La cérémonie de présentation des vœux au président de la République, hier mardi 8 janvier, marque formellement l’entrée en 2020 et la fermeture de la page 2019. L’occasion pour revenir sur ces personnalités ou groupes de personnes ayant marqué l’année échue. De Jean Rémy Yama et Dynamique unitaire à Justin Ndoundangoye – le « roi » de l’évasion, en passant par le collectif Appel à agir ou Olivier N’zahou, Gabonreview a subjectivement retenu douze entités.  

© Montage Gabonreview

 

Brice Laccruche Alihanga

© Facebook

En bien ou en mal, c’est résolument l’homme de l’année au Gabon. Durant l’année échue, il s’est littéralement transformé en président de la République bis après l’AVC d’Ali Bongo, le 24 octobre 2018.  On sait aujourd’hui qu’il était le marionnettiste de la mise à l’écart de Manganga Moussavou, Emmanuel Issoze Ngondet, Étienne Massard Kabinda, Ali Akbar Onanga Y Obegue, Christian Magnagna, Lambert Noël Matha et Guy Bertrand Mapangou notamment, mais aussi d’Arsène Emvahou, Park Sang-chul, Frédéric Bongo ou John Steed Rey. Autant de personnes dont il s’est fait l’ennemi. Brice Laccruche aura fait la pluie et le beau temps au Gabon durant l’année écoulée.

Fort d’une manne financière à l’origine suspecte, il entreprend du 2 septembre au 5 octobre une tournée monstre à travers le pays, marquée par une débauche d’argent et de moyens, la mobilisation des membres du gouvernement, la mise à contribution des personnels de commandement, les transferts massifs de figurants. Sur un coup de fil passé en public, il fait venir le chef de l’Etat au stade de Nzeng-Ayong où s’achève la tournée l’ayant fait connaître de la partie du pays qui ne le connaissait pas jusque-là.

Ayant pris trop d’altitude, tel Icare dont les ailes de cire fondent pour avoir volé trop près du Soleil, Brice Laccruche chute brutalement, le 7 novembre, lorsque le conseil des ministres le débarque du cabinet présidentiel pour un poste de ministre figuratif. S’en suit son débarquement du gouvernement puis son arrestation, le 3 décembre. Si la presse officielle parle de 97 milliards de francs subtilisés à la Goc, à l’Oprag et à la Sogara, des indiscrétions concordantes parlent de plus 1500 milliards distraits des caisses de l’Etat tandis que l’éventrement d’une dalle de la maison de Laccruche dévoile deux coffres-forts enterrés. En prison, l’homme continue de défrayer la chronique : ses avocats viennent de dénoncer sa détention en isolement et le traitement inhumain qui lui est infligé à Sans-Famille.

Jean Rémy Yama et Dynamique unitaire

© Facebook

Syndicaliste de tous les fronts ayant déjà gouté aux affres des geôles de Sans-Famille, Jean-Rémy Yama fait la Une de l’actualité en juillet 2019. Engageant Dynamique unitaire (DU), le regroupement syndical qu’il préside, il déclare le 2 juillet 2019 qu’«Ali Bongo est mort. Il n’existe plus !». L’affaire crée un buzz mirobolant au point que, 24h plus tard, il est menacé de poursuites pénales par le ministre de l’Intérieur et de la Justice. Après une supposée descente d’hommes armés chez lui, le 3 juillet, il disparait des radars laissant les réseaux sociaux nourrir la thèse de son exil. Dans la foulée, quatre leaders syndicaux membres de DU (Simon Ndong Edzo, Sylvie Nkogue Mbot, Jean Bosco Boungoumou Boulanda et Ghislain Malanda), sont «portés disparus de leurs domiciles familiaux», «kidnappés» par les forces de l’ordre estime la confédération syndicale. Ils sont libérés deux semaines plus tard.

Jean-Rémy Yama réapparait quelques semaines plus tard. Cette fois sur les antennes de TV5 monde en France. De retour au Gabon, l’homme n’est pas inquiété. DU n’aura pas chômé durant l’année 2019. Entre autres, elle a contesté le recensement biométrique général de la Fonction publique, clamé sa conviction de l’incapacité d’Ali Bongo à assumer les charges inhérentes à la fonction de président de la République, soutenu la contestation des élèves contre les nouvelles conditions d’attribution des bourses, exigé la démission du gouvernement Nkoghé Békalé durant l’affaire Kévazingo, etc.

Appel à agir

© Gabonreview

Elza-Ritchuelle Boukandou, Noël Bertrand Boundzanga, Placide Obiang Nzé, Nicolas Nguema, Franck Ndjimbi, Edgard Owono, Ange Kevin Nzigou, Marc Ona Essangui, Jean Gaspard Ntoutoume Ayi et Minault Maxime Zima-Ebeyard : dix personnalités de l’opposition et de la société civile, dont deux députés, auront littéralement incarné l’opposition durant l’année échue en martelant leur exigence d’un examen médical du président Bongo. Le collectif se nomme Appel à agir. Le 28 février, près de 3 mois après l’accident sanitaire d’Ali Bongo à Ryad et suite à la modification de l’article 13 de la Constitution, le groupe lance un appel à tous les compatriotes à les rejoindre pour libérer le Gabon de ce qu’il nomme «le désordre installé au sommet de l’État» du fait de la modification dudit article 13.

Méthodiques, connaisseurs de la mécanique institutionnelle, ils s’adressent aux dirigeants des institutions concernées, aux représentations diplomatiques et aux organisations internationales accréditées au Gabon. Appel à agir introduit, le 28 mars, une saisine demandant une expertise médicale sur le président de la République. Objet : évaluer si les aptitudes physiques et cognitives d’Ali Bongo lui permettent de continuer à diriger le pays. Le 2 mai 2019, le tribunal juge « la demande irrecevable« . Le groupe des 10 fait aussitôt appel de la décision. S’en suit un feuilleton judiciaire rocambolesque qui ira jusqu’à la destitution du président de la Cour d’appel de Libreville, Paulette Ayo Akolly (voir ce nom).

On aurait pu les croire abattus et battus à jamais. Au contraire, cette destitution renforce les soupçons du collectif qui introduit, le 23 septembre, un recours pour contester devant la Cour constitutionnelle. Sur des considérations concernant Me Jean Paul Moubembé l’avocat des 10, le recours est rejeté. Les 10 jeunes Gabonais n’en démordent pas. Ils ont repris les causeries de terrain et annoncé la reprise du cycle des rencontres et audiences avec les personnalités et institutions contactées au début de leur bataille. Loin de déranger le seul pouvoir, ils auront, tout au long de l’année écoulée, également été fort controversés dans le camp de l’opposition.

Kelly Ondo Obiang

© Facebook

Il est la figure de proue de la gondole portant tentative de coup de force du 7 janvier 2019. Il aura donc été le premier à marquer l’actualité de l’année écoulée. Tout a été dit sur cet évènement notamment rappelé la semaine dernière à la faveur d’une rétrospective (Lire «14 évènements marquants ayant fait l’année au Gabon»).

Au moment de son «coup d’état» éphémère, il se présente comme Commandant adjoint de la compagnie d’honneur de la Garde républicaine (les fameuses capes rouges). Le jeune homme qui avait en admiration des militaires Gabonais passés outre-tombe et ayant une aura de héros, notamment Djoué Dabany et Charles N’Tchoréré, citait souvent Napoléon Bonaparte : «L’armée c’est la nation». Â 24 ans, il a dévié du destin tout tracé qui se présentait devant lui. Son procès, en compagnie de ses comparses, est toujours attendu. Il devrait être plein de surprises et révélations, nombreux dans l’opinion estimant que son putsch de scout a dû être commandité par plus haut placé que lui.

Les lycéens ayant fait reculer le gouvernement sur la réforme des bourses d’études

© D.R.

Alors que les lycéens et collégiens sont en petites vacances de fin du 2e trimestre, le Conseil des ministres adopte, le 29 mars 2019, de nouvelles modalités de délivrance du baccalauréat (Bac) et d’attribution des bourses après cet examen. L’élève doit avoir 19 ans au plus et avoir obtenu son Bac ou un diplôme équivalent avec une moyenne générale supérieure ou égale à 12/20 à l’examen.

Dès le retour des classes le 8 avril, les élèves du Lycée Paul Indjendjet Gondjout donnent le ton. Ils partent de leur établissement pour le Lycée national Léon Mba où ils sortent leurs camarades des classes pour un sit-in au ministère de l’Éducation nationale. Le mouvement est lancé. Sur l’ensemble du territoire national les élèves investissent les rues pour dire non à ces nouveaux critères. Le phénomène provoque la crainte des pouvoirs publics débordés. Dans certaines villes, à l’instar de Port-Gentil, ces marchent d’enfants sont dispersées à coup de grenades lacrymogènes, faisant quelques blessés légers qui n’en indignent pas moins l’opinion.

Les élèves reçoivent le soutien de l’opinion, notamment de la société civile et de l’opposition politique. La polémique enfle. Dans la nuit du 16 au 17 avril, Michel Menga M’Essonne alors ministre de l’Education nationale, annonce sur Gabon 1ere la suspension de la mesure. Le gouvernement prétend l’avoir différée aux prochaines années. Les cours peuvent reprendre. «Sur le bitume, la victoire», pourrait-on dire.

Paulette Ayo Mba Akolly

© Gabonreview

Soutien public d’Ali Bongo au plus fort de la controverse autour de l’acte de naissance de celui-ci, en 2015-2016, Paulette Ayo Mba Akolly est un enfant du sérail. Fille du président Léon Mba, elle assurait alors connaitre l’actuel chef de l’État depuis l’enfance. Elle n’est pas moins une outsider. Déjà, en mars 2019, alors qu’elle préside la Cour criminelle spéciale, elle suscite l’étonnement quant aux blocages du procès de Magloire Ngambia. Elle dénonce alors les «forces obscures qui s’opposent à ce que les voleurs, ceux qui ont détourné l’argent de la République, ne soient pas jugés. (…) Mais je ferai de ce qui est de mon pouvoir pour que justice soit rendue et les coupables répondent de leurs actes».

Devenue présidente de la cour d’appel, la dame au caractère bien trempé défraye à nouveau la chronique en août 2019 : elle accepte d’examiner la requête du collectif Appel à agir qui demande un examen médical du président Ali Bongo Ondimba après avoir été débouté en première instance en mai de la même année. S’en suit une bataille avec les avocats d’Ali Bongo dont elle déboute la requête d’annulation non sans refuser, quelques temps plus tard, de se plier à l’ordonnance de sursis à statuer délivrée par le premier président de la Cour de cassation. Surréaliste mais sans surprise, Paulette Ayo Mba Akolly est suspendue, le 19 août, de ses fonctions de présidente de la cour d’appel de Libreville pour «manquement aux convenances». Si rien ne permet d’assurer qu’elle allait donner raison à Appel à agir, une partie de l’opinion pense qu’elle voulait simplement affirmer l’indépendance des juridictions et la liberté du juge. Le pouvoir ne l’a pas entendu cette oreille.

Mgr Mathieu Madega et Mgr Jean-Bernard Asséko, les évêques du sursaut de conscience

© montage Gabonreview

Le 8 décembre 2019, le Monseigneur Mathieu Madega Lebouakehan, évêque du diocèse de Mouila, président de la Conférence épiscopale du Gabon, fustige «les slogans creux, les publicités mensongères et les éphémères distractions». Il invite le «pouvoir institutionnel» à une «prise de conscience (…) en vue d’un sursaut effectif de souveraineté et de patriotisme et un bon engagement pour le bonheur véritable de toute la population.» Le même jour, le Monseigneur Jean-Bernard Asséko Mvé, curé de la paroisse Immaculée conception de Bitam, s’émeut du «spectacle désolant et dégradant de la vie sociale en 2019 au Gabon», demandant aux détenteurs des charges publiques de «rendre (leurs tabliers) à Dieu pour qu’il trouve des personnes plus aptes à conduire ce peuple-là, qui mérite d’avoir des dirigeants qui pensent à lui (…) et le conduisent comme de bons bergers vers de frais pâturages.» Polémique : certains pensent que le pouvoir gabonais est dans le viseur de Rome, d’autres estiment que ces prêtres doutent simplement de l’engagement des autorités gabonaises à se mettre au service du peuple.

Au-delà du débat que suscite ces sorties au sein de l’opinion, ces prêtres appellent simplement à une gestion plus juste et équitable du bien commun et à un recentrage de l’État sur ses missions régaliennes. Ils indiquent que l’arbitraire, les dénis de droit, le sectarisme partisan, la corruption, l’irresponsabilité et les lourdeurs bureaucratiques ne correspondent nullement aux attentes des populations. Fondées sur la Doctrine sociale de l’Eglise, leurs homélies permettront-elles un sursaut des gouvernants cette année ? En tous cas, il a été énormément question de Dieu dans les vœux présentés au président de la République, le 7 janvier 2020.

Privat Ngomo

© YouTube

Il était connu comme informaticien, amateur d’art et de culture, promoteur à ce titre du projet Ekan et contributeur de la première bande dessinée sur le Mvett. Mais, Privat Ngomo se propulse sous les feux de l’actualité en tant que président de la Commission scrutin de Jean Ping lors de la présidentielle de 2016. Le 12 juillet 2019, avec une quarantaine de jeunes, il organise une opération baptisée Lumumba, bloque le trafic routier devant l’ambassade de France à Libreville et clame dans un mégaphone un message appelant Paris à reconnaitre «la victoire incontestable de Monsieur Jean Ping [et à] respecter le libre choix du peuple gabonais». Il demande «pourquoi [la France] n’est-elle pas fidèle aux idéaux de démocratie, de liberté, d’égalité et de fraternité qu’elle va célébrer le 14 juillet prochain ?».

Privat Ngomo est arrêté ce jour-là. Fort de ce que d’autres jeunes, certes proches du pouvoir, notamment Serge William Akassaga, Fréderic Ntera Etoua et le défunt Hervé Ndong Nguéma, avaient obstrué la voie devant la même ambassade sans conséquence quant à leur liberté, la famille du concerné, les ONG Jeunesse panafricaine (Jepa) et le ROLBG de Georges Mpaga demandent aux organisations de défense des droits de l’homme et des libertés de faire pression sur les autorités gabonaises et françaises pour le libérer.

Les acteurs de la campagne « Touche pas à ma terre »

© Gabonreview

Le 2 octobre 2019, le gouvernement annonce un projet de décret portant transfert à titre gracieux, à la Caisse des dépôts et consignations (CDC), de certains des titres fonciers appartenant à l’État. Motivation : permettre à cette entité de lever des fonds sur le marché pour le compte de l’État, en vue du financement des projets de développement.

Le projet suscite aussitôt la méfiance et créé le charivari. A titre d’illustration, les Mamboundouïstes dénoncent le bradage de la souveraineté ; Alexandre Désiré Tapoyo, ancien ministre des Droits de l’Homme, déclare l’initiative «périlleuse et préjudiciable à plus d’un titre,  et portant en elle les germes de graves et dangereuses dérives».

Il y a que, moins d’une semaine après l’annonce du projet, une campagne dénommée «Touche pas à ma terre !» est lancée le 8 octobre. L’initiative citoyenne qui s’inscrit contre l’«accaparement» des terres, exhume l’article 114 de la Constitution en son alinéa 3 : «Nulle cession, nul échange, nulle adjonction de Territoire n’est valable sans consultation préalable du peuple gabonais par voie de référendum». Avec un effet viral époustouflant, la campagne se répand sur Facebook et Whatsapp, notamment. Ses animateurs sollicitent un débat public avec le ministre de l’Économie, exigent la publication des 1534 titres fonciers concernés et la sincérité sur la valeur monétaire de terres concernées, estimée à 795 milliards de francs CFA. Le 20 novembre 2019, à travers un communiqué laconique, le gouvernement annonce : «devant les diverses réactions suscitées par cette décision et instruit à cet effet par le président de la République, chef de l’État, Son Excellence Ali Bongo Ondimba, le Gouvernement informe les Gabonaises et les Gabonais de l’annulation pure et simple de celle-ci.» La voix du peuple a été entendue.

Justin Ndoundangoye, le « roi » de l’évasion

© Gouvernement Gabon

Alors ministre des Transports, Justin Ndoungangoye se fait remarquer par des projets faramineux à la lisière du surréalisme dans le contexte gabonais : un projet de tramway à Libreville et la création, pour 4 milliards de francs CFA, de deux sociétés de Transports, Trans Akanda et Trans-Urb. Flagornerie aidant, il est le premier ministre des Transports à avoir doté le chef de l’Etat d’un wagon présidentiel dans un train de la Société d’exploitation du transgabonais (Setrag).

Les feux de la rampe ne se braquent vraiment sur lui qu’au moment du démantèlement de l’Association des jeunes émergents volontaires (Ajev) dont il était le secrétaire général. Celui que ses afficionados du Haut-Ogooué ont surnommé «Okoulou-la-solution» se montre perspicace : débarqué du gouvernement, il se rend rapidement à l’Assemblée nationale, rempli les formalités appropriés et recouvre son immunité parlementaire.

Il se lance ensuite dans un foireux numéro d’Harry Houdini, le roi de l’évasion. Malgré ses explications a posteriori, il tente de quitter le pays en passant par Port-Gentil. Contre les dispositions juridiques et enfreignant son immunité parlementaire, les agents de la Police judiciaire le débarquent d’un avion en partance pour Pointe-Noire. Dans la même soirée, l’homme s’affiche sur les réseaux sociaux à travers une vidéo dans laquelle sont martelés les phrases «Vous me cherchez pourquoi ?  Vous me cherchez pourquoi ? Me voila ! Me voila ! Me voila !», refrain d’une chanson de Prince Kiala titrée «Kinkéliba». Quelques temps après, Ndoundangoye est rattrapé à Malinga dans la Ngounié à bord d’un véhicule tout terrain alors qu’il tente une fois de plus de s’évader du pays pour rallier le Congo. Son immunité parlementaire fini par être levée. Alors qu’il n’est pas encore notifié de cette levée, il est appréhendé par les agents de la Direction générale de recherches (DGR). Depuis, «Kinkéliba» et son refrain «Vous me cherchez pourquoi ? Me voila ! Me voila ! Me voila !» est devenu un tube national. Presqu’inconnue avant que Ndoundangoye ne tente de devenir Houdini, la chanson passe désormais dans tous les bars et bien de night-club de Libreville.  Prince Kiala doit une fière chandelle au député déchu de Franceville.

Olivier N’zahou

© Capture d’écran

On croyait révolue l’époque des procureurs de la république trop voyants depuis le passage au quasi-anonymat de la tonitruante Sidonie Flore Ouwé. On se trompait. Nommé procureur de la république en juillet 2018, Olivier N’Zahou s’illustre dans la justice spectacle, avec descentes dans les bars et night-clubs, fermetures de certains établissements. Il se veut alors à la fois gardien de la sécurité des personnes et des biens, autorité en charge du contentieux fiscal, responsable des brigades phytosanitaires et dirigeant de l’administration en charge de la consommation et de la concurrence. De l’abus de pouvoir, persiflent certains. De l’abus d’autorité, clament d’autres parmi lesquels la chanteuse Shan’L.

Mais N’Zahou est avant tout le procureur du Kévagate, le scandale économique de l’année 2019 autour de la disparition de scellés de bois précieux de contrebande. Guy Bertrand Mapangou, alors ministre des Forêts, et Pierre-Claver Maganga Moussavou, alors vice-président de la République, perdent leurs postes dans le tourbillon de ce scandale. Flanqué de la télévision, N’Zahou part aussitôt en croisade contre la malbouffe dans les restaurants et chez les distributeurs en alimentation générale de la capitale. Dans le même temps, il annonce des interpellations et poursuites d’anciens cadres de l’administration publique et parapublique soupçonnés de corruption et de blanchiment d’argent. Il est démis le 22 novembre 2019… un jour après la mise aux arrêts de Ike Ngouoni. L’opération Scorpion se fera sans ce magistrat bruyant réputé proche de Brice Laccruche Alihanga.

Lee White

© YouTube

«Un Blanc à la tête du ministère de la Forêt du Gabon», titre France Info, «Un Britannique nommé à la tête d’un ministère clef au Gabon», écrit pour sa part Le Figaro, «Le Gabon tente de se verdir avec un Britannique nommé ministre des Forêts», renchérit Libération. Le 10 juin, dans le tourbillon du Kévagate, prétexte au limogeage de son prédécesseur Guy-Bertrand Mapangou et du vice-président Pierre Claver Maganga Moussavou, Lee White entre en effet au gouvernement comme ministre des Forêts, de la Mer et de l’Environnement.

S’il était déjà controversé du fait de sa nomination à la tête de l’Agence nationale des parcs nationaux (ANPN) et de sa gestion de cette structure, son entrée au gouvernement «fait débat», selon l’expression de nos confrères de Gaboneco. Ceux-ci relèvent l’indignation d’un internaute : «Lee White devient ministre au Gabon comme s’il n’y avait plus de gabonais capables d’occuper cette fonction. Hélas ! Ali Bongo et ses amis par cet acte prouvent que le Gabon manque de façon criarde de matières grises, c’est un véritable doigt d’honneur à l’endroit du peuple gabonais». Comme de nombreux gabonais, Bruno Ben Moubamba, opposant, s’indigne de la nomination. L’ancien ministre de la République sous le régime actuel enfonce le clou : «Lee White, le Gabon n’est pas ton pays et tu es un espion ! Lee White est probablement le Cecil Rhodes de notre temps. Avec beaucoup moins de panache mais le même tropisme raciste. Pour le malheur du Gabon. Les Gabonais qui acceptent ça font honte !» En tout cas, l’entrée d’un Européen dans un gouvernement africain en 2019 a suscité l’étonnement à travers le monde et n’a nullement eu l’effet d’une ouverture d’esprit des gabonais. Elle a plutôt donné l’impression d’une forte rémanence du complexe du colonisé.

 
GR
 

4 Commentaires

  1. Gayo dit :

    Malheureusement ils ont fait parler du Gabon pas dans des faits qui font grandir et rayonner le Gabon. Pas dans autre chose (culture, sport, academies, social, économie, entreprenariat, ect) mais pour ou contre des pratiques politiques vicieux qui puisent leur origine dans l’usurpation du pouvoir au sommet de l’état.

  2. Rita lesly rombongany dit :

    On aurait préféré un articulé qui met en lumière des hommes et des formes qui se battent sur le terrain. Tous ces entrepreneurs et start’uppers qui se battent par leur propre moyen!

  3. natty dread dit :

    LKJ? Hmmm, y a des connoisseurs chez GR

    • gabonreviewadmin dit :

      LKJ (Linton Kwesi Johnson), le dub poête britannique d’origine jamaïcaine. Nous avons en effet emprunté le cover de son disque « Making History ». Il n’y a que quelqu’un s’appelant Natty Dread pour le savoir.

Poster un commentaire