Port-Gentil : le Bénin organise le recensement et le rapatriement volontaire de ses ressortissants

Face aux tensions grandissantes entre communautés au Gabon, liées à la crise économique et à la concurrence sur le marché de l’emploi, le gouvernement béninois a dépêché une mission spéciale à Port-Gentil. Objectif : recenser, identifier et accompagner les volontaires au rapatriement tout en réaffirmant la priorité donnée à la sécurité de ses citoyens.

Les populations béninoises au Consulat honoraire du Bénin pour les procédures d’identification et de recensement au rapatriement volontaire, le 3 septembre 2025 à Port-Gentil. © GabonReview
Depuis les années 1970, au lendemain de l’essor pétrolier, le Gabon s’est imposé comme une terre d’opportunités pour de nombreux Ouest-Africains, dont les Béninois. Employés dans le commerce, les services ou la construction, ils ont longtemps profité de meilleures perspectives que dans leur pays d’origine. Mais la crise économique qui secoue le Gabon depuis plusieurs années a inversé la tendance.
Le chômage, particulièrement chez les jeunes, alimente désormais frustrations et tensions sociales. De plus en plus, les travailleurs étrangers sont pointés du doigt, accusés de «prendre les emplois» des nationaux. Ces crispations se sont récemment cristallisées à Lambaréné, dans la province du Moyen-Ogooué, lors de l’attribution de places sur les marchés locaux. Certains commerçants béninois affirment avoir fait l’objet de menaces et d’intimidations.
Une mission spéciale de recensement
Face à cette situation, le ministère béninois des Affaires étrangères a réagi en réaffirmant sa détermination à protéger ses citoyens «en toutes circonstances», tout en rappelant leur obligation de se conformer strictement aux lois du pays d’accueil. Dans la foulée, Cotonou a dépêché à Port-Gentil une mission spéciale, active du 3 au 5 septembre, afin d’identifier et de recenser les volontaires au rapatriement.
«Durant cette période, la mission vise à faciliter diverses formalités relatives à l’état civil», a indiqué Georges Kassavi, Consul honoraire du Bénin à Port-Gentil. L’opération prévoit l’enrôlement au Recensement administratif à vocation d’identification de la population (RAVIP), la mise à jour des données d’état civil et le renouvellement des passeports. Le Consul insiste : «le recensement est gratuit et conditionné uniquement par la présentation d’une pièce d’identité béninoise».
Forte mobilisation à Port-Gentil
Depuis l’annonce, le Consulat honoraire du Bénin, situé dans le quartier Forasol, ne désemplit pas. Pères de famille, mères, enfants et aînés s’y pressent pour accomplir leurs démarches. Pour beaucoup, cette mission est l’occasion de régulariser leur situation administrative, mais aussi de préparer un possible retour au pays.
Au-delà de la logistique, cette opération est perçue comme un geste de solidarité et une réaffirmation de la responsabilité du Bénin envers ses ressortissants. Elle envoie aussi un signal clair : la sécurité des citoyens à l’étranger reste une priorité nationale.
Des enjeux diplomatiques sensibles
Derrière ce déploiement officiel se dessinent toutefois des enjeux diplomatiques majeurs. Le gouvernement béninois cherche à éviter que la situation des commerçants installés au Gabon ne dégénère en crise bilatérale. Cotonou multiplie les gestes d’apaisement tout en maintenant ses protestations face aux difficultés rencontrées par ses ressortissants.
Mais une réalité persiste : malgré les risques, un nombre non négligeable de Béninois continue de regagner le Gabon, attirés par la perspective d’un revenu supérieur à celui offert dans leur pays d’origine.
Entre solidarité et pressions sociales
L’opération de recensement et de rapatriement volontaire illustre ainsi la complexité des migrations régionales. Entre solidarité nationale, pressions sociales internes et impératifs diplomatiques, le Bénin tente de répondre à la fois aux inquiétudes de ses citoyens et aux tensions qui traversent son voisin gabonais. Un exercice d’équilibre délicat, dans un contexte où les crises économiques fragilisent plus que jamais la cohabitation entre communautés.

0 commentaire
Soyez le premier à commenter.