En raison du maintien du mot d’ordre de la Convention nationale des syndicats du secteur éducation (Conasysed) et du Syndicat de l’éducation nationale (Sena), l’année scolaire pourrait se retrouver amputée de plusieurs mois, voire compromise. Mais, à y regarder de près, les revendications des enseignants ne relèvent ni du harcèlement ni d’une démarche politicienne.

Les revendications des enseignants traduisent une légitime inquiétude quant au devenir de l’école voire de la société. © Montage Gabonreview

 

Dans une indifférence quasi-générale, la Convention nationale des syndicats du secteur éducation (Conasysed) et le Syndicat de l’éducation nationale (Sena) ont décidé, le 24 novembre courant, de maintenir leur mot d’ordre de grève, lancé le 27 septembre dernier. Si rien n’est fait, l’année scolaire pourrait se retrouver amputée de plusieurs mois, voire compromise. Censé s’achever le 02 janvier prochain, le premier trimestre tire inexorablement à sa fin. Dans le meilleur des cas, le deuxième devrait être mis à profit pour rattraper le temps perdu. Une telle situation aurait inévitablement des répercussions sur le respect des programmes. Pourront-ils être bouclés ? On peut en douter. Les enseignements seront-ils de bonne facture ? Nul ne peut le croire. Du coup, on peut se demander si les examens et concours de la session 2022 ne seront pas dévalués. On peut même douter du niveau réel des apprenants, voire de la crédibilité de certains diplômes.

Un métier à la fois passionnant et exigeant

Pour le citoyen lambda, ces questions ne sont pas nouvelles. Année après année, elles reviennent. Par son autoritarisme et l’addition de solutions de facilité, l’exécutif a fini par laisser l’impression de ne point se soucier du devenir du secteur éducatif. «L’école n’est pas une priorité pour ce gouvernement», assénait, en février 2017, le conseiller stratégique de la Conasysed et du Sena, Marcel Libama. Comme en témoigne la mise au rebut des recommandations des états généraux de mai 2010, l’école gabonaise navigue en eaux troubles. Comme en atteste le sort des préconisations de la task force sur l’éducation, il tombe de Charybde en Scylla. Malgré l’adoption d’une loi d’orientation, les choses vont de mal en pis, la loi de programmation budgétaire étant demeurée un vœu pieux. Du coup, les enseignants en sont réduits à se mettre en grève pour la régularisation de leur situation administrative ou l’organisation des concours d’entrée à l’École normale supérieure (ENS) et à l’École nationale des instituteurs (ENI).

Censés contribuer à la construction de la société, les enseignants exercent un métier à la fois passionnant et exigeant. Tout en transmettant un ensemble de savoirs, ils doivent valoriser les compétences des élèves. Invités à se renouveler chaque jour, ils ont l’obligation d’accompagner les mutations de la société. Autrement dit, afin de faciliter le passage des élèves du statut d’enfants à celui de citoyens instruits et éclairés, les enseignants sont tenus d’apprendre tout au long de leurs vies. Par conséquent, ils doivent pouvoir compter sur un État organisé, à l’écoute et proactif. Vu sous cet angle, les brutalités policières, récemment infligées aux leaders syndicaux, paraissent peu appropriées voire contre-productives. La même remarque vaut pour les stratagèmes déployés par la ministre de la Fonction publique pour ne pas ouvrir les négociations.

Investir dans le capital humain

Pourtant, le gouvernement aurait intérêt à entendre les syndicats. A y regarder de près, leurs revendications ne relèvent ni du harcèlement ni d’une démarche politicienne. Bien au contraire. Expression de difficiles conditions de vie et de travail, elles traduisent une légitime inquiétude quant au devenir de l’école voire de la société. Peut-on désengorger les salles de classe ou garantir la qualité des enseignements sans former les enseignants ? Peut-on s’assurer du niveau des élèves, améliorer leurs performances et crédibiliser les diplômes sans mettre en œuvre un plan de formation continue ou sans procéder au recyclage des enseignants ? Avant de leur demander de favoriser la réussite scolaire des élèves, il faut mettre les enseignants en capacité de mobiliser leurs compétences didactiques, pédagogiques et relationnelles. Avant de leur demander de véhiculer les fondamentaux du vivre-ensemble, il faut leur témoigner de la considération. Si l’État peut geler les formations dans certains secteurs marchands, il ne peut se l’autoriser dans un domaine comme l’éducation,

Il faut renouer avec les concours d’entrée à l’ENS et l’ENI. Régulièrement évoquée, la situation financière ne peut justifier leur abandon. Défini comme «l’ensemble des connaissances, aptitudes, expériences, talents et qualités accumulées» par une population, le capital humain est une composante essentielle de la vie économique ou financière. Y investir relève de l’ardente nécessité. Pour tout dire, aucun pays ne peut se développer ou se construire avec un peuple peu ou mal formé. Comme le disait Nelson Mandela, «l’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde.» Pourquoi le gouvernement s’obstine-t-il à ne pas le comprendre ? Comme jamais auparavant, cette question hante les esprits…

 
GR
 

2 Commentaires

  1. medzomekoure dit :

    Vous pensez que ces gens connaissent la valeur de l’éducation et de la formation? tant ils peuvent « faire d’un chien un ministre » ils occupent des postes de responsabilité importants sans avoir les compétences qui vont avec…
    le pays est dans un état de délabrement indescriptible, pour eux tout va bien. Les universités n’en sont que de nom, pour eux, »circulez, il n’y arien à voir…
    certains bachelier de la dernière session ne savent pas où aller, faute d’inscription, ne vous en faites pas, le Gabon sera émergent en 2025…

  2. MOUNDOUNGA dit :

    Bsr. « pourquoi le gouvernement s’obstine-t-il à ne pas le comprendre ? Comme jamais auparavant, cette question hante les esprits… ».Honnêtement la personne qui pourra répondre à cette question mérite les hommages de la NATION. Amen.

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