« Nous voulons former une élite judiciaire intègre et compétente », dixit Pierre Ndong Aboghe

À quelques jours du concours d’entrée à l’École nationale de la magistrature (ENM), prévu les 23 et 24 août 2025, le Directeur général de cette institution académique, Pierre Ndong Aboghe détaille les enjeux, la rigueur du processus de sélection et la nécessité de former des magistrats et greffiers à la hauteur des attentes de la justice gabonaise. Le DG de l’ENM insiste sur la transparence du concours et sur l’exigence de qualité dans le recrutement, afin de répondre à un déficit criant de personnel dans le secteur judiciaire.

« La Magistrature a besoin des meilleurs. On a tellement décrié le corps de métier, en citant notamment les juges corrompus, paresseux et incompétents », a affirmé le Directeur général de l’Ecole nationale de la Magistrature, Pierre Ndong Aboghe. © D.R.
Gabonreview : Du 17 juillet au 11 août 2025, l’ENM a procédé à l’enrôlement des candidatures pour le concours. Quel était l’objectif visé ?
Pierre Ndong Aboghe : L’objectif du gouvernement est de parvenir à combler un déficit en matière de personnels de justice. Le service public de la justice, vous le savez, est actuellement très sollicité par les justiciables qui sont de plus en plus nombreux au regard de l’augmentation de la population gabonaise. On se rend compte qu’il y’a un déficit au niveau des personnels de la justice tant dans les rangs des magistrats que dans les rangs des greffiers.
Lors du dernier Conseil Supérieur de la Magistrature, l’an dernier, il a été acté l’organisation du concours de recrutement de 200 Magistrats et de 100 Greffiers. Ce qui reste insuffisant à mon avis compte tenu des demandes, du vieillissement du personnel judiciaire partant la création des nouvelles juridictions dans l’ensemble des provinces que compte le pays. La construction de l’annexe du tribunal de première instance de Libreville témoigne de ce que l’Etat a de plus en plus besoin des personnels de l’ordre judiciaire. Aujourd’hui, c’est un constat, un juge fait le travail de 3 ou 4 juges. Voilà pourquoi il serait essentiel d’organiser le concours d’entrée à l’Ecole Nationale de la Magistrature tous les deux (2 ans) en vue du recrutement des nouveaux personnels de justice.
GR : Combien de candidatures ont été enregistrées ?
Je ne saurais m’avancer avec exactitude sur les chiffres. Mais nous ne sommes pas loin d’avoisiner les 5000 dossiers de candidatures enrôlés à date. Même si je dois avouer que c’est surtout dans la filière de greffiers principaux, c’est-à-dire ceux qui postulent avec le baccalauréat qui sont plus nombreux. Il y a moins de candidats en ce qui concerne les conseillers de greffe, c’est-à-dire, les candidats détenteurs des Masters.
On constate par ailleurs que quand un étudiant à un Master, il préfère être juge que greffier. Cela est certainement dû au fait que l’offre de la profession des greffiers ne leur est pas bien présentée. J’espère qu’on reverra cette loi que je considère comme une aberration. Le statut des greffiers ne prévoit le recrutement des greffiers qu’avec le niveau d’études Master. Alors qu’en France, ils recrutent les conseillers de Greffe avec le niveau Master ; les greffiers avec la licence et au Gabon nous n’avons retenu que le niveau Master. Et je tiens à préciser qu’actuellement nous n’avons que 7 ou 8 candidats détenteurs de Master pour le profil de conseiller de greffe.
GR : Quelles sont les prochaines étapes avant le concours ?
Nous avons procédé à la clôture des inscriptions le lundi 11 août 2025 à 17 heures. Vous aurez pu constater l’engouement des derniers jours. Il y en a au nombre de postulants qui ont payé la quittance du Trésor public et qui sont encore dans la file d’attente et à l’extérieur de l’enceinte de l’Ecole Nationale de la Magistrature. Or, le trésor ferme à partir de 15 heures. Ce qui est sûr, nous allons respecter ce qui a été prévu dans les arrêtés. Nous avons tout fait de recevoir tous les détenteurs de la quittance du trésor avant le deadline d’autant qu’ils ont eu assez de temps pour le faire ; soit un mois.
GR : L’opération d’enrôlement a-t-elle rencontré des difficultés ?
Je dirai que nous avons surtout connu une certaine pression au niveau du volume de travail. Il nous est arrivés de sortir de l’école à 22 heures. Nous avons été contraints de travailler certains samedis de 7h30 à 16h. C’est normal, les gens sont intéressés par les concours des services publics de la justice. Je reçois et je travaille avec tout le monde, je devise avec les usagers sur la nature des épreuves, sur la méthodologie et notamment sur l’importance de travailler avec rigueur pour réussir au concours prévu se tenir les 23 et 24 août 2025. Au niveau organisationnel, les choses ont été conçues tenant compte des filières, pour faciliter le dépôt des candidatures respectives.
GR : La transparence et l’équité sont-elles garanties ?
Nous allons tout faire pour qu’il y ait transparence, en ce sens qu’avec le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Chargé des Droits Humains, Dr. Séraphin Akure-Davain, universitaire par ailleurs et le Président du Jury,….qui est Professeur agrégé et enseignant à Nantes nous y travaillons. Il n’y aura pas de passe-droit. Aucun candidat ne sera déclaré admissible s’il n’a pas été présent lors des évaluations.
GR : Une polémique est née autour de la limite d’âge. Que répondez-vous ?
Nous n’inventons rien. Nous sommes conformes à notre statut, c’est-à-dire à la loi n°40/2023 du 26 octobre 2023, qui, en son article 57 dit qu’il faut être de nationalité gabonaise et être âgé de 33 ans au plus à la date du concours. Cela voudrait signifier que le 23 août, le postulant doit avoir 33 ans. Ce statut a été écrit et adopté par l’Assemblée nationale et le Sénat. Nous avons travaillé en intelligence avec les conseillers juridiques du Ministre de la Fonction Publique qui est le Ministère recruteur. Nous ne sommes qu’un Ministère employeur. Or, ces textes sont paramétrés par le logiciel central de la Fonction publique qui recrute à 35 ans maximum. Voilà pourquoi nous recrutons à 33 ans. Après les 2 ans de formation, les élèves magistrats en sortent âgés de 35 ans. Autrement dit, c’est la date de naissance qui compte et non l’année civile.
Votre sentiment au terme de la phase d’enrôlement des dossiers de candidatures ?
Je ne saurais être précis à propos d’autant que nous poursuivons l’organisation du concours d’entrée à l’école nationale de la magistrature avec notamment la phase des évaluations les 23 et 24 du mois. J’ai pris un mois pour permettre aux candidats de s’inscrire. Malheureusement, les retardataires n’ont pas pu candidater vu les délais. Les gabonais sont toujours dans la lenteur, l’atonie, c’est toujours à la dernière minute qu’ils accourent. Ils oublient qu’il y a des délais qui sont purement administratifs et qu’il y a un chronogramme à respecter. C’est le propre des compatriotes. Tout s’est fort heureusement bien passé.
GR : Votre mot de fin aux candidats ?
En plus d’être Directeur général de l’Ecole nationale de la Magistrature ; je suis Magistrat voilà plus de 35 ans et enseignant d’universités depuis 1988. Je rassure l’opinion de ce que les conditions de transparence et d’équité au concours d’entrée à l’école nationale de la magistrature les 23 et 24 août 2025 sont garanties. Les gens connaissent ma réputation et ma rigueur. Je vais faire douter ces derniers. Il n’y aura pas de listes pré établies. On donne la chance à tout le monde. La Magistrature a besoin des meilleurs. On a tellement décrié le corps de métier, en citant notamment les juges corrompus, paresseux et incompétents. Nous voulons vraiment former la crème des Magistrats et des Greffiers. Nous sommes conscients de ce que tout commence au sanctuaire de la formation des juges et des greffiers qu’est l’école. Bonne chance à tous les candidats.

1 Commentaire
De n’importe quoi, une fausse justice au service d’un homme, ce concours d’ici quelques jours, on va entendre les enfants des pauvres cries a la fraude