Dans une volonté de réappropriation identitaire et de reconquête des territoires ancestraux, le Pr Marc-Louis Ropivia a procédé, le week-end dernier, à l’inauguration du village culturel et environnemental Éliwé Ntchuwa Akombia. Situé dans le sanctuaire spirituel d’Éliwa Z’anero, dans la province de l’Ogooué-Maritime, ce site se veut un pôle de mémoire, de transmission et de renouveau culturel pour la communauté Orungu.

Le week-end dernier, au cœur des terres ancestrales Orungu, le Pr Marc-Louis Ropivia a officiellement inauguré Éliwé Ntchuwa Akombia, un village culturel et environnemental enraciné dans le sanctuaire d’Éliwa Z’anero. Ce projet inédit s’inscrit dans une démarche de restauration mémorielle, de réinstallation communautaire et de valorisation du patrimoine autochtone.

Ce village, pensé comme un espace de renaissance identitaire, abrite un musée culturel Orungu — structure rare dans le paysage villageois gabonais — consacré à l’histoire de ce peuple côtier, autrefois acteur majeur des dynamiques politiques, sociales et commerciales dans le delta de l’Ogooué. « Ce musée retrace l’histoire intérieure de l’un des peuples côtiers du Gabon. La phase terminale de leur migration dans le Bas-Ogooué et le delta maritime leur a permis de s’installer durablement sur le littoral, où ils ont façonné une identité culturelle singulière et pérenne », a souligné le Pr Ropivia dans son discours inaugural.

Un espace de mémoire et de transmission

Le Pr Marc-Louis Ropivia lors de la présentation du site historique, mettant en lumière la richesse et la diversité de la culture locale. © D.R

 

L’ouverture d’Éliwé Ntchuwa Akombia marque une étape significative dans la mise en valeur du patrimoine culturel et environnemental de la province. Le site se veut à la fois lieu de rencontre intergénérationnelle, centre de recherche historique, espace d’éducation patrimoniale et vecteur de développement local. « La particularité de ce village est de conjuguer deux dimensions majeures : un patrimoine environnemental exceptionnel et un patrimoine culturel original. Ce musée, rare dans nos espaces villageois, incarne une innovation patrimoniale majeure », a poursuivi le Pr Ropivia.

En plus de proposer un regard approfondi sur l’histoire des Orungu, le musée entend réhabiliter des vérités longtemps occultées ou déformées par ce que le chercheur qualifie de « révisionnisme ethnocentré ». Selon lui, la mémoire historique du royaume Orungu – structuré autour d’une dynastie de treize souverains – mérite d’être reconnue, documentée et transmise dans toute sa richesse.

Une réponse à l’érosion territoriale et identitaire

© D.R

Pour le Pr Ropivia, la réinstallation des Orungu dans leurs villages d’origine n’est pas seulement un acte symbolique, mais une nécessité historique face à l’exode provoqué par l’industrialisation pétrolière des années 1970. Cette dynamique avait entraîné l’abandon progressif de nombreux villages tels que Wézè, Abunawiri, Apomandé, Simani, Ekèwa, Ndogo, Okolo, Akuba, ou encore Mpaga. « Ce musée, au cœur d’un sanctuaire sacré, constitue une réponse forte à la dépossession culturelle. Il appelle à une reconquête des racines, à un retour conscient et assumé sur les terres de nos ancêtres », a-t-il affirmé.

En valorisant ces territoires, le projet ambitionne aussi de stimuler un tourisme culturel et environnemental durable, tout en servant de levier à une dynamique de décentralisation culturelle dans la province.

Réconcilier histoire, culture et développement

Plus qu’un simple musée, Éliwé Ntchuwa Akombia est un acte de mémoire vivante, qui invite à penser la culture comme levier de développement local, de cohésion sociale et de résilience communautaire.

À travers cette initiative, le Pr Ropivia espère aussi impulser un dialogue interethnique renouvelé, basé sur la reconnaissance des trajectoires historiques spécifiques de chaque peuple et sur la richesse plurielle de l’identité gabonaise. « Réhabiliter l’histoire Orungu, ce n’est pas nier celle des autres. C’est reconnaître à chaque peuple sa dignité historique, sa contribution à l’édifice national, et sa place dans la mémoire collective », a-t-il conclu.

Éliwé Ntchuwa Akombia s’impose dès lors comme un lieu de réappropriation et de réenracinement, en même temps qu’un laboratoire d’idées sur la préservation des patrimoines en Afrique centrale. Une réponse locale, ancrée et lucide, à la mondialisation standardisante et à l’amnésie culturelle.

 
GR
 

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