Le général Brice Clotaire Oligui Nguema est attendu en France pour sa première visite officielle, le 28 mai. Une visite de près d’une semaine qui, pour Jonathan Ndoutoume Ngome et Amour Nziengui Mombo*, spécialistes en géopolitique, comporte plusieurs enjeux au moment où l’ancien colon perd de plus en plus de sa superbe en Afrique. Dans la tribune ci-après, les deux auteurs expliquent le bien-fondé de cette visite qui, espèrent-ils, affranchira le président de la Transition du Gabon de l’idée que se font les africanistes de lui.

Le président de la Transition au Gabon, Brice Clotaire Oligui Nguema, et le président Emmanuel Macron, le 1er décembre 2023 à Dubaï. © D.R.

 

Dans quelques jours, le Président de la Transition, Président de la République, Chef de l’État, le Général Brice Clotaire Oligui Nguema, se rendra à Paris pour une visite d’État.

Cette visite officielle du Chef de l’État gabonais dans l’hexagone intervient au moment où la France perd en influence en Afrique. Cette situation affecte désormais sa perception en tant que puissance moyenne, non seulement aux yeux des pays influents, émergents, mais aussi aux yeux de ses anciennes colonies, lesquelles ont opté pour une diversification de leurs partenaires internationaux.

C’est donc une visite qui comporte de nombreux enjeux aussi bien sur le plan géopolitique et diplomatique, que sur les plans géostratégique et économique.

Au plan géopolitique et diplomatique, les vulnérabilités de gouvernance et la résurgence des coups d’État en Afrique francophone ces derniers temps inquiètent sérieusement la France, qui est priée de plier bagage dans certains pays (Mali, Burkina Faso, Niger), ce à l’heure où s’activent plus que jamais, sur ce continent crucial pour l’avenir du monde, les grandes puissances de la guerre froide (Russie, Etats-Unis), des acteurs puissants comme la Chine, l’Inde et les Émirats, ainsi que la Turquie.

Dans ce contexte, comment Paris peut-il tirer son épingle du jeu alors que monte, de Bamako à Kinshasa, un sentiment antifrançais nourri par l’héritage colonial et les égarements politiques, aujourd’hui surtout attisés par le discours des militaires au pouvoir et par la propagande de la Russie ?

La France qui est membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies tient son influence aussi par le nombre de voix que lui apportent les pays d’Afrique francophone. Or, il ne serait nullement opportun que Paris abandonne ses anciennes colonies dans l’instabilité politique et sécuritaire à cause des décisions populistes de certains États africains qui pensent que sans la France, ils se porteraient mieux politiquement, économiquement et militairement.

Après le délitement des relations diplomatiques entre Paris et Libreville suite à son adhésion au Commonwealth, le Gabon s’était quelque peu rapproché des Britanniques et des Américains. Cette position s’était également consolidée avec la condamnation du coup de libération du 30 aout 2023 par la France. Seulement, les premiers traités datent de la fin des années 1830, quand la plupart des colonies françaises remontent aux années 1880. Le Gabon est considéré comme une vieille colonie, ce qui explique le lien particulier avec la France. Raison pour laquelle, le Gabon ne peut pas suivre cette voix. C’est pourquoi, la visite de Brice Clotaire Oligui Nguema à Paris apparaît comme un signe de souplesse diplomatique.

En effet, de tous les pays francophones d’Afrique qui ont enregistré les coups d’État ces derniers temps (Mali, Burkina Faso, Guinée, Niger, Gabon), le Chef de l’État gabonais est le premier et le seul, pour l’instant, à se rendre en France pour une visite officielle. Cela peut s’expliquer, entre autres, par le fait que le Général Oligui Nguema soit le seul à décliner clairement et à exécuter un chronogramme de Transition, ce qui crédibilise le CTRI et rassure la communauté internationale.

Sur le plan géostratégique, le président Oligui Nguema pourrait apporter dans ses chemises, le dossier de la présence militaire française du Camp de Gaulle à Libreville, consécutif à l’annonce faite par Emmanuel Macron de réduire les effectifs dans les bases militaires françaises en Afrique, les positions au Gabon sont divergentes entre celles qui demandent le départ des militaires français et celles qui sont favorables à l’idée de renforcer les effectifs de la base militaire du Camp de Gaulle.

En effet, si Emmanuel Macron avait annoncé, le 27 février 2023, la réorientation de la politique sécuritaire de la France en Afrique à travers, entre autres, la réduction des effectifs dans les bases militaires françaises sur le continent, le Président Oligui pourrait demander à la France de tenir compte d’un certain nombre de facteurs spécifiques à notre pays. Il y a nécessité de renforcer ou de maintenir les effectifs de la base militaire du Camp de Gaulle et non de les diminuer ou de les démobiliser totalement.

Certains facteurs justifient cette approche. Les intérêts occidentaux sont colossaux en Afrique centrale. Ils méritent une meilleure sécurisation que les armées africaines ne peuvent assurer. Par exemple, la production pétrolière et gazière est essentiellement offshore dans le golfe de Guinée. Les plateformes pétrolières maritimes qui étaient autrefois à l’abri des instabilités continentales constituent depuis plusieurs années la cible de la piraterie et du brigandage maritimes. Il y a donc nécessité de maintenir une force militaire de dissuasion capable d’intervenir à partir du Gabon, en cas d’attaque des structures économiques dans le golfe de Guinée.

Par ailleurs, après l’annulation de l’installation des radars électroniques à Sao Tomé et Principe par les États Unis d’Amérique, ce sont les forces armées russes qui viennent de trouver un point d’appui dans le golfe de Guinée, en scellant un accord de coopération militaire avec Sao Tomé-et-Principe, ce qui constitue au plus au point une préoccupation sécuritaire pour les Occidentaux.

Sur le plan de la coopération économique, le Chef de l’État gabonais ne manquera pas d’évoquer la question des accords de coopération entre le Gabon et la France, dont la la révision a été fortement recommandée par le Dialogue National Inclusif d’avril dernier.

Il faut reconnaître que les accords entre la France et ses anciennes colonies sont largement dénoncés par l’opinion publique africaine tout comme le maintien du Franc CFA dans les pays d’Afrique francophone de l’ouest et du centre.

Au total, si la visite de Brice Clotaire Oligui Nguema à Paris apparaît comme un signe de souplesse diplomatique à l’égard du CTRI par la France, le Chef de l’État gabonais devrait profiter de ses entretiens avec les autorités françaises, en tête desquelles Emmanuel Macron, pour placer les intérêts et la souveraineté du Gabon au centre des priorités afin de démentir une certaine opinion qui considère Brice Clotaire Oligui Nguema comme un nouveau pion de la Françafrique.

*Jonathan Ndoutoume Ngome (Docteur en géopolitique et géostratégie, Maître-assistant CAMES des Facultés)

*Amour Nziengui Mombo (Doctorant en géopolitique et géoéconomie)

 
GR
 

4 Commentaires

  1. Nathan Dzime dit :

    Et encore des petits larbins pour caresser dans le sens du poil quitte à donner au Chef des idées erronées et hors d’âge, dans le seul but de grappiller un poste! Pouah!

    Le travail de décolonisation mentale n’est vraiment pas encore entamé. Voici un exemple patent d’un pseudo intellectuel souffrant du « Syndrome de Stockholm « !: ne réfléchit pas pour les intérêts exclusifs de son pays d’abord, mais bien pour que le colon se sente bien chez nous.

    Un cas typique de personnes bardées de diplômes, mais à qui l’enseignement n’a rien apporté dans l’intérêt de son pays, si ce n’est un peu plus de servitude.
    En même temps c’est normal, quand on se purge à longueur de journée avec du Kant, Descartes, Engels et autre Eidegger ou Tolstoï…tout idée qui vient du colon quoi!

    Allez-y, encore un peu plus d’armées étrangère, et pas d’armées nationale…Allez-y pour une ingérence étrangère plus forte dans le cours de vie de notre pays, afin que vous, larbins, existez!

    Patriotiquement Vôtre !

  2. Rembourakinda dit :

    Je suis désolé, mais un putschiste n’a pas à fouler le sol français. Honte à Mr Macron. Vous êtes bien gentils de venir nous soûler avec votre géopolitique à deux balles, les présidents africains ne sont pas à la hauteur, et donc ne font rien pour régler les problèmes des populations. Beaucoup de migrants pauvres se retrouvent en Europe, les européens manifestent de plus en plus leur refus de se voir envahir par des africains. Et vous avez le culot de venir blablater, juste pour vous faire remarquer, et donc obtenir un poste. O. Nguema n’est pas l’homme de la situation, plus vite il partira, mieux se sera. Il faut de coloniser nos pays, sortir du cfa, mettre à la place qu’il faut, la femme ou l’homme qu’il faut. Il y a des compétents parmi nous, mais seuls les médiocres squattent les postes, avec la bénédiction de la France.

  3. Michel Matha dit :

    Honte a la france desavouer dans louest de l’afrique cherche deliberament un pont d’encrage. Tous les militaires pushistes sont des hors la loi.

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