Si les vestiges de l’exploitation du téléphérique rappellent son passé historique, Bakoumba, le chef-lieu du département de Lékoko, dans le Haut-Ogooué, ressemble fort bien à un «jardin de la misère». Mais ses habitants, un millier d’âmes environ, entretiennent l’espoir. Depuis plusieurs années, en effet, la Comilog a mis en exploitation, le parc de la Lékédi. 14000 hectares de forêt dédiés à la conservation, à la protection de la faune et de la flore, au tourisme et à la science. Une merveille à découvrir où «Jojo», le gorille, et les autres pensionnaires ont leurs habitudes.  

Des choses et d’autres sur le parc de la Lékédi. © Facebook/search/photos

 

Arborant les oripeaux de son glorieux passé, la ville de Bakoumba a fortement souffert de la mise à l’arrêt du téléphérique au profit de la voie ferrée. Les populations de ce village fondé par la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog) en souhaitent un renouveau. La renaissance espérée pourrait se réaliser grâce aux projets de développement annoncés par l’opérateur minier, dans le cadre de son programme de Responsabilité sociétale d’entreprise (RSE). Parmi ces initiatives figure le parc de la Lékédi, unique réserve animalier sécurisé du Gabon avec une faune et une flore exceptionnelle. Une merveille naturelle et environnementale au cœur de ce département, jadis épicentre de l’acheminement du manganèse vers Mbinda, au Congo.


Un pic bœuf sur le dos d’un buffle, des pensionnaires du parc de la Lékédi, prochainement rouvert aux touristes. © Gabonreview

14000 ha entièrement protégés, un sanctuaire pour les espèces végétales

Géré par la Société d’exploitation et du parc de la Lékédi (Sodepal) et la Fondation Lékédi biodiversité, ce parc privé compte 14 000 hectares de savane, de forêt galerie et de plans d’eau. On recense dans ses paysages sauvages, des centaines d’animaux locaux et importés. L’histoire voudrait qu’en 1991, à l’arrêt du téléphérique, l’opérateur Comilog ait décidé de créer de nouvelles activités afin de conserver les emplois et participer à la conservation durable des forêts, de l’écosystème, mais aussi valoriser la pêche et les métiers connexes à la gestion de cet univers, et servir à la recherche scientifique. «Le parc, explique Éric Willaume, son directeur d’exploitation, est géré depuis quelques semaines par la Fondation Lékédi biodiversité, créée par la Comilog pour pouvoir préserver et faire la recherche sur la biodiversité gabonaise».

Dans ces 14000 ha entièrement protégés, on peut voir des primates (chimpanzés, gorilles, mandrills,…), des impalas importés de Namibie, des lycaons, des buffles sauvages (plus de 300), particularité du parc. Les panthères quant à elles savent si bien se fondre dans la nature qu’on ne les verra que très rarement. On y trouve aussi des sitatungas, des guibs, de nombreuses espèces de petits singes et d’oiseaux, ainsi que des potamochères.

«La spécificité du parc de la Lékédi c’est qu’on peut approcher les buffles de près», explique Eric Willaume. En effet, dans les profondeurs de la réserve, un troupeau de plusieurs dizaines d’animaux se promène pour se nourrir de l’herbe en abondance. Dans le groupe, des bufflons de quelques semaines. Eux-aussi ont déjà pris leurs marques et connaissent la conduite à tenir au milieu de ces mastodontes de plus de 200 kilogrammes.

La réserve est un véritable sanctuaire pour les espèces végétales. Elles sont en général, celles qu’on retrouve dans les savanes et forêts denses du Gabon. Le touriste y remarquera des parasoliers, de l’okoumé, des lianes à eau, du rotin, des fougères ou du gingembre sauvage, plante d’environ 1 mètre produisant des fruits dont raffolent les grands singes.

Le directeur du parc indique qu’en termes de création d’emplois, la structure utilise exclusivement les ressortissants de Bakoumba. «Nous employons aujourd’hui 42 personnes dont la totalité provient de Bakoumba. On met un point d’honneur à n’embaucher que des gens de Bakoumba et les former au fur et à mesure parce qu’on sait que dans ce village, le marché de l’emploi est très compliqué». Il n’oublie de pas de souligner que depuis 2020, la crise sanitaire relative au Covid-19 est également passée par là. Le parc est, depuis plus d’un an, fermé au public et espère rouvrir d’ici fin août prochain.

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Jojo, le gorille ; les lycaons ; les chimpanzés et les autres

Mais le parc voit grand et vise loin avec la création, par le groupe Eramet et sa filiale Comilog, de la Fondation Lékédi Biodiversité, inaugurée le 12 juin 2021. Ce nouveau-né de la structure va renforcer le statut du parc de la Lékédi en le dotant de moyens supplémentaires pour préserver la biodiversité gabonaise, réhabiliter les primates orphelins et développer la recherche scientifique. Sur cette lancée, des emplois vont nécessairement se créer et absorber une bonne frange de jeunes au chômage dans la localité.

«On n’embauche que les gens de Bakoumba et on les forme. Certains d’entre eux sont là depuis une vingtaine d’années. Il y en a qui ont commencé tout en bas de l’échelle, comme manœuvre voire temporaire, et qui ont fini comme directeur adjoint du parc. Il y a donc la possibilité d’évoluer pour peu qu’on s’en donne les moyens et qu’on est sérieux au travail», explique le directeur d’exploitation.

Très loin à l’intérieur de l’enceinte clôturée, Jojo, le gorille a ses habitudes. Transféré d’un parc de Port-Gentil, dans l’Ogooué-Maritime, le jeune mâle de 14 ans accourt dès qu’il entend le moindre bruit. Puis, il pose et attend. Il attend en effet les clics, les clacs et les flashs des appareils photos. Les touristes le prenant en photos. Une scène qui émeut évidement puisque le primate donne l’impression de savoir parfaitement ce qu’il se passe.

Avant ce jeune mâle en pleine croissance, l’on pourra passer devant l’enclos de la meute de lycaons dans laquelle la femelle et le mâle dominant dirigent avec minutie un groupe d’un peu moins d’une dizaine d’individus. M. Willaume en guide, laisse entendre qu’«ici la solidarité est la loi». «Le groupe ne laissera ou n’abandonnera aucun individu. S’il est malade, blessé, les autres chasseront ensemble et le nourriront jusqu’à la fin».

Le parc abrite également un enclos d’un hectare réservé aux grands singes. «On a 11 chimpanzés. Ils sont tous orphelins, issus du braconnage. Ils ont été récupérés avec l’aide des autorités. On leur réapprend la vie en forêt et en liberté dans leur milieu naturel. Ils vont créer des groupes avec l’objectif de pouvoir les relâcher un jour dans la nature. Il y a des mâles et des femelles. On essaie donc de recréer de véritables groupes de chimpanzés», précise M. Willaume.

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L’aquaculture par la Sodépal et une possible réouverture en août

Une autre particularité de cette réserve est l’aquaculture développée par la Sodépal. La structure s’active dans la pisciculture de tilapia en étang. Initiée en 1991, également en conséquence de l’arrêt du téléphérique, l’activité avait pour but de générer des revenus pour les anciens employés de la technologie abandonnée de transport du manganèse. Le choix de cette production fut dicté par la disponibilité d’un site favorable à la création et au maintien d’étangs, une température élevée toute l’année, une grande disponibilité en eau. Et surtout un éloignement de la mer «qui limite la concurrence sur le marché du poisson et la proximité avec Franceville et Moanda, ainsi que la présence des touristes assurent des débouchés pour la production», souligne un employé. Le directeur corrobore et fait noter que «le poisson produit est exclusivement vendu à Bakoumba. Cependant, on peut toutefois en vendre à Moanda et Franceville lorsqu’il y a plus de production».

Pour la fluidité de la circulation dans le parc, des sentiers botaniques et des équipements destinés à faciliter l’observation des animaux et du paysage ont été aménagés, mais aussi un pont surplombant un enclos.

«Vous êtes venus pour le Forum RSE Comilog. On a entendu tout ce qui a été dit lors des échanges. Tout le monde veut sortir Bakoumba de la misère. Aidez-nous donc à développer nos projets autour de la découverte de ce parc. C’est notre parc, c’est sur notre territoire, mais on ne gagne rien. On ne peut même pas chasser pour se nourrir. Mettez les moyens et nous ferons le reste», a presque supplié une jeune dame, native de la localité et sans emploi. Depuis le déclenchement de la pandémie du Covid-19, la majeure partie des activités tourne au ralenti si elle n’est pas totalement à l’arrêt. «On espère rouvrir au mois d’août. On espère que toutes les conditions seront réunies pour cette réouverture», a déclaré le directeur.

 
GR
 

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