En plein cœur d’Octobre Rose, mois de mobilisation mondiale contre le cancer du sein, une préoccupation demeure : la réticence de nombreuses femmes au dépistage chez . Malgré la gratuité de l’acte et les chances de guérison accrues par une détection précoce, la peur, le manque de temps ou les préjugés sociaux maintiennent un taux de participation inférieur aux objectifs. Au Gabon, le personnel de santé propose d’adopter le mois d’anniversaire comme repère annuel pour le dépistage.

Au Gabon, le personnel de santé propose d’adopter le mois d’anniversaire comme repère annuel pour le dépistage face à la réticence des femmes. © GabonReview

 

Les raisons de la non-participation au dépistage sont multiples et souvent profondément personnelles. Une enquête de l’Institut national du cancer (INCa) identifiait déjà des freins persistants il y a plusieurs années ; les témoignages d’aujourd’hui confirment leur actualité. Au Gabon, pour briser ces barrières, une approche innovante a été suggérée par le corps médical. Il s’agit de l’adoption du mois d’anniversaire comme repère annuel pour le dépistage. Au cours d’une campagne de sensibilisation à Owendo, la Docteure Carine Ovono est revenue sur la nécessité d’un dépistage précoce chez la femme.

Mais quelle est l’origine de cette réticence chez les femmes alors même que l’acte est gratuit ? Entre le poids de la peur et celui des préjugés, la question semble encore être un tabou pour beaucoup. «Chaque année, on m’invite à me faire dépister et, chaque année, je renonce. La peur de savoir est plus forte. Je me dis : ‘Tant que je ne sais pas, je suis en bonne santé.’ C’est irrationnel, je le sais, mais l’idée du diagnostic me paralyse. Et puis, il y a la honte. Si on m’annonce un cancer, j’ai peur de ce que les gens penseront, d’être vue comme malade», confie Noelle C.E, 42 ans.

La peur, qu’elle soit celle de la maladie elle-même, des traitements lourds, ou même du jugement d’autrui, est un puissant moteur d’évitement. D’autres évoquent le manque de temps, le fait d’avoir allaité, ou le sentiment de ne pas être concernées en menant une vie saine. «Je suis une maman de neuf enfants, et je ne pense pas que cela soit nécessaire pour moi». Elle précise qu’elle aurait entendu au quartier qu’enfanter protège la femme du cancer du sein. «Je sais que je ne suis pas malade, il n’y a qu’à regarder mes neuf enfants; donc, je ne crois pas nécessaire de le faire», précise une maman au centre médical de l’ENIL. Entre méconnaissance et fausse information, il semblerait que les campagnes de sensibilisations doivent être élargies aux seuils mêmes des habitations, surtout auprès des mères âgées.

Une nouvelle stratégie : le dépistage anniversaire

Face à la difficulté de faire du dépistage une priorité régulière, le Dr Ovono a souligné qu’il est important pour la femme de lier cet acte essentiel à un événement personnel et facilement mémorisable, comme le mois de naissance.

D’après elle, l’idée est simple, elle explique que, plutôt que de repousser indéfiniment un rendez-vous perçu comme anxiogène, pourquoi ne pas l’associer à une date personnelle et significative ? Le dépistage devient alors un cadeau de santé que l’on s’offre à soi-même, une fois par an. «Le dépistage ne doit pas être pris avec crainte, car c’est avant tout un moyen de prévention efficace, que ce soit pour le cancer du sein ou du col de l’utérus. En liant l’examen à la date d’anniversaire, nous faisons de la prévention un rituel annuel. C’est une façon de dire : ‘Je prends soin de moi, je célèbre ma vie en m’assurant de la préserver.’ Cela enlève le côté ‘urgence’ ou ‘anxiété’ pour le transformer en un geste de routine, un acte d’amour envers soi».

Cette approche pourrait particulièrement résonner auprès des femmes pour qui l’agenda chargé (enfants, travail, autres priorités) est un obstacle majeur. Un rappel annuel basé sur une date personnelle s’avère souvent plus efficace que les campagnes de masse. Ainsi, l’initiative des agents de santé et l’énergie d’Octobre Rose rappellent qu’il est temps de transformer la peur en force et l’évitement en engagement. Se faire dépister, c’est choisir la vie et se donner toutes les chances de la célébrer longtemps.

Thécia Nyomba (Stagiaire)

 
GR
 

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