[Tribune] Ces dérives covidiennes
Publié sur Facebook vendredi dernier, un texte de l’économiste émérite et ancien Premier ministre, Raymond Ndong Sima, pose un regard froid sur la gestion par les autorités gabonaises de la pandémie du Covid-19 : parallèle absurde avec l’évolution des choses en France, échec et disparition du filet social mis en place au début ; occultation ou ignorance d’autres maladies plus meurtrières dans le pays ; arguments d’autorité sur les chiffres et la permanence de l’état d’urgence, et surtout maintien de mesures qui «font plus mal à la population que la maladie elle-même». Ci-après, l’intégralité de ce texte que les ‘’professionnels de la peur’’ vont snober, préférant la politique de l’autruche.
Il y a quelque chose de gênant, de profondément malsain, intellectuellement très discutable, presque obscène, dans la gestion de la covid-19 au Gabon depuis plusieurs mois.
Organisée autour d’une peur entretenue, l’information sur cette pandémie distribuée pour faire la preuve de son existence et justifier des mesures dont on peut désormais se demander si elles ne font pas plus mal à la population que la maladie elle-même.
Le gouvernement impose des mesures qu’une analyse objective des faits peinerait à justifier.
La France par laquelle nous respirons et qui compte 66 millions d’habitants dénombre plus de 36 000 morts. Le Gabon avec 2 millions d’habitants soit 33 fois moins que la France compte désormais 60 morts. Toutes choses égales par ailleurs, on devrait compter au Gabon, pour nous comparer à la France, 1.090 morts.
60 morts ce n’est pas peu mais tout de même, c’est 18 fois moins que ce qui nous mettrait au même niveau que la France. Mais en France, justement parce que c’est un problème de santé publique, le test est resté gratuit pour toute personne présente sur le territoire français.
La suppression de la gratuité du test dans un pays où tout se monnaie est une incitation directe à la corruption. Entretemps, les aides annoncées à grands renforts de publicité comme le “riz-covid”, les factures d’électricité, le paiement des loyers, ont disparu mais le couvre-feu persiste avec son cortège de restrictions dans les déplacements entre les provinces. Le portefeuille des gabonais n’augmente pas mais tous les jours des dépenses nouvelles sont ajoutées aux familles et surtout celles qui sont déjà en difficulté.
On annonce des chiffres en les détachant soigneusement des autres statistiques de santé publique et c’est sans la moindre pudeur intellectuelle qu’on annonce un accroissement des cas de covid-19 en un mois sans préciser dans le même temps la population totale sur laquelle ces tests ont porté et les chiffres analogues pour d’autres maladies dans notre pays.
Quelle est la population totale testée mensuellement et sur quelle période s’appuie-t-on pour tirer des conclusions statistiquement pertinentes. Sur cette période, combien de cas de cancer, de diabète, d’AVC etc. a-t-on enregistré dans notre pays ? Ou bien faut-il comprendre que le paludisme, qui jusque-là était en tête des maladies qui décimaient notre population, a fui devant la covid-19 ? Et le Sida, si on suit bien l’information qui nous est distillée, aurait donc été vaincu ou à tout le moins aurait cessé de marquer des points et se trouverait désormais en recul.
Tranquillement à l’abri de bureaux, de véhicules, de logements administratifs, certains édictent des règles et construisent des décisions sans se soucier de leur impact sur la population.
De gratuit, le test est devenu payant alors que la majorité de la population qui a gardé ses racines dans l’arrière-pays est obligée au moins pour les décès, notamment ceux survenus à Libreville, Port-Gentil mais aussi pour aller assister des parents atteints d’autres maladies et restés dans les villages, supporte des coûts financiers additionnels ignorés par la désinvolture de ceux qui ne sont d’ailleurs pas eux-mêmes soumis à ces tracas et n’en connaissent pas le prix.
Il n’y a pas à dire, tout cela est rageant, profondément irritant et surtout désolant pour le pays. Lorsque la défense d’une position sur une question intellectuelle repose sur la dissimulation de l’information, on peut craindre le pire car bien souvent alors il s’agit d’arguments d’autorité de ceux qui craignent la contradiction.
Raymond Ndong Sima
3 Commentaires
Bjr. Morceau choisi : »La France par laquelle nous respirons et qui compte 66 millions d’habitants dénombre plus de 36 000 morts. Le Gabon avec 2 millions d’habitants soit 33 fois moins que la France compte désormais 60 morts. Toutes choses égales par ailleurs, on devrait compter au Gabon, pour nous comparer à la France, 1.090 morts. Le COPIL appréciera. Mais dors et déjà nous savons le réponse. Amen.
Que M. NKOGHE-BEKALE et dame OSSOUKA ses prédécesseurs à la primature puissent apprécier à travers cette intervention de M. NDONG-SIMA le fossé qui les sépare intellectuellement de ce dernier serait déjà une avancée. Franchement, comment comprendre que le Gouvernement actuel, composé que des cancres, d’arrivistes, d’opportunistes de tout poil, tous ici de la secte PDG? Ne soit incapable d’exercer la moindre pression intellectuelle positive sur un président déjà pas très brillant et en plus très diminué physiquement et intellectuellement depuis la survenue de « sa fatigue légère ». C’est triste pour le pays.
L’analyse de M. NDONG-SIMA devrait susciter des réactions des responsables du Gouvernement. Il s’agit quand-même d’une prise de position d’un ancien premier ministre. Croire que ça ne compte pas, serait simplement afficher le manque de conscience et d’incompétences dont fait montre le gouvernement. On ne pourra pas continuer à gouverner le pays de cette façon. Le Gabon mérite beaucoup mieux que cette médiocrité dans laquelle on se morfond.
C’est vraiment triste pour le pays.
Tout est juste, si seulement il s’adressait à des humains ça servirait à quelque chose mais malheureusement il parle à ossouka qui le voit comme « un remetteur de cause » et à nourredin qui attend que casablanca lui dise quoi faire.
« Le problème avec le monde c’est que les gens intelligents sont plein de doutes, alors que les imbéciles sont pleins de certitudes » Charles BUKOWSKI