L’ancien ministre gabonais de l’Habitat, Adrien Nkoghe Essingone, appelle dans cette tribune à abandonner le ciment et les parpaings traditionnels au profit de matériaux de construction biosourcés comme la brique de terre cuite. Face aux délestages et à la demande croissante de climatisation, cette transition vers une approche bioclimatique utilisant les ressources locales comme la latérite est indispensable, selon lui, pour un « Gabon nouveau » durable et résilient au changement climatique.

« La construction durable n’est plus une option mais une nécessité. Nous le devons à nos enfants et aux générations futures ». © GabonReview

 

Adrien Nkoghe Essingone, ancien ministre de l’Habitat, du Cadastre et de l’Urbanisme. © D.R.

En tant qu’ancien ministre de l’Habitat, du Cadastre et de l’Urbanisme, j’ai été témoin des défis croissants auxquels notre nation est confrontée en termes de développement urbain et de durabilité. Récemment, un communiqué daté du 3 mai 2024 de la Société d’Eau et d’Énergie du Gabon (SEEG) a mis en lumière un problème crucial : la nécessité impérieuse de réduire la consommation énergétique face aux délestages réguliers et à une demande énergétique croissante exacerbée par les hausses de températures à Libreville.

La SEEG nous incite à adopter des comportements responsables, notamment en limitant l’usage de l’air conditionné. Cette recommandation n’est pas anodine; elle révèle un symptôme plus profond de la crise que nous traversons : l’inadéquation de nos matériaux de construction avec les impératifs climatiques actuels et futurs. L’utilisation massive du ciment, qui constitue le principal composant des parpaings traditionnels, contribue à hauteur de 7 % aux émissions mondiales de gaz à effet de serre. Ces parpaings transfèrent la chaleur de l’extérieur vers l’intérieur des bâtiments, nécessitant un usage accru de climatisation pour maintenir un confort thermique.

Lors du dernier Dialogue National Inclusif, l’appel à réorienter nos choix de matériaux de construction a été clairement exprimé. C’est un appel que nous ne pouvons ignorer. Ayant déjà expérimenté avec succès l’utilisation de briques de terre cuite dans le passé, je suis convaincu que cette alternative représente une solution à plusieurs de nos problèmes actuels.

Les blocs de terre crue, en particulier, offrent une excellente isolation thermique, conservant la fraîcheur des habitats sans nécessiter un recours excessif aux systèmes de climatisation. Ce choix matériel est d’autant plus pertinent que notre pays regorge de latérite, une ressource abondante qui pourrait rendre ce type de construction économiquement compétitif.

Je me permets donc d’exhorter très humblement les autorités à prêter une oreille attentive aux souhaits de notre population et à incorporer ces matériaux de toutes urgences dans les projets de construction des logements sociaux futurs. L’enjeu est de taille : il s’agit de répondre à une urgence climatique tout en préparant notre infrastructure à un avenir où l’énergie sera plus rare et plus coûteuse.

Il est essentiel de mettre en œuvre une approche bioclimatique dans nos plans de développement urbain, qui tient compte de la gestion optimale de nos ressources et de l’adaptation de nos habitats au climat tropical gabonais. La construction durable n’est plus une option mais une nécessité. Nous le devons à nos enfants et aux générations futures. Sortons de notre culture du silence, osons maintenant pour un Gabon nouveau grâce au “coup de libération”.

Adrien Nkoghe Essingone

 
GR
 

6 Commentaires

  1. Cb dit :

    Merci pour cette courte mais pertinente intervention.

    Le moment de challenger le statut qui est arrivé

  2. Il en a construit combien lorsqu’il était ministre de l’habitat.

    • Nelson Mandji dit :

      Toujours dans l’indexation, l’accusation et la suspicion sur les autres.
      Et vous, en dehors de poser des questions péjoratives et accusatrices, vous avez fait quoi pour le Gabon ?

      Pour votre information, alors qu’il était aux affaires, ce monsieur a fait construire une usine de parpaings en terre cuite. De nombreux gabonais avaient commencé à en acheter et à construire avec, jusqu’à ce que les forces de l’inertie et bourgeois compradores du pays ne fassent arrêter l’usine. Elle était à Nzeng-Ayong.
      De même, il a fait construire une cité à base de ce matériau, dans la même zone de Nzeng-Ayong, derrière ‘Chantier-Moderne’. La cité est encore visible.
      Quand on ne sait pas, on évite d’accuser à tout-va.

  3. DesireNGUEMANZONG dit :

    Bonjour Monsieur Adrien Nkoghe Essigone,

    Je vous lis depuis l’Europe. Je tenais à vous féliciter de votre article qui est une introduction à la prise de conscience écologique et à la nécessité de prendre en compte le changement climatique dans la construction de nos habitations individuels et plus globalement nos agglomérations.

    Vous venez de donner naissance à la maison écologique gabonaise [1]. La surclimatisation est un problème. Il faut limiter le nombre de climatiseur pour chaque habitat individuel. Ou surtaxer l’habitat énergivore. Et mettre en placexdes systèmes de récupération d’eau de pluie réinjecter par filtration pour laver le linge à la machine et les sanitaires.

    Ici (en Europe), l’isolation représente 25% du coût de construction financée en partie par des réductions d’impôts sur 5ans voire 7ans.

    Au-delà de la simple habitation, une ville se construit en combinant 3 infrastructures : l’infrastructure grise (les bâtiments basse consommation),
    l’infrastructure verte (parc et plantation en agglomération) et ‘infrastructure bleue (aménagement de canaux navigables au mieux).

    Nos ingénieurs et nos architectes ont du pain sur la planche. A eux de nous surprendre.

    Merci pour votre tribune. J’ai eu un grand plaisir à vous lire.

    [1] Opposé à la maison économique.

  4. HOWARD dit :

    VRAIMENT G SUIS HEUREUX DE VOIR EN ENTTENDRE DES GABONAIS FAIRE DE TELLES PROPOSITIONS HONNEUR A LA PATRIE

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