Port-Gentil : 4 jeunes libérés après 3 ans de détention «injuste» pour vol avec arme

Placés sous mandat de dépôt à la maison d’arrêt du Château, le 10 août 2022, quatre jeunes accusés de vol avec usage d’une arme apparente ont recouvré la liberté ce lundi 11 août 2025 à l’issue de leur audience devant la Cour criminelle du Tribunal de Port-Gentil. Leur libération intervient après que la défense a relevé de nombreuses incohérences dans l’identification des présumés agresseurs trois ans plus tôt.

Les 4 jeunes hommes clamant leur innocence à la barre. © D.R.
Les faits remontent au 31 juillet 2022, dans le quartier Balise, à la boulangerie Trois Filaos. Ce jour-là, aux alentours de trois heures du matin, Janvier Mavioga, Nathan Mounguengui, Graig Mangouka Kebilanou et Alex Omanda Nkolo, revenant tous d’un mariage familial, décident de s’arrêter auprès d’un vendeur de café de rue. Quelques heures plus tard, un certain Serge Dimitri Mambo qui se rendait à son lieu de travail dans la zone du nouveau, déclare avoir été agressé par quatre individus. L’un d’eux, à visage découvert, assurait la maîtrise de la victime, tandis que les autres, cagoulés, procédaient à une fouille minutieuse de ses poches.
Ils auraient ainsi dérobé une somme de 259 000 francs CFA ainsi qu’un portable iPhone 7+, avant de prendre la fuite. Prise de panique, il choisit de rebrousser chemin pour informer ses frères. Ils se mettent à suivre discrètement les agresseurs et parviennent à appréhender Alex Omanda Nkolo. Conduit au commissariat central, il reconnaît sa participation à l’agression et précise avoir agi en collaboration avec ses frères, cousins et amis. Les autres sont alors interpellés puis présentés devant le magistrat instructeur. Au cours de l’interrogatoire approfondi, Alex Omanda Nkolo réitère ses déclarations tandis que les trois autres affirment qu’ils s’étaient juste arrêtés pour acheter du pain.
Ils expliquent qu’Alex Omanda Nkolo les attendait à l’extérieur et qu’à leur sortie il n’était plus là. Ils décident de regagner leur domicile en supposant que ce dernier était parti avant eux. Une version finalement confirmée par Alex Omanda Nkolo. À la barre le lundi 11 août, les quatre accusés ont déclaré que leurs aveux avaient été extorqués sous la contrainte de la torture durant leur détention préventive au poste de police. Dans ses réquisitions, le ministère public a sollicité la reconnaissance de la culpabilité des prévenus ainsi que leur condamnation à une peine de dix ans de réclusion criminelle et à une amende d’un million de francs CFA chacun. En revanche, la défense a plaidé en faveur d’un acquittement pur et simple pour trois des accusés, tandis qu’elle a demandé un acquittement au bénéfice du doute pour Alex Omanda Nkolo en première instance, assorti d’un sursis en cas de condamnation.
Plusieurs incohérences dans la commission des faits
Seulement, au cours de l’audience, les procès-verbaux des enquêtes préliminaires ont révélé plusieurs incohérences quant aux circonstances entourant la commission des faits. Notamment, aucune constance ne se dégageait concernant la nature de l’arme utilisée : tantôt il s’agissait d’une arme blanche, tantôt d’un bâton ou encore d’une machette, ce qui a conduit à une absence de preuve matérielle tangible lors de l’audience. De surcroît, tout au long de l’enquête, le plaignant avait affirmé avoir été pris en charge par trois individus tandis qu’un quatrième le maintenait en respect avec une arme blanche. Or, selon les procès-verbaux consultés, Serge Dimitri Mambo aurait indiqué que l’un des accusés assurait le guet pendant que les trois autres intervenaient activement.
En effet, en droit, la seule reconnaissance des faits ne saurait suffire pour asseoir la culpabilité en l’absence de tout autre élément. En conséquence, il a été déclaré non établi en l’encontre des accusés le crime de vol avec usage d’arme apparente. Leur acquittement pur et simple a été déclaré et leur mandat de dépôt levé, ce mardi 12 août en début de matinée.
«Lorsque la justice est rendue, il n’y a ni vainqueur ni vaincu. L’avocat que je suis est totalement satisfait lorsqu’il obtient une décision d’acquittement. Les incohérences des déclarations de la victime dans les PV qui parlaient tantôt de trois, quatre et même cinq agresseurs qui sont tombés sur elle. Tout ceci a forgé la conviction de la Cour qu’il n’y avait en réalité aucune infraction», a précisé l’avocat au barreau du Gabon, commis à la défense de l’accusé, Me Lin Joël Ngandu.

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