La 27è Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations-unies sur les changements climatiques (Cop27 – CCNUCC) aurait dû être «une occasion (…) de discuter d’une action climatique ambitieuse et axée sur les droits.» Pour le salut de l’humanité, il faut remettre l’homme au centre des négociations.

En Égypte, comme dans la plupart des pays du Bassin du Congo, les droits humains et règles démocratiques sont foulés au pied. Tant pis si les élites dominantes du Bassin du Congo profitent de la Cop27 – CCNUCC pour redorer leur image ou s’offrir une reconnaissance internationale à peu de frais. © Gabonreview/entv.dz

 

Depuis toujours, de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) l’affirment : la crise climatique est devenue la caution de respectabilité pour des régimes peu vertueux et en mal de légitimité. A la stupéfaction des militants pro-démocratie, les premières annonces faites à la 27è Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations-unies sur les changements climatiques (Cop27 – CCNUCC) le confirment : organisation d’une «Journée de la CEEAC» et programmation d’une édition du One planet Summit pour mars prochain à Libreville avec l’appui de la France. Quand on se souvient du climat politique en Angola, au Burundi, au Cameroun, au Congo ou Gabon, on peut se poser des questions. Quand on se remémore des défis sécuritaires en Centrafrique ou en République démocratique du Congo, ou peut nourrir des inquiétudes.

Dialogue de sourds

Corruption endémique, insécurité juridique, dérèglement institutionnel, violation des droits de l’homme : ces caractéristiques de la mal gouvernance ne rebutent nullement les participants à la rencontre de Charm el-Cheikh. A les entendre, des promesses de financement peuvent être faites sans s’assurer de la fiabilité des procédures nationales, l’argent étant censé transiter par des ONG ou fondations de droit étranger. Et tant pis si cela délégitime encore plus des États déjà peu crédibles ! Tant pis si la légalité de ces mécanismes n’est pas garantie ! Tant pis si ces négociations tournent au dialogue de sourds ou si les élites dominantes du Bassin du Congo en profitent pour redorer leur image ou s’offrir une reconnaissance internationale à peu de frais ! Quant aux communautés locales, elles sont priées de s’adapter, le maintien de leur mode de vie n’étant la préoccupation de personne.

Pourtant, en son principe 10, la «Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement» énonce : «Au niveau national, chaque individu doit avoir dûment accès aux informations relatives à l’environnement que détiennent les autorités publiques (…) et avoir la possibilité de participer au processus de prise de décision. (…) Un accès effectif à des actions judiciaires et administratives (…) doit être assuré.»  Peut-on se prévaloir de la participation des citoyens quand le trucage électoral est systématique ? Peut-on garantir leur accès à l’information quand l’opacité est la norme ? Ou quand les scandales de corruption rythment la vie publique ? Peut-on parler de justice quand les appareils judiciaires sont caporalisés ? Pour les démocraties libérales, le découplage des préoccupations environnementales de la réalité politique a les allures d’un renoncement à leurs valeurs. Peuvent-ils s’en satisfaire ?

Confiscation des destins de peuples entiers

Comme l’avait suggéré une coalition emmenée par Amnesty international, «la Cop27 (aurait dû être) une occasion (…) pour la communauté internationale de discuter d’une action climatique ambitieuse et axée sur les droits.» Malheureusement, il n’en est rien, ce sommet étant marqué par un événement révélateur d’une négation des droits humains : la grève de la faim menée par Alaa Abdel Fattah, condamné en 2021 à cinq ans de prison pour «diffusion de fausses informations.» Dans le même temps, de nombreux témoignages font état de féminicides, tortures et brimades diverses infligées aux personnes LGTBQIA par le pays-hôte. Pourtant, le Code de conduite des Cop interdit toute discrimination fondée sur le genre, l’orientation sexuelle, l’origine ethnique ou l’affiliation politique. Les négociateurs s’en souviennent-ils ? Pour l’heure, on le rappellera volontiers : la CCNUCC laisse à l’organisateur le soin de traiter les éventuelles plaintes «conformément à ses politiques, règlements et règles applicables.» Éloquent à souhait…

En Égypte, comme dans la plupart des pays du Bassin du Congo, les droits humains et règles démocratiques sont foulés au pied. Au nom de la lutte contre les changements climatiques, les démocraties libérales ferment les yeux, se rendant complices d’atteintes à la dignité humaine voire de confiscation des destins de peuples entiers. Pour ne plus continuer ainsi, les solutions à la crise climatique doivent reposer sur les piliers de la bonne gouvernance : transparence, redevabilité, inclusion, égalité devant la loi. Autrement dit, le moment est venu d’en finir avec la complaisance, le laxisme et les annonces sans lendemain ni prise sur le vécu des populations. Pour le salut de l’humanité, il faut remettre l’homme au centre des négociations. Et cela passe par la fin des collusions entre destructeurs de l’environnement et ennemis de la démocratie.

 
GR
 

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