Dette : Pierre Duro réactivé, le choix de la continuité ? Une question que se pose l’opinion. Malgré les soupçons de corruption et les doutes sur son expertise ayant entaché sa précédente mission en 2022, Monsieur Duro a été remis à la tête de la taskforce sur les dettes gabonaises par le président de la transition. Une décision controversée pour cet homme de 74 ans, aux relations sulfureuses avec le pouvoir Bongo. Au vu de ses antécédents, de ses relations et des commentaires des médias, est-il vraiment le mieux placé pour cette tâche délicate ?

Malgré un passé controversé, le retour surprenant de Pierre Duro à la tête de la taskforce gabonaise du règlement de la dette. © D.R.

 

Serait-il incontournable ? À 74 ans, sa prétendue expertise est-elle irremplaçable ? Autrement dit, après lui le déluge ? Alors que sa mission comme chef de la taskforce gabonaise sur le règlement de la dette, avait brutalement été interrompue le 10 octobre 2022, il vient d’être remis en selle. Réactivant, en effet, la task-force des dettes intérieure et extérieure, le président de la transition a donné blanc-seing à Pierre Duro. L’homme est pourtant aux antipodes d’une opinion positive du côté des chefs d’entreprise, surtout pas de ceux qu’il avait auditionnés au cours de sa mission antérieure. Et ce n’est pas toujours par dépit, nombreux doutant de son expertise et de ses méthodes.

Infécondité et insatisfaction, soupçons de corruption

Mettant fin à la précédente taskforce sur la dette, en octobre 2020, un courrier du secrétaire général de la présidence de la République démontrait l’infécondité de sa mission et l’insatisfaction quant aux résultats attendus. Largement commentée, notamment par le quotidien L’Union la lettre de licenciement justifiait la décision des hautes autorités de mettre fin à cette taskforce du fait des «nombreux dérapages et récriminations de la part de plusieurs administrations à l’endroit de l’équipe dirigée par l’expert Pierre Duro». Laissant planer des soupçons de corruption à l’encontre de ce dernier, le courrier demandait alors à celui-ci de remettre l’intégralité des rapports d’activité réalisés. Il était alors rappelé à Pierre Duro que le président Ali Bongo voulait «une politique de tolérance zéro à l’égard de la corruption et [demandait] d’être plus que jamais attentifs à toutes formes de pratiques ternissant l’image de notre administration».

Était-il pour ainsi dire, soupçonné de forfaiture ? Était-il une autre victime de la «Young Team» dont le leader, Noureddin Bongo, était le superviseur de la taskforce ? Mais surtout, est-il réellement un prud’homme ? L’arrêté du général de brigade Brice Clotaire Oligui réinstituant la task-force précise, en son article 24, que Pierre Duro et les commissaires «jouissent d’une totale indépendance dans l’exercice de leurs fonctions». L’homme a donc toute la confiance du président de la transition bien qu’il est secondé par le général de brigade aérienne Jean Hilaire Moubamba Maganga.

Collusion avec le «Club de Libreville» et terreur militaire

En tout cas Pierre Duro n’a pas bonne presse. Dans les salons feutrés de Libreville, on glose sur sa proximité avec Henri-Claude Oyima, patron tout aussi incontournable du fameux «Club de Libreville» censé favoriser l’apurement de la dette vis-à-vis du secteur privé. Supposé spécialisé́ dans le BTP, l’une des entreprises de M. Duro a travaillé à l’extension du siège de BGFIbank sur le font de mer de Libreville. Si ce n’est pas de la collision, ça y ressemble fort et cela pourrait brider certains audits.

Lors des auditions de la dernière taskforce, d’ailleurs domiciliée au palais de la présidence, les chefs d’entreprise étaient reçus comme dans un tribunal militaire inquiétant ou terrorisant avec un Pierre Duro trônant devant un chevalet marqué «Doyen» et des militaires armés déployés dans la salle. Audit ou interrogatoire, se demandait-on.

Liens décennaux avec les Bongo

Lié depuis longtemps à la famille Bongo, Pierre Duron peut toujours en faire à sa tête. Il est de notoriété publique que durant les années 1990, il a collaboré en tant qu’ingénieur-conseil lors de la construction du Palais du Bord de Mer sous la gouvernance d’Omar Bongo, en association avec l’Atelier 74. Cette entreprise a été par la suite suspectée de blanchiment d’argent dans l’affaire des «biens mal acquis».

Il est également connu, de plus, que Pierre Duro a joué le rôle d’intermédiaire pour l’homme d’affaires catalan Jordi Pujol Ferrusola, connu pour sa participation dans un scandale de fraude fiscale et de blanchiment d’argent. Duro et son cousin auraient reçu des commissions pour avoir facilité l’entrée de Pujol au Gabon. Les deux avaient fini par être convoqués par la justice espagnole à ce sujet.

Face à ces relations controversées, des questions se posent quant à la pertinence de maintenir Pierre Duro au sein de la taskforce traitant de la dette gabonaise. Ses compétences sont ainsi contestées, et certains pensent qu’une figure plus neutre aurait été plus appropriée.

 
GR
 

1 Commentaire

  1. Akoma Mba dit :

    Au Gabon des Bongo on n’avait pas besoin d’être un expert mais plutôt ÊTRE la VOIX DE SON MAÎTRE.
    Laissons ce Monsieur faire du bon travail sous la stricte vigilance des militaires et vivement que les dettes soient apurées.

    Reconnaissons aussi que le gabonais partout où on l’a placé, ils ont volé et nous autres là qui ne volions pas on nous a mis à l’écart pendant des dizaines et dizaines d’années pour ne pas géner.Au boulot et comme dirait Kool and the Gang, « Get down on it, get down on it if you really want it ».

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