Au seuil des élections à venir, la majorité présidentielle envoie des signaux inquiétants, l’arrivée de l’Union démocratique des bâtisseurs (UDB) ayant modifié les forces au sein du système.

On prend le risque d’un affrontement ouvert avec ses conséquences : chausse-trappes, querelles de personnes, durcissement du discours… [En photo, Jean-Pierre Oyiba (UDB) et Joyce Laffite (RPM)] © GabonReview

 

Au seuil des élections à venir, la majorité présidentielle envoie des signaux inquiétants. Fonctionnant de manière informelle, l’alliance constituée autour de Brice-Clotaire Oligui Nguéma semble à bout de souffle. Si on ne peut pas encore parler d’explosion, tout laisse croire à une implosion, l’arrivée de l’Union démocratique des bâtisseurs (UDB) ayant modifié les forces au sein du système. Se prétendant dominant, ce parti a trop vite sombré dans l’arrogance. En témoigne, la dernière sortie publique du directeur de cabinet de son président-fondateur. «Notre parti détient le pouvoir dont la clé de voûte des institutions», a-t-il lancé. Mieux, Jean-Pierre Oyiba ne tient pas l’UDB pour un parti classique. Il l’assimile plutôt au «candidat plébiscité (…) par l’ensemble des Gabonais le 12 avril dernier». Autrement dit, en son entendement, l’UDB c’est le président de la République et le président de la République c’est l’UDB. Difficile de faire pire dans l’amalgame et la condescendance.

Tentation hégémonique

Comme on pouvait le redouter, la réponse ne s’est pas fait attendre. Cinglante, elle est venue du secrétaire exécutif adjoint chargé de la communication et des relations extérieures du Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM). «Si les candidats UDB sont des anciens PDGistes réformés, nous allons leur rappeler pourquoi nous nous sommes battus (…)», a-t-il grondé. Si Joyce Laffite Ntsegue a aussitôt été suspendu de ses fonctions, le malaise n’en demeure pas moins manifeste. L’ambiance n’est pas encore celle des précédentes législatives, mais elle n’est plus celle de la dernière présidentielle.  Coordinateur provincial de la campagne du Parti démocratique gabonais (PDG) en 2023, coordinateur national de la campagne de Brice-Clotaire Oligui Nguéma en 2025, Jean-Pierre Oyiba est a priori trop madré pour se laisser aller à des glissements de langage. De ce point de vue, son propos ne saurait être pris pour une simple péripétie.

L’affaire Laffite Ntsegue a en réalité eu l’effet d’un révélateur. Depuis la publication de la liste des candidats UDB, la majorité présidentielle tire à hue et à dia. Le RPM a beau rappeler sa disponibilité «à coopérer pleinement», son partenaire semble ne pas avoir besoin d’alliés, mais de vassaux. Il a beau réitérer son appel à «une franche collaboration», l’UDB paraît aveuglé par la tentation hégémonique. Ayant investi des candidats partout, il n’a pas jugé utile de ménager autrui, y compris des figures emblématiques comme Alexandre Barro Chambrier, Paulette Missambo, Raymond Ndong Sima ou Blaise Louembé, condamnés à ferrailler contre des démocrates-bâtisseurs s’ils venaient à faire acte de candidature. C’est dire si l’heure n’est plus à la mutualisation des forces, mais à la démonstration de force. Comme un air de déjà-vu. Comme un retour à cette époque où le PDG traitait les autres soutiens d’Ali Bongo avec mépris, leur intimant l’ordre de se saborder par de fumeuses opérations de fusion-absorption.

Risque d’affrontement ouvert

Même si elle plaidera son extrême jeunesse, l’UDB n’a jamais laissé le sentiment d’être acquis à l’idée de structurer la majorité présidentielle. Tout à sa fierté d’être l’émanation de la volonté du président de la République, elle n’a jamais agi en ce sens. On a certes parlé de contacts entre son secrétaire général et certaines personnalités. Mais, tout cela est resté informel et au milieu du gué. Or, si cette question stratégique n’est pas tranchée, la campagne pourrait prendre des allures de foire d’empoigne. En poussant chaque acteur à faire étalage de sa force, on prend le risque d’un affrontement ouvert avec ses conséquences : chausse-trappes, querelles de personnes, durcissement du discours…  Pour toutes ces raisons, la suite pourrait se révéler infiniment plus compliquée. Faut-il prendre ce risque ? Ne vaut-il pas mieux prévenir ? Faut-il laisser les choses aller d’elles-mêmes ? Voire…

Le mandat du président de la République est encore en phase de lancement. Et l’UDB en pleine structuration. Mais, la majorité semble déjà en péril. En tout cas, son fonctionnement fait débat. Politique voire politicienne, cette question a néanmoins des implications institutionnelles. Au-delà, elle peut avoir une incidence sur la mise en œuvre du programme du gouvernement. Après tout, au lendemain des élections, on aura besoin d’un Parlement fonctionnel, acquis au président de la République certes, mais éloigné des chambres introuvables de ces dernières années. La restauration de l’Etat de droit commence dans les partis politiques.

 
GR
 

1 Commentaire

  1. Maganga Octave dit :

    Sérieusement Oyiba, l’intime d’Ali Bongo, est l’homme de la restauration ? L’UDB est une escroquerie

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