminement et d’évacuation. Ces résultats devaient être consolidés par des travaux complémentaires durant la mise en œuvre de la première phase d’exploitation que nous espérions être effective courant deuxième moitié 2026, si toutes les conditions nous sont favorables. L’étude d’impact environnemental et social menée avec un cabinet d’étude gabonais a duré 19 mois.

Quelles sont les principales conclusions de cette étude, et en quoi garantissent-elles une exploitation durable des ressources ?

Havilah Mining Gabon est une entreprise citoyenne soucieuse de la réglementation en vigueur en matière de gestion environnementale, la sécurité et la santé au travail.  Nos travaux d’études environnementales ont duré environ dix-neuf mois comme vous l’avez dit, c’était un arsenal de recherches que nous devions effectuer dans le respect des recommandations formulées par le Comité d’évaluation des études d’impact environnemental et social.  Ces études portaient sur la biodiversité, le sol, sous-sol, les eaux, l’air. Des consultations publiques et une cartographie participative nous ont permis de recenser les besoins des communautés et d’élaborer un Plan de gestion économique et social (PGS).  Il a fallu faire intervenir beaucoup de cabinets notamment des nationaux pour nous assister dans l’exécution de ce travail parce qu’il fallait faire un travail très sérieux. D’ailleurs, si vous consultez le rendu de ce travail, c’est un document de plus de mille pages qui a été soumis à l’administration de l’environnement. Aussi, il a été validé par différentes administrations puisqu’il est passé à l’examen d’un comité interministériel regroupant le ministère de l’Environnement, l’Agence nationale des parcs nationaux (ANPN), le ministère des Mines, le ministère des Forêts et faunes et d’autres départements parties prenantes. Nous avons fait un travail très substantiel qui nous permet aujourd’hui de travailler en toute quiétude et de mettre sur pied une RSE adaptée tout en respectant l’aspect environnemental et social.

Qu’est-ce qui justifie la longue durée consacrée à l’étude d’impact environnemental et social ?

Le professeur Baojin Zhao sur le terrain. © D.R.

Nous avons eu beaucoup d’exigences pour mettre sur pied ce travail assurément important. Nous, en tant que société respectueuse des normes, nous ne pouvions que remplir l’ensemble des conditions qui nous avaient été demandées sinon exigées par le ministère de l’Environnement. Le travail de validation s’est fait en plusieurs phases. Dans la première phase, vous livrez le travail, qui est analysé par l’équipe technique et qui vous demande des travaux complémentaires.  Ce que nous avons fait. Ce n’est qu’à la deuxième phase que l’étude a été validée. C’est donc ce qui pourrait justifier en partie que nous prenions autant de temps. Mais aujourd’hui nous sommes fiers du travail effectué qui valait la peine, et fort heureusement, sanctionné par l’attribution de nos autorisations par l’administration en charge de l’environnement, à savoir l’arrêté ministériel donnant autorisation au titre d’une installation classée pour la protection de l’environnement en date du 24 novembre 2024, et la décision portant approbation de la Notice en date du 27 mai 2025. J’aimerais préciser que dans le cadre de notre politique environnementale, Havilah Mining Gabon a signé au mois de juillet 2024 un contrat de gestion concerté avec l’ANPN relatif à l’exploitation de la mine de fer de Milingui. Cet accord comporte des engagements des deux parties et un appui financier et matériel qu’Havilah Mining Gabon doit apporter à l’ANPN. À ce jour, il existe une bonne synergie sur le terrain entre Havilah Mining Gabon et l’ANPN, surtout dans les initiatives de sensibilisation des populations contre le braconnage.

Où en êtes-vous à ce jour avec la procédure de demande du permis d’exploitation ?

Nous avons terminé avec notre étude de faisabilité depuis 2021 et déposé au ministère des Mines, qui nous avait demandé de faire un complément d’éléments, notamment l’étude d’impact environnemental et social. L’EIES a été achevée et nous avons reçu le quitus du ministère de l’Environnement. Nous allons maintenant travailler avec notre ministère de tutelle pour poursuivre la procédure afin de nous permettre d’atteindre notre objectif de lancer l’exploitation dans la deuxième moitié de 2026. Par ailleurs, par anticipation et ceci sous l’autorisation de l’administration de l’Environnement, la société Havilah Mining Gabon a procédé au démarrage de certains travaux préparatoires relatifs à la phase d’exploitation, notamment la réouverture de la route d’accès d’environ 40 km, menant au site minier et les premiers terrassements devant abriter les installations minières. Nous sommes pleinement convaincus de la volonté des autorités à accompagner le démarrage effectif du projet de la mine de fer de Milingui. Lors de notre audience du 9 mai 2025 avec le ministre des Mines, il a félicité le travail abattu jusqu’ici et nous a également rassurés quant à l’examen imminent de notre requête auprès de ses services.  L’obtention du permis d’exploitation ouvrira une nouvelle page des investissements dans le secteur minier au Gabon. Les différentes étapes du processus à ce jour nous ont offert la possibilité de travailler avec les différentes administrations et parallèlement signer des contrats commerciaux et de sous-traitance avec des partenaires nationaux et internationaux. Nous avons déjà débuté l’importation du matériel nécessaire à notre activité minière. Suivant le chronogramme défini, nous sommes prêts à nous déployer sur la future mine de fer de Milingui.

Quelles sont les retombées économiques et sociales que peut espérer l’État gabonais à court, moyen et long terme, de la mise en exploitation de la mine de Milingui ?

En phase 1 de développement du projet, nous évaluons les recettes fiscales attendues pour le gouvernement à environ 183 millions de dollars américains. En termes d’emplois, nous estimons les emplois directs à 520 et 1 100 emplois indirects, soit de près de 1 600 emplois pour la valorisation de ce site durant la phase 1 seulement.

Dans un contexte où les autorités gabonaises prônent la transformation locale des ressources naturelles, comment Havilah Mining Gabon s’aligne-t-elle sur cette vision ?

Vues du site de Milingui. © D.R.

En termes de politique générale, avoir une transformation locale est une bonne chose. Étant une entreprise africaine, puisque nous sommes une société sud-africaine, nous pensons que les minerais ou les ressources naturelles ne devraient pas être exportés chaque fois de façon brute. Un minimum de transformation locale est nécessaire pour la simple raison que ça donne non seulement une plus-value aux minerais, mais aussi parce que ça donne la possibilité de créer également beaucoup d’emplois. Faire une transformation locale est un sujet approprié pour nous depuis toujours. Il est vrai que cela ne pourra se faire sans challenge tel que l’énergie, mais il existe toujours des solutions envisageables propices à l’environnement. D’ailleurs, dans le cadre de notre chronogramme d’exploitation soumis à l’administration des Mines il y a de cela 6 ans, nous envisagions déjà une transformation locale d’une partie de la production. C’est pourquoi aujourd’hui nous pensons à mettre en place une première transformation en fonte brute. Une telle usine de fonte produira de la fonte neutre en carbone et pourra créer près de 300 emplois directs et 2 000 emplois indirects supplémentaires. Ceci permettra une valorisons de minerai de fer plutôt que de l’exporter directement comme matière première. La technologie repose sur la biomasse qui nécessite de grandes quantités de charbon de bois ou de biomasse à cycle court pour alimenter le four à fonte. Ce besoin en biomasse permet de développer au moins 10 000 hectares de forêts et/ou d’agriculture.

Quel rôle jouera la mine de Milingui dans le développement de la province de la Nyanga en matière d’emplois, d’infrastructures et de redynamisation économique ?

Je dirais que la mise en exploitation de la mine de fer de Milingui, si attendue par la communauté contribuera d’une part, à améliorer le tissu économique dans la province de la Nyanga et d’autre part, participera à la résorption du chômage grâce à la création de plusieurs emplois directs et indirects. L’édification des infrastructures adaptées au projet garantira une autonomie d’exécution, une exploitation économiquement rentable et profitable au développement économique de la région en général. Pour nous, ce projet est porteur d’espoir pour la Nyanga.

À l’heure actuelle, quelles sont vos attentes immédiates pour entamer le processus de valorisation de la mine de fer de Milingui ?

En dehors du fait que nous avions déjà commencé à ouvrir les voies d’accès, nous avons obtenu toutes les autorisations environnementales, sécurisé les capitaux nécessaires pour la première phase de projet et conclu la plupart des contrats commerciaux avec les sous-traitants nationaux et internationaux. Certains équipements essentiels pour la construction du site sont prêts à être déployés sur le territoire. À ce titre nous attendons l’accompagnement de l’administration des Mines, en l’occurrence, de continuer à bénéficier du support que nous avions déjà par le passé. Cet accompagnement est nécessaire pour permettre à nos investisseurs d’intensifier leurs investissements directs. Nous avons beaucoup d’équipements qui sont en attente d’être déployés. Il nous faut des facilitations administratives nécessaires pour que ce matériel entre sur le territoire gabonais.

Avez-vous un message à adresser à la fin de notre entretien ?

Nous saluons la coopération et le soutien de la population de la Nyanga depuis le début du projet. En tant qu’entreprise citoyenne, nous ne ménagerons aucun effort pour apporter notre contribution à la mise en place des nouvelles orientations économiques du Gabon prônée par le chef de l’état, chef du gouvernement visant à valoriser les ressources minérales par une transformation locale. Nous pensons que dans les trois prochaines années de la phase d’exploitation, Havilah Mining Gabon sera en voie de cette transformation locale. Cette phase ouvrira ainsi la possibilité à la création de nouveaux emplois que nous estimons à plus de 2 000. En tant qu’acteurs africains désireux de donner au continent des champions nationaux, nous espérons que grâce aux travaux déjà menés, nous serons les premiers à exploiter le fer au Gabon et dans la sous-région de l’Afrique centrale donnant au Gabon une place prépondérante sur la carte des pays miniers en exploitation responsable.

 
GR
 

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