Après cinq ans d’absence, Ika Rosira, la   muse pamphlétaire de GabonReview, revient dans l’arène médiatique, crayon affuté et verve acerbe. Telle une panthère lâchée dans une jungle de non-dits, la chroniqueuse épingle sans détour les errances du «Gabon des Bongo», cette «corruption économique, mentale et spirituelle» dont elle exhume les relents nauséabonds. C’est tout un système «pervers et morbide» qu’elle charge à pleines griffes. Mais dans le sillage de la clameur populaire, pointe déjà l’aube tant espérée d’une renaissance…

© GabonReview

 

Cinq années viennent de s’écouler depuis ma dernière assertion. On m’a dit récemment qu’il était temps que je parle des temps que nous vivons, des tribulations par lesquelles nous sommes passées et par lesquelles nous passons. On m’a dit qu’il était temps de récupérer le crayon que j’avais rangé dans un tiroir, refusant de m’exposer davantage à la perfidie des uns et des autres.

On m’a dit de parler de notre récente et collective allégresse et de rappeler aux gens qui ont coupé la tête du serpent que la guerre des idées et des idéaux, la guerre contre les mentalités rétrogrades et la guerre contre les malversations, est impitoyable.

De rappeler aux gens qui souhaitent et font tout leur possible pour faire repousser la tête du serpent qu’il est peut-être temps de capituler une bonne fois pour toutes et de «réaliser» dès maintenant que nous ne pouvons et ne voulons pas reculer, que le passé doit appartenir au passé et que c’est le moment idéal pour donner le meilleur de soi à une terre mal-aimée, exploitée et souillée par une corruption économique, mentale et spirituelle qui ne dit pas son nom.

On ne le dira pas assez. On devra le répéter encore et encore. On devra trouver les mots justes pour décrier les maux qui rongent et minent encore notre Eldorado. On devra se battre comme des panthères, des éléphants et des buffles pour saccager les pensées limitantes qui nous empêchent d’entrevoir une issue favorable au progrès dans les événements qui ont précédé et succédé le coup d’État du 30 août dernier.

On a tous halluciné pour la plupart. Nous, les citoyens lambda éparpillés à travers le Gabon et le monde en constatant que l’impensable et l’improbable pouvaient enfanter d’une telle grâce. Le peuple gabonais à l’agonie et suffoquant, en déni total de son potentiel économique, a reçu un électrochoc. Il peut revoir sa couronne.

Le Gabon des Bongo a été libéré par le Général Oligui et ses complices depuis exactement 101 jours. Ça c’est les faits tels qu’on devrait en prendre conscience.

Même si certains s’amusent à dénigrer cette merveilleuse histoire qui s’écrit en toutes langues, sans l’encre d’une goutte d’hémoglobine, ces 101 journées de gloire gabonaise sont attribuées au CTRI (Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions) et à nul autre.

Pourtant, malgré leurs efforts surhumains, les dissidences se dessinent : «l’Homme pressé» trouve que les situations pathologiques du Gabon devraient se régler d’un coup de baguette magique. Nous ne sommes pas dans des contes de fées hollywoodiens, nous sommes à l’aube du crépuscule d’un système pervers et morbide.

Comme si une main invisible avait fait de nous des marionnettes éternelles-observatrices, incapables de poser des actes qui contribueront à un changement capital, qui n’est pas conçu dans l’esprit des gens qui excrémentent dans la tête de la plupart de ceux qui font l’erreur de leur accorder une quelconque importance.

Il est temps de crier à l’aide, de crier au secours, de refuser de se laisser faire ou abattre parce que les gens de pouvoir se prennent à nouveau pour des Dieux ou des demi-dieux. Pour ceux qui ouvrent des portes dont on peut se passer de serrures.

Va-t-on refaire les mêmes erreurs que le système ayant maintenu la majorité du peuple dans la disette ou se dépêcher d’insérer dans cette transition accueillie avec toute la bienveillance enfouie au fond de nous, la fibre patriotique dans chacune de nos responsabilités?

On a assisté à une distribution massive de statuts politiques et économiques redoutable. Certains gens au pouvoir jadis sont simplement devenus ordinaires pour la plupart, même si leur patrimoine accumulé frôle le déshonneur. Tandis que certains caciques ont réussi à se faire une place de choix dans les décombres d’un système qui refuse obstinément de s’effondrer. Beaucoup de fausses rumeurs, beaucoup de règlements de compte, beaucoup trop de bassesses dans le milieu politique, professionnel et même entrepreneurial salissent la grâce à laquelle nous avons accédé en gros Titres.

Oui, on enferme des voleurs de vies, de rêves et de sommes intolérables. Oui, on réforme et reconduit des mesures qui en valent la peine, mais les vices de procédures et les vides juridiques sont élastiques et certaines personnes (qui ne méritent leurs postes budgétaires qu’à cause de leurs affinités) perpétuent, à leur échelle, le système qu’on essaye d’abolir… et c’est troublant à souhait.

Je voudrais m’adresser à nos super-héros. Ce n’est pas pour contenter tout le monde et créer un climat de fausses considérations et de mesquineries intempestives que vous êtes en mission. Votre véritable mission, c’est de redresser les torts accumulés depuis des décennies. Votre permissive mission est de rétablir la Vérité et la Vie, de réécrire l’histoire de ce pays avec des lettres magnanimes.

Je veux dire à ceux qui réfléchissent encore au singulier ou souvent même aux différents mécanismes à mettre en place pour surfacturer encore, brimer encore les libertés individuelles et collectives, spolier encore les méritants et surtout briser des vies, des rêves et des projets porteurs et innovants qu’il est temps de «transitionner» enfin leurs mentalités obscurantistes.

La Félicité prônée depuis kala-kala est synonyme d’euphorie, de bonheur, de nirvana et d’absolue béatitude. On n’accède pas à un trône sans porter une couronne invisible à l’œil nu sur la tête. Laissez-nous récupérer nos couronnes !

 
GR
 

5 Commentaires

  1. DesireNGUEMANZONG dit :

    Bonsoir IKA Rosira,

    Je « kiffe » ton texte!

    Je t’encourage à saigner ta plume et à nous abreuver de ton « Ogooué » de sensibilité.

    Cordialement!

  2. issiane dit :

    C’est tout a fait vrai,il faut reetablir la verite ,redresser les tors que ce pouvoir defunt nous a fait subir ,moi ,personnellement,j’ai vecu 14 ans de chomage injustifie alors qu’en 2009,j’obtenais une maitrise en droit obtenu de haute lutte a l’Universite Omar Bongo car a’l’epoque, le systeme ELMD n’existait pas.Avec l’avenement de ce pouvoir,certains de mes condisciples soutenaient qu’un enfant de l’ancien president serait le candidat ideal a la reprise du ppouvoir car ce dernier n’aurait pas le meme appetit de l’argent qu’un quidam mais qu’est ce que nous avons vecu?

    • DesireNGUEMANZONG dit :

      Bonjour Issiane

      Comme vous, je suis passé par l’Université de Libreville. J’y ai effectué quatre ans d’études au début des années 1990. Puis j’ai migré (pour d’autres études) en Europe d’où je vous écris.

      « … 14 ans de chômage ». A peine croyable! L’Université de Libreville serait-il devenu une fabrique à chômeurs (chômeuses)? Triste réalité en tout cas. On ne peut pas sortir avec une maîtrise en Droit ou autre et aller pointer au Pôle emploi durant quatorze ans. C’est comme effectuer une peine de prison incompressible. Un séjour dans le froid glacial d’un goulag soviétique! Ce régime, depuis 2009, a commis un crime contre l’intelligente. Le « génocide intellectuel » est un crime contre l’humanité. Par ailleurs se pose le problème du financement de votre retraite. Si vous n’avez pas travaillé, alors votre retraite ne sera pas assurée.

      Toute compte fait, vous êtes une femme courageuse et résiliente. J’espère que vous connaitrez « l’essor vers la félicité » devenu le but ultime de tout.e gabonais.e digne de ce nom.

      Je vous souhaite une bonne continuation en espérant vous lire prochainement. En supposant que vous êtes l’auteure de ce pamphlet.

      Cordialement.

    • Ika Rosira dit :

      Merci pour ce commentaire

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