Invité à se faire auditionner à l’Assemblée nationale dans le cadre de l’examen du projet de loi portant modification du Code civil en République gabonaise, Me Louis Gaston Mayila regrette l’absence d’un exposé de motifs des législateurs. Les modifications envisagées ne s’appuient-elles donc sur aucune réalité ? Invitant les parlementaires à prendre leur travail au sérieux et associer à l’avenir ceux qui ont l’expérience requise, Louis Gaston Mayila livre une petite leçon d’archéologie du droit gabonais de la famille.

Regrettant l’absence de raisons soutenant les modifications actuelles du Code civil, Me Louis Gaston Mayila remonte aux fondements du droit gabonais de la famille en passant par les décrets Mandel et Jacquinot. © Gabonreview

 

Au Gabon, la modification envisagée du Code civil reste d’actualité. Si une bonne partie de l’opinion estime que le texte passera comme une lettre à la poste, au Parlement les auditions se tiennent, notamment à l’Assemblée nationale. Invité à participer à cet exercice, Me Louis Gaston Mayila a exprimé sa désolation. «Dans le dossier qui m’a été envoyé, j’ai eu un document sur les articles annulés, un document sur les nouvelles propositions objets des lois précitées et une liste des questions des honorables députés. Je suis resté sur ma faim, car il manque un document fondamental : l’exposé des motifs», a-t-il dit, dénonçant l’absence des raisons qui expliqueraient le changement des dispositions en vigueur.

Affirmant que vouloir renverser les préjugés et les règles d’une morale étriquée et être enfin soi-même n’est pas nécessairement mauvais, l’homme de loi et homme politique rappelle qu’au Gabon chaque fois que la famille a été touchée, les conséquences ont été vécues très longtemps. Il a en mémoire la suppression de la dot par le président Léon Mba. «Mais dans l’exposé des motifs de cette loi, le législateur a expliqué les raisons qui l’ont amené à proposer ce changement : la brutalité des hommes, le fait de considérer la femme comme une marchandise qu’on a acheté et qui devient corvéable à merci. Dans un pays où l’esclavage a fait tant de dommages, verser une grande somme pour avoir la main d’une femme, revient à donner au mari le sentiment de l’avoir achetée et le droit de faire de son achat ce qu’il veut», a-t-il expliqué.

Des modifications sans fondement ?

Si cette législation a été battue en brèche au regard des traditions, us et coutumes et même de l’église qui, dit-il, est venue remplacer, par une nouvelle autorité morale, les règles qui régissent le mariage, Louis Gaston Mayila met en exergue le fait qu’il y avait bien un exposé de motifs. Ce qui ne serait pas le cas dans le cadre du projet soumis à son appréciation. «Mon regret est de ne pas trouver en face de chaque article supprimé, les raisons qui amènent la nouvelle rédaction, c’est-à-dire la nouvelle loi qui désormais va régir la matière», a-t-il regretté. «Une des raisons est de vouloir normer une situation, mais la condition est d’expliquer en quoi la nouvelle norme est-elle supérieure à la norme proposée à la suppression, en quoi la disposition proposée à la suppression est-elle nuisible ou cause des dommages aux citoyens assujettis à cette loi», a-t-il insisté.

Rappelant le fondement du droit gabonais de la famille, Louis Gaston Mayila assure «dans son ensemble ce droit peut être considéré comme tourné vers son passé, faisant la part belle à la tradition et en même temps s’orienter vers l’avenir, le futur pour échapper à un passé considéré comme rétrograde. Tel que présenté ce droit peut apparaître tantôt inégalitaire, tantôt égalitaire». Pour lui, l’origine des inégalités en droit de la famille est à rechercher dans la famille d’essence coutumière contrairement à la famille occidentale de type nucléaire. Selon lui, la famille gabonaise était régie par un statut personnel s’appliquant aux effets et à la dissolution du mariage. Un «statut personnel était défavorable aux femmes, notamment sur les questions liées à l’âge matrimonial et à la polygamie», a-t-il souligné signifiant qu’avec l’abandon progressif du statut personnel et des institutions familiales traditionnelles le pays va tendre vers les prémices d’un visage égalitaire.

Corriger la nouvelle orientation du droit gabonais de la famille

Louis Gaston Mayila, cite à juste titre, les décrets Mandel et Jacquinot qui interdisent le mariage avec une jeune fille à naître ou impubère et exigent que la femme donne désormais son consentement au mariage. A en croire son propos, les deux parties du Code civil n’ont pas pu parfaire cette égalité. Il estime de fait que c’est cette nouvelle orientation caractéristique du droit gabonais de la famille qu’il convient de corriger, en le concevant désormais à partir d’un principe général d’égalité dans les rapports familiaux, en prenant en compte les valeurs sociales profondes et traditionnelles, la Constitution et les engagements internationaux du Gabon. «Et c’est justement ce qui peut justifier la présente modification de certains articles du code civil et du code pénal», s’est-il exprimé.

«A l’avenir, une révision aussi importante des textes fondamentaux tels que le Code civil et le Code pénal, devrait être préparée par une Commission au sein de laquelle on trouverait des juristes bien entendu, des anthropologues, des sociologues, ainsi que des diplômés de l’école de la vie c’est-à-dire ceux qui ont l’âge et l’expérience requis», a conseillé Louis Gaston Mayila. «La politique quand c’est un art et non une exploitation, est une action au service d’un idéal à travers des réalités», a-t-il conclu.

 
GR
 

2 Commentaires

  1. Fiacre dit :

    Mayila est est instruit, mais pas intelligent. Il est plutôt rusé comme les Bongo.

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