S’il veut endosser le costume de Premier ministre, Alain-Claude Bilie-By-Nze doit faire la différence entre politique et politique politicienne.

Premier ministre devenu, Bilie-By-Nze doit gagner en retenue voire en rondeur. Même s’il est chef de la majorité parlementaire, sa tendance à tout réduire à un combat contre l’opposition ne correspond ni à l’esprit ni à la lettre des institutions. © Montage GabonReview

 

Obligation constitutionnelle, la déclaration de politique générale est un moment solennel. Dans son esprit, elle doit défendre les valeurs de la République : union, travail et justice. Dans sa lettre, elle doit promouvoir des principes d’action bien connus : indivisibilité, laïcité et souveraineté nationale. Dans son contenu, elle doit poursuivre les objectifs d’une République sociale : bien-être des individus et résolutions des problématiques sociales. En faisant fi de ces préceptes, nombre de Premiers ministres l’ont vidée de tous sens, la transformant soit en une opération de politique politicienne soit en un plaidoyer pro domo. On l’a vu quand Rose Christiane Ossouka Raponda rendit hommage à l’épouse du président de la République et à la présidente de la Cour constitutionnelle sans mesurer la portée de son initiative. On vient de le revivre, Alain-Claude Bilie-By-Nze ayant choisi d’étaler sa foi chrétienne à l’Assemblée nationale, laissant le sentiment d’être en campagne électorale.

Personnalisation du débat

Les Gabonais doivent-ils s’en «remettre à la puissance tutélaire du créateur» ? Peuvent-ils accepter l’institutionnalisation d’une «journée nationale de prière» ? Selon les données disponibles, la population gabonaise compte 76,5% de chrétiens majoritairement des catholiques, 11,2% de musulmans et 6% d’adeptes des religions traditionnelles.  Mais, on ne saurait en faire un peuple de dévots, l’affiliation ne garantissant nullement la pratique. Mieux, même si un vague déisme a été constitutionnalisé en octobre 2000, notre pays n’a pas de religion officielle. Bien au contraire. Sa Constitution reconnait «toutes les croyances», y compris l’animisme. Au-delà, elle «affirme la séparation de l’État et des religions.» Comment se traduirait la «journée nationale de prière» ? Ne serait-elle pas attentatoire à la liberté de conscience ? Pourquoi la population serait-elle tenue de prier ? Parce que les Gabonais sont un «peuple de croyants» ? Ou parce que le Premier ministre l’aura décidé ? Mais, le Gabon compte aussi des athées et agnostiques.  Et si le Premier ministre est au service de l’État, l’État proclame sa laïcité.

Certains auront tôt fait d’engager un débat sur la laïcité afin de soutenir cette idée. D’autres évoqueront les convictions religieuses pour la légitimer. À moins de transformer la vie publique en une foire d’empoigne, on ne peut se satisfaire d’une telle personnalisation du débat. Surtout venant d’un Premier ministre. Séraphin Akouré Davain a-t-il été militant puis député du Parti démocratique gabonais (PDG) ? Avait-il démissionné de son poste de maire de Lambaréné après une polémique née du sort d’un masque Galoa ? Soit ! Mais où était Alain-Claude Bilie-By-Nze à ce moment-là, c’est-à-dire entre 2005 et 2011 ? Au Rassemblement pour le Gabon (RPG) puis au Rassemblement pour la démocratie et le progrès (RPG). Ces partis sont-ils de la majorité ? L’ont-ils toujours été ? Assurément non. Alors, pourquoi accuser son interlocuteur de transhumance quand on a soi-même un parcours sinueux ? Pour noyer le débat ? Ou pour se donner bonne conscience ?

Retenue voire rondeur

Pour professer la vertu, il faut être irréprochable. Pour se lancer dans des attaques ad hominem, il faut être au-dessus de tout soupçon. Jadis porte-parole, Alain-Claude Bilie-By-Nze pouvait se le permettre, quitte à prétexter des instructions. Comme ses bravades, ses transgressions pouvaient être rattrapées ou corrigées par ses supérieurs hiérarchiques. Premier ministre devenu, il se trouve en première ligne. De ce point de vue, il lui faut gagner en retenue voire en rondeur. Même s’il est chef de la majorité parlementaire, sa tendance à tout réduire à un combat contre l’opposition ne correspond ni à l’esprit ni à la lettre de nos institutions. Par ailleurs chef de l’administration publique, il a le devoir d’en respecter les principes, notamment la neutralité et la responsabilité. S’il veut endosser le costume de Premier ministre, il doit faire la différence entre politique et politique politicienne.

Des déclarations de politique générale, le Gabon en a connu. Aucune d’elle n’a jamais été autant émaillée de considérations personnelles. Jamais Premier ministre ne s’en est servi pour faire du story telling. Pourquoi Alain-Claude Bilie-By-Nze a-t-il cédé à cette tentation ? Pour mieux mettre en récit sa propre histoire ? En 1990, l’homme était étudiant. En vantant ses 33 ans d’engagement politique, il a implicitement reconnu une politisation de la vie estudiantine. En creux, il a admis avoir jadis placé le Syndicat des étudiants gabonais (SEG) au service d’intérêts extérieurs à l’université. Était-ce l’objectif recherché ? On peut en douter. Tourner la langue sept fois avant de parler, faire montre de sobriété : il en va de son intérêt, de celui du gouvernement et de sa famille politique.

 
GR
 

11 Commentaires

  1. Likassa dit :

    Un voyou reste un voyou, son parcours politique mérite un film d’Oscars digne d’Hollywood, il n’y a qu’au Gabon que ce genre de choses peuvent arriver.

  2. NGUEMA BONGO dit :

    Bof, l’histoire du masque est tellement creuse et banale, qu’il est ridicule pour un PM d’en parler. Le type a acheté cet objet avec son pognon. il l’a offert à des amis jusque là je ne vois pas où se situe le problème pour vouloir lui enlever le pantalon comme on aime à le faire.

  3. Forssel EDOU dit :

    Une journée de prière? Pour quoi faire? Pour la dépénalisation de l’homosexualité? Après ça dépend, on prie quel dieu ? Parce que le Dieu unique et Eternel auquel croient les chrétiens et les musulmans est contre l’homosexualité qui est pourtant valorisé par le gouvernement. Quelle confusion !

  4. Gayo dit :

    Parler beaucoup avec aisance comme Bilié donne souvent l’impression que la mythomanie comme c’est de l’intelligence pour ceux qui sont facile à flatter. A moins d’un miracle suite à la journée de prière, il n’y a rien à attendre de la gouvernance d’un homme inconstant et qui n’a de valeur que sa cupidité. Un pays se construit avec des hommes de valeurs et de Principe. Akoure Davin en a de toute évidence, quant à Bilié Bi Nzé il a toujours prouvé le contraire.

  5. BOUASSA dit :

    Pourquoi s’étonner de ce énième dérapage du genre venant de cet individu? Retenons seulement ,comme le dit l’adage  »qu’au pays des aveugles ,le parti au pouvoir, les borgnes sont rois ».
    Au regard de son discours il en ressort qu’il ne sait même pas à consiste la déclaration de politique général d’un premier ministre devant le parlement.
    Ou va le pays avec ce genre de décideurs supposés éclairés?

  6. MONSIEUR A dit :

    Il faut comprendre l’Homme dans toutes ses dimensions (physique, intellectuelle, spirituelle).

    Billy a été dans l’opposition radicale, dans la majorité présidentielle, et maintenant dans le PDG au POUVOIR. Durant son parcourt politique il en a vue de toutes les couleurs; il a subi beaucoup d’humiliation venant surtout de ceux qui sont aujourd’hui dans l’opposition radicale mais qui étaient dans le PDG de l’époque.

    Billy rappelle simplement aux donneurs de leçons (anciens PDGistes et Autres) qui sont actuellement dans l’opposition radicale et qui ont géré ce pays, qu’ils sont également comptables de la pauvreté actuelle du GABON.

    Si Billy est parvenu à être Premier Ministre, c’est tout simplement parce qu’il est pragmatique; il vous laisse croire qu’il fait de la politique politicienne alors qu’il a un objectif précis à atteindre.

    Avec un tel adversaire en face, l’opposition radicale ne doit pas chercher une confrontation directe, mais rentrer en négociations sincères avec lui pour le bien du GABON. Premier Ministre devenu, il a beaucoup de cartes « JOCKERS » à abattre sur table.

  7. Lavue dit :

    On n’a pas besoin de trop parler pour reconnaître que ce Monsieur ne vaut pas grand-chose. Rien qu’à le regarder ça saute aux yeux.

    C’est quelqu’un qui a toujours été au service des autres. De la personnalité il en manque énormément. Depuis un temps il est pleinement au service d’ALI BONGO, il en est récompensé pour ça, pas par ce qu’il aurait des qualités pour diriger un gouvernement. Au fond de lui, il le sait. Le niveau intrinsèque ne s’obtient pas en baignant dans la politique politicienne et dans une éloquence creuse. La base c’est un parcours universitaire sérieux, couronné de succès et de la personnalité, de la droiture. Quand tout ça fait défaut, ça s’en ressent immédiatement.

    Au niveau de la pitoyable gouvernance dans laquelle se trouve le Gabon, c’est pas un Billie-by-Nze qui peut apporter un quelconque changement. On est dans les petits calculs préélectoraux, c’est tout.

    AKURE DAVIN l’a dit et les PDGistes doivent comprendre que c’est le sentiment de la majorité des Gabonais: il faut essayer autre chose, le PDG doit passer la main, sinon ce pays ne connaîtra jamais le développement comme on l’observe ailleurs en Afrique et même dans les pays voisins. Le PDG c’est un repaire de voyous qui ont confisqué le pouvoir, qui sont sûrs de le conserver par tous les moyens et qui se moquent du peuple.
    Avec un budget de 3600 Milliards pour 2 Millions d’habitants et quand on voit le niveau de développement de l’arrière pays, c’est une véritable honte, comparer à des pays Comme le Cameroun, 5000 Milliards de budget pour 65 millions d’habitants ou encore la Côte d’Ivoire, le Sénégal. Le Gabon est un nain, alors qu’il pouvait en être un géant. Malheureusement à sa tête il n’a pas depuis bien longtemps les profils adéquats

    Les PDGistes sont trop nuls, regardez, qui ils ramènent au Gouvernement, des bras-cassés comme les Blaise LOUEMBE, les NDEMEZOO OBIANG. Où est le sérieux dans tout ça. On est dans les mêmes comportements de bouffe sauvage et de gabegie. On prend les mêmes et on recommence. C’est fou non?

    Le peuple doit tout faire pour arrêter ce cycle infernal dans lequel le PDG-BONGO système l’y a plongé.

  8. Lavue dit :

    Eratum: le Cameroun: 25 à 26 millions d’habitants

  9. Yann Lévy Boussougou-Bouassa dit :

    Le premier ministre l’a compris : dès qu’on prononce le nom de Dieu, nombre de compatriotes perdent tout discernement et sont alors aptes à accepter les choses les plus incongrues. Il connaît bien son peuple.

    • Yann Lévy Boussougou Bouassa dit :

      Au fond je crois que son projet est de faire intégrer aux gabonais qu’ils doivent attendre les jours meilleurs comme le croyant attend le retour du Messie et aspire à la vie éternelle, sans trop se soucier des difficultés de son quotidien. Je salue plus bas que terre ce « brillant » sophisme.

  10. Jean Félix Obyang dit :

    Pourquoi une « journée nationale de prière » au Gabon? Prier pour qui, prière pour pourquoi ? Il faut que ce homme nous le dise. Le Gabon est un petit pays. Tout le monde se connait apart Billie bi Nzé qui ne se connait pas lui même. Ce que les PDgiste n’ont pas pu faire en plus de 50 ans de reigne sans partage, ce type pouvoir faire quoi en dehors de se servir? Quel crime le Gabon a-t-il commis pour mériter un tel PM.?

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