Ossimane change de peau : un véhicule politique pour Oligui, un revers pour le PDG

À un mois de l’élection présidentielle, le voile se lève enfin sur l’une des manœuvres politiques les plus attendues : l’association Ossimane, présidée honorifiquement par Brice Clotaire Oligui Nguema et cornaqué en sourdine par son frère Mintsa Mi Nguema, s’apprête à se transformer en parti politique, ce samedi au Palais des Sports Gahouma. Un coup stratégique qui redessine le paysage électoral et laisse le PDG, ancien parti au pouvoir, sur le carreau.

Président d’honneur d’Ossimane, Brice Clotaire Oligui Nguema, le 19 janvier 2025, lors de l’installation de la Coordination de cette association dans l’Estuaire. © Insidenews241
Ce samedi 8 mars, le Palais des Sports Gahouma de Libreville accueillera ce qui est présenté comme l’assemblée générale de l’association Ossimane, mais qui s’annonce comme un véritable congrès constitutif. L’information, confirmée par des sources proches de l’organisation, ne laisse plus de place au doute : Ossimane va changer de statut et de nom pour devenir une formation politique à part entière.
Créée le 16 mars 2024 dans la province du Woleu-Ntem, cette association s’est rapidement étendue à l’échelle nationale, installant progressivement des coordinations dans les différentes provinces du pays. Initialement présentée comme une structure de développement communautaire et de soutien au Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), Ossimane franchit désormais un cap décisif dans son évolution.
La main d’Oligui Nguema derrière la transformation d’Ossimane

Brice Clotaire Oligui Nguema avait déjà été intronisé président d’honneur de l’association Ossimane. © Ossimane.com
Le lien entre l’association et le président de la Transition n’est plus à démontrer. Brice Clotaire Oligui Nguema occupe officiellement le poste de président d’honneur d’Ossimane. De plus, lors d’un événement au Palais des Sports de Libreville où l’association appelait déjà à sa candidature, le chef de l’État avait fait une apparition et prononcé une déclaration, alimentant les rumeurs sur ses ambitions électorales.
Par ailleurs, la discrétion d’Aurélien Mintsa Mi Nguema, frère du président de la transition et ancien Directeur général du budget, comme véritable chef de file de l’organisation constitue un indice supplémentaire de l’implication directe de la famille du président dans cette entreprise politique. La transformation d’Ossimane en formation politique intervient à un mois de l’élection présidentielle du 12 avril, un timing qui ne doit rien au hasard.
L’hypothèse de voir cette nouvelle formation politique servir de véhicule électoral au président de la Transition apparaît donc hautement plausible. La méthode rappelle d’ailleurs celle employée par d’autres dirigeants du continent, consistant à créer un outil politique sur mesure plutôt que de s’appuyer sur des structures partisanes préexistantes, parfois lestées d’histoires complexes.
Le PDG définitivement en perte d’influence
Cette métamorphose d’Ossimane constitue un sérieux revers pour le Parti démocratique gabonais (PDG). L’ancien parti au pouvoir, qui s’était fortement impliqué dans la campagne en faveur du ‘’OUI’’ lors du référendum constitutionnel de décembre dernier, espérait visiblement se positionner comme la machine électorale naturelle d’Oligui Nguema. Son président, Paul Biyoghe Mba, n’avait d’ailleurs cessé d’affirmer que le PDG soutenait Oligui Nguema qui a d’ailleurs recyclé de nombreux membres influents du parti déchu du pouvoir par le CTRI.
Cette stratégie semble désormais compromise, même si le PDG appellera très probablement à voter pour Oligui Nguema lors du scrutin présidentiel. La création d’un «parti propre au président de la transition», ainsi que le soutiennent déjà de nombreux observateurs, marginalise davantage l’ancien parti d’Ali Bongo, dont les membres continuent pourtant d’affirmer sur les forums WhatsApp et Facebook qu’il demeure une force politique incontournable et qu’il connaîtra une renaissance.
La transformation d’Ossimane en parti politique marque ainsi une nouvelle étape dans la recomposition du paysage politique gabonais post-Bongo. Elle confirme la volonté d’Oligui Nguema de construire sa propre base de soutien populaire, indépendante des anciennes structures de pouvoir, tout en préparant méthodiquement son engagement dans la bataille électorale à venir.

3 Commentaires
le Général Oligui a bien compris que se positionner en tant que candidat du PDG (ce que voulaient sans doute certains cadres et militants de ce parti) accréditera la thèse selon laquelle i n’y a jamais eu de rupture avec le précédent système. On se souvient du terme « CTRI-PDG » maintes fois répété par ses adversaires politiques pour caractériser sa gouvernance. Le Général semble sur ce coup s’inspirer d’Emmanuel Macron (avec qui il est curieusement en bon termes) qui a fait de son mouvement « En-Marche » un parti politique, matérialisant ainsi sa distance avec le parti socialiste. Le PDG sera un parti satellite de OSSIMANE. J’annonce dès les prochains jours et semaines, de nombreux transfuges en direction de OSSIMANE. Affaire à suive… de très près.
Monsieur Yann Levy Boussougou-Bouassa n’a tout à fait tort sur un point précis : Le Général B.C Oligui Nguema ne se serait jamais présenté sous la bannière du PDG.
Ce parti, déclinant, est mal perçu aujourd’hui, Associer son image à celui du PDG aurait donné un avantage au PDG lequel aurait vu en lui le successeur d’Ali. Or, il veut établir une distance très claire avec l’héritage symbolique du PDG.
En revanche, et sans vouloir baptiser de polémique (donnant l’impression d’un jeu de Game Boy), il faut préciser qu’Emmanuel Macron n’est plus membre du Parti socialiste depuis 2009. Il s’est encarté comme membre actif en 2006. Il a démissionné de sa fonction de Ministre de l’Économie pour se consacrer à son
« mouvement politique » Renaissance (RE, 6 avril 2016) qu’il appelle « En Marche »
(comme Emmanuel Macron). C’est après son élection (le 14 mai 2017) qu' »En
Marche » devient La République En Marche le 4 août 2017 jusqu’en 2022.
Aujourd’hui ce parti est noyé dans la masse d’une coalition du centre qui n’a pas de majorité à l’Assemblée nationale française.
Emmanuel Macron me rappelle beaucoup Valérie Giscard d’Estaing qui avait quitté les gaullistes pour créer son mouvement politique centriste (devenu UDR, mais je ne suis pas sûr parce que je le dis de mémoire).
Cordialement.
Désiré Nguéma Nzong,
Merci pour ces plus amples précisions sur les circonstances de la séparation entre Emmanuel Macron et les socialistes.
S’agissant de la présidence de Valery Giscard d’Estaing, le parti qu’il fonde en 1978 est appelé UDF (Union pour la démocratie française, une coalition de partis politiques de droite non gaullistes). L’UDR (union des droites pour la république, ou union des droites racistes, pour les plus satiristes) est plutôt un parti fondé par Eric Ciotti en 2012 et que l’on situe davantage à l’extrême droite de l’échiquier politique français.
Selon certaines sources, l’UDF est d’abord une plate-forme électorale et programmatique qui a ensuite mué en parti politique unifiant véritablement toutes ses composantes dans les années 90. Étant davantage contemporain d’Emmanuel Macron, cette période de Giscard d’Estaing est moins évocatrice pour moi, mais je vois ce que vous voulez dire.
cordialement