La lutte contre le réchauffement planétaire ne doit pas devenir un outil de délégitimation des États voire de recolonisation. Elle ne peut non plus reposer sur des mensonges, demi-vérités ou promesses en l’air.

Cop26 : Année après année, on recycle les mêmes méthodes, conduit les mêmes études, sans résultat aucun. © Montage Gabonreview

 

Comme l’affirment les altermondialistes, les négociations sur le climat sont menées par «des pollueurs et des entreprises irresponsables (soucieux) de poursuivre leurs activités (…) et d’accroître leurs bénéfices en exploitant davantage les combustibles fossiles, en profitant des nouveaux marchés du carbone, (…) en spéculant sur la nature et en privatisant les écosystèmes.» Quatre jours après l’ouverture de la conférence des parties à la Convention-cadre des Nations-unies sur les changements climatiques (CCNUCC), cette diatribe s’explique mieux. Certes, une quarantaine de pays ont pris l’engagement de renoncer à l’usage du charbon d’ici à 2030-2040. Mais le tableau d’ensemble relève de l’affichage. En s’engageant à réduire de 30% leur consommation de méthane d’ici à 2030, 87 pays ont fait le choix le plus facile. En signant une déclaration pour la préservation des forêts, une centaine d’autres ont opté pour le convenu.

Remède connu

Déjà présentée comme une «avancée majeure», l’initiative euro-américaine est une solution de faible portée. D’abord, en raison du poids du méthane : entre 10 et 11% des émissions de gaz à effet de serre contre 80% pour le dioxyde de carbone. Ensuite, du fait de sa durée de vie dans l’atmosphère : neuf ans contre 90 ans pour le dioxyde de carbone. Enfin, à cause des secteurs concernés : essentiellement l’agriculture intensive. Quant à l’accord sur les forêts, il a un air de déjà-vu et de déjà-entendu, le concept zéro déforestation n’ayant jamais produit de résultats probants. Comme on le constate, ces engagements relèvent sinon de la poudre aux yeux, du moins du minimum syndical. Même si un accord sur le charbon a été trouvé, rien n’est envisagé sur le gaz et le pétrole. «C’est la stratégie la plus simple et la plus efficace (…) à court terme», reconnaît d’ailleurs le président américain.

Pourtant, à veille de cette 26e conférence des Nations-unies sur le climat (Cop26), l’Organisation météorologique mondiale (OMM) avait prévenu : «Les années 2015-2021 ont été les plus chaudes jamais enregistrées.» Implicitement, l’OMM appelait à sortir des «fausses solutions» pour enfin «changer le système, pas le climat.» Comme l’affirme le World rainforest movement (WRM), les changements climatiques sont «le résultat d’un système économique injuste visant une croissance sans fin et la concentration des richesses dans les mains de quelques-uns.» De ce point de vue, «la crise climatique ne sera pas résolue sans s’attaquer aux causes profondes», notamment la prolifération des industries extractives. Autrement dit, le remède est connu : laisser plus de deux tiers des combustibles fossiles dans le sous-sol ; promouvoir l’agriculture à petite échelle ; repenser les normes de certification volontaire et le mécanisme REDD+ (Reducing emissions from deforestation and forest degradation ) ; supprimer les subventions publiques au stockage de carbone ; lutter contre le développement des agro-carburants ; revoir les accords commerciaux ou d’investissement et ; développer une stratégie mondiale de gestion durable des océans.

Appel à un contrôle démocratique

Des préconisations contraires aux piliers du capitalisme mondial voire de l’ordre héritée de la Seconde guerre mondiale. Le libre-échange, les investissements directs internationaux, l’Acte final du cycle de l’Uruguay round, la Convention de Montego Bay, l’Organisation mondiale du commerce (OMC), le Fonds monétaire international (FMI), le Tribunal international du droit de la mer, les entreprises transnationales, les banques : ces principes, instruments juridiques, outils techniques ou institutions doivent être repensés si l’on veut venir à bout de la crise climatique. D’où l’appel de certaines ONG en faveur d’un monde fondé «sur un contrôle démocratique des politiques, ressources, financements et moyens de production

Quand bien même ils en ont conscience les principaux animateurs de la Cop26 n’ont cure de ces préconisations. Frayant avec des dictateurs, ils s’éloignent toujours un peu plus des bonnes pratiques, de la démocratie et de l’État de droit, au risque de s’aliéner la sympathie des populations. Dans le Bassin du Congo par exemple, les États-Unis, l’Union européenne financent des activités sans s’assurer de leur pertinence scientifique ni de leur légalité. Dans certains cas, des ONG se substituent aux administrations, décident pour elles, quitte à les entraîner dans des chemins sans issue. Année après année, on recycle les mêmes méthodes, conduit les mêmes études, sans résultat aucun. Or, la lutte contre le réchauffement planétaire ne doit pas devenir un outil de délégitimation des États voire de recolonisation. Elle ne peut non plus reposer sur des mensonges, demi-vérités ou promesses en l’air. Au-delà des discours jargonnants, elle doit répondre à la réalité écologique et économique. Au-delà des grands-messes, elle doit articuler luttes sociales et luttes démocratiques.

 
GR
 

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