Pour la première fois, une délégation gabonaise a fait entendre la voix des communautés traditionnelles lors de la plus grande conférence mondiale sur les psychédéliques. L’ONG Blessings of The Forest a porté un message fort à Denver : derrière l’iboga, plante sacrée aujourd’hui étudiée par la science occidentale, se trouvent des peuples et des savoirs ancestraux qui exigent reconnaissance et respect. Entre dénonciation de la biopiraterie et appel à la réciprocité, le Gabon revendique désormais sa place dans les débats internationaux sur l’avenir des médecines psychédéliques.

Derrière chaque racine d’iboga se trouvent des peuples, des rituels, des blessures partagées — le Gabon rappelle que toute médecine durable doit intégrer ces vérités. © D.R.

 

L’ONG gabonaise Blessings of The Forest (BOTF) a marqué de sa présence la prestigieuse conférence internationale Psychedelic Science 2025, organisée par la Multidisciplinary Association for Psychedelic Studies (MAPS). Cet événement majeur, le plus grand rassemblement mondial dédié aux recherches et applications des psychédéliques, a réuni des scientifiques, cliniciens, décideurs politiques, peuples autochtones, ONG et vétérans du monde entier autour de nouvelles perspectives de soins intégrant les substances psychédéliques.

Instantanés de la conférence internationale Psychedelic Science 2025, dont Yann Guignon, président-fondateur de BOTF et médiateur interculturel franco-gabonais (sur les écrans – photo du milieu) et le panel dans lequel Me Henri Paul Moubeyi Bouale, Directeur principal de l’Association Nationale Maghanga Ma Nzambe, a livré une importante déclaration. © D.R.

Cette année, l’Iboga et le Gabon ont occupé une place centrale dans les discussions, grâce à la participation remarquée de BOTF et de ses représentants au sein de la délégation du Fond de Conservation des Médecines Indigènes (IMCF). Une série d’interventions historiques a permis de porter haut la voix des communautés gabonaises, détentrices d’un savoir ancestral en péril.

La voix des traditionalistes portée à l’international

BOTF a eu l’honneur de diffuser, en ouverture de panel, le plaidoyer de Maître Henri Paul Moubeyi Bouale, Directeur principal de l’Association Nationale Maghanga Ma Nzambe. Dans un discours poignant, il a dénoncé la biopiraterie, l’effacement culturel et l’exploitation non encadrée de l’iboga, tout en appelant à une coopération internationale fondée sur le Protocole de Nagoya et la reconnaissance du Gabon comme berceau spirituel de cette plante-médecine. Sa voix a su créer un pont entre la sagesse traditionnelle africaine et les attentes de la recherche scientifique moderne.

Un témoignage intergénérationnel et juridique

Le Secrétaire Général de BOTF-Gabon, Georges Gassita, juriste de l’environnement et petit-fils du regretté Pr. Jean Noël Gassita, pionnier de la recherche sur l’iboga, a pris la parole pour rappeler l’histoire de cette ressource sacrée et les dérives de sa marchandisation à l’étranger. Il a retracé les moments-clés de la diplomatie scientifique gabonaise, depuis le don historique de 40 kg d’iboga aux États-Unis jusqu’au combat contemporain pour la reconnaissance et la souveraineté culturelle du Gabon.

Un message d’union et de réciprocité

Enfin, Yann Guignon, président-fondateur de BOTF et médiateur interculturel franco-gabonais, a conclu ce moment fort en appelant à une co-évolution thérapeutique et culturelle entre l’Afrique et l’Occident. Dans un discours intitulé « Du traumatisme à la réciprocité », il a rappelé que l’ibogaïne ne pouvait être réduite à une molécule décontextualisée. Derrière chaque racine d’iboga se trouvent des peuples, des rituels, des blessures partagées — autant de vérités que toute médecine durable doit intégrer.

« Si vous voulez vraiment guérir le monde, il vous faudra commencer par ne pas reproduire ce qui l’a blessé », a-t-il déclaré sous les applaudissements.

Avec cette participation collective inédite, le Gabon ne se contente plus d’être une terre d’origine de l’iboga. Il devient une voix incontournable dans les débats internationaux sur l’avenir des médecines psychédéliques et la justice cognitive.

BOTF réaffirme son engagement à faire respecter les droits culturels des peuples racines, à promouvoir des filières éthiques et durables, et à construire des ponts entre savoirs traditionnels et recherche scientifique.

En vidéo, la déclaration Maitre Moubeyi Bouale / ONG Maghanga Ma Nzambé / Conférence PS25 / Denver/USA -Juin 2025

 
GR
 

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