Présent à Libreville dans le cadre de la conférence internationale sur l’intégration régionale en Afrique centrale organisé conjointement avec la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (Ferdi), le président de la Commission de la Cemac a défendu face à la presse l’effectivité de la libre circulation au sein de la Communauté. Il reconnaît toutefois des difficultés, particulièrement pour la circulation des biens. Mais il assure que tout est fait pour y remédier.    

Pr Daniel Ona Ondo, le 28 avril 2022, à Libreville. © Gabonreview

Gabonreview : Vous avez procédé jeudi 28 avril, à Libreville, à l’ouverture d’une conférence internationale sur l’intégration sous-régionale organisée par la Commission de la Cemac et la Ferdi. Quelle est l’importance de cette rencontre au moment où les États de la sous-région de l’Afrique centrale font face à des crises ?

Pr Daniel Ona Ondo : Vous venez de mettre le doigt sur le problème. Aujourd’hui, notre sous-région est effectivement en crise. Je préfère le dire trivialement. Ces crises sont économiques avec la baisse du coût du pétrole, sanitaires avec la pandémie de Covid-19 et sécuritaires avec la guerre en Ukraine. Toutes ces crises, faut-il le rappeler, sont des chocs extérieurs à notre sous-région et elles méritent des réponses adaptées. Nous pensons en effet que l’intégration régionale représente une des réponses adaptées à la résolution de ces différentes crises, pour une raison simple : plus on est nombreux, mieux on se protège. Unis, nous sommes forts, seuls nous ne sommes pas forts ; ceci d’autant plus que ce sont des économies de petite dimension. Il est donc évident qu’on ne peut pas avoir des économies d’échelle. Nous avons intérêt à nous mettre ensemble, c’est pourquoi cette conférence est venue à point nommé, dans un contexte particulier, pour nous rappeler à nos obligations et pour intégrer nos économies.

Le commerce interafricain aujourd’hui, en Afrique centrale, ne représente pas grand-chose. J’ai dit 9% dans mon discours d’ouverture, mais je crois que c’est bien plus faible que ça. Nous devons donc nous mettre au travail.

L’intégration régionale, on en parle depuis plusieurs années, et pas grand-chose ne semble avoir évolué en la matière. Qu’est-ce qui bloque ? Pourquoi ça ne décolle pas, en dépit des instruments mis en place telle que la Zlecaf ? Est-ce par manque de réelle volonté politique de la part des États ?

Vous m’interrogez sur un domaine dans lequel je ne suis malheureusement pas compétent. Mais je suis convaincu que la volonté politique existe, puisque la Cemac a été créée depuis un moment. Il y a indéniablement une volonté politique des États. Mais rappelez-vous que Paris ne s’est pas fait en un jour, je ne pense donc pas que l’Afrique se fera en un jour. Il faut faire plus d’efforts, mais le pari est pris. Nous sommes tous conscients qu’il faut nécessairement l’intégration des États. Nous n’avons pas baissé les bras. Aujourd’hui, dans des pays comme le Gabon, on parle de transformations structurelles, de diversification de l’économie, etc. Je crois que c’est la bonne voie pour sortir nos pays des chocs extérieurs auxquels ils font face comme en ce moment.

Peut-on espérer qu’au terme de cette conférence que l’intégration soit véritablement effective, et particulièrement pour ce qui concerne la libre circulation en zone Cemac ?

La libre circulation est un fait réel aujourd’hui. Quand j’ai été nommé, j’ai eu la chance et l’honneur d’être reçu par le chef de l’État gabonais qui à l’époque était un peu opposé à la libre circulation. Mais désormais, il est totalement d’accord. Tous les pays ont le passeport Cemac. Or, lorsque vous avez un passeport Cemac, vous êtes libres de circuler dans la zone. Hier encore [mercredi 27 avril 2022, NDLR] j’étais à la direction générale de la Documentation et de l’Immigration (DGDI) pour aller voir le spécimen de ce passeport. C’est pour dire que tout est en place, les outils sont en voie de conception.

Mais naturellement, quand on dit « libre circulation », ça ne veut pas dire « libre installation ». Ce n’est pas non plus l’abbaye de Thélème où l’on fait ce qu’on veut. La libre circulation répond à des règles qu’il faut respecter. Et l’avantage qu’on a au niveau de la Communauté, c’est que lorsqu’une règle supranationale est prise, celle-ci s’impose à tous les États. C’est vrai qu’il y a encore des progrès à faire, mais nous faisons des efforts. Un exemple personnel : j’ai récemment fait le corridor Yaoundé-Douala-Libreville, c’est impossible de circuler. Les gens qui ont des marchandises rencontrent effectivement des problèmes, mais nous travaillons pour qu’il y ait moins d’obstacles à la circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes. C’est un travail de longue haleine.

Est-ce une promesse que vous nous faites ?

Ce n’est pas une promesse, mais un fait : il y a libre circulation en Cemac. La volonté politique existe, j’en ai la preuve à chaque fois que je rencontre les chefs d’État. Ce sont d’ailleurs ces mêmes dirigeants qui ont décidé de la mise en place de la Cemac. S’ils ne la voulaient pas, il n’y aurait pas eu de Cemac, d’autant plus que la souveraineté nationale est plus importante, mais ils savent que cette institution est importante pour leur développement économique.

Interview réalisée en partenariat avec diverses presses.

 
GR
 

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