Comme celle de Magloire Ngambia ou de Brice Laccruche-Alihanga, l’incarcération de Léandre Nzué consacre l’échec de la «régénération» et de la «revitalisation» tant vantées par le Parti démocratique gabonais (PDG).

Avant d’atterrir à la mairie de la capitale, Léandre Nzué a été, tour à tour, secrétaire général adjoint du PDG et conseiller politique du président de la République. C’est dire si les détenus d’aujourd’hui font partie de la fine fleur du parti au pouvoir ou de ses satellites. © Ramsès Ekomi‎

 

Pour la troisième fois, le pouvoir est secoué par des affaires de corruption. En janvier 2017, l’ancien «ministre de la terre et du ciel», Magloire Ngambia, fut accusé d’avoir détourné 500 milliards de nos francs, avant d’être jeté en prison. Tombèrent avec lui, des membres du gouvernement et hauts cadres de l’administration, notamment l’ancien ministre du Pétrole Etienne Dieudonné Ngoubou. En décembre 2019, l’Association des jeunes émergents volontaires (Ajev) fut démantelée, ouvrant la voie à l’incarcération de l’ancien directeur de cabinet du président de la République, accusé de «détournements de deniers publics, concussion et blanchiment de capitaux». Dans sa chute, Brice Laccruche-Alihanga entraîna de nombreuses personnalités, notamment Tony Ondo Mba, ancien ministre de l’Energie, Noël Mboumba, ancien ministre du Pétrole et, Roger Owono Mba, ancien ministre de l’Economie et des Finances. Depuis le 11 du mois courant, l’histoire semble repasser les plats. Sous le coup de huit chefs d’accusation, le maire de Libreville a été placé en détention.

Affairistes, hâbleurs et arrivistes de tout poil

Même si le Parti démocratique gabonais (PDG) fait mine de ne pas s’en rendre compte, ces incarcérations soulignent les limites de sa pratique politique. Pointant les ratés de sa gestion des ressources humaines, elles mettent en lumière les insuffisances de sa gouvernance. Au-delà, elles traduisent le caractère hérétique de sa conception de la gestion d’un Etat. Après tout, Magloire Ngambia fut longtemps présenté comme le symbole du renouvellement de l’élite politico-administrative, l’Ajev était décrite comme un vivier de jeunes talents, censés revivifier l’appareil d’Etat. Avant d’atterrir à la mairie de la capitale, Léandre Nzué a été, tour à tour, secrétaire général adjoint du PDG et conseiller politique du président de la République. C’est dire si les détenus d’aujourd’hui font partie de la fine fleur du parti au pouvoir ou de ses satellites. C’est aussi dire s’ils ont symbolisé son avenir. C’est enfin dire si leur incarcération consacre l’échec de la «stratégie des 2R», c’est-à-dire «régénération et revitalisation».

A cet égard, le mutisme du PDG traduit une gêne certaine : une fois de plus, l’ex-parti unique assiste à la descente aux enfers d’une personnalité représentative de son opération de renouvellement. Ayant vanté sa «régénération», il doit admettre avoir tout misé sur les aspects cosmétiques comme l’âge. Ayant tiré gloriole d’une prétendue «revitalisation», il doit reconnaître avoir négligé les aspects éthiques, ouvrant ses instances aux affairistes, hâbleurs et arrivistes de tout poil. Certes, le PDG pourra toujours plaider des «erreurs de casting.» Certes, il prétendra agir dans un esprit de «dialogue» et de «tolérance.» Certes, il se présentera comme un «parti de masse», ouvert aux classes populaires et offrant à chacun sa chance. Mais, avant toute chose, les partis politiques sont au service de l’intérêt général, de la chose publique et du bien commun. S’ils véhiculent des idées, ils promeuvent des valeurs et principes. Ces seules exigences suffisent à ruiner la thèse de l’égalitarisme.

Salaire de l’enfermement

Depuis 2009, une partie de l’opinion n’a eu de cesse de dénoncer «l’amateurisme» et «l’incompétence» de certaines élites dirigeantes. Depuis 2016, de nombreux observateurs ont mis en garde contre les risques d’un jeunisme exacerbé, brocardant une «république des imberbes». Tout au long des quatre dernières années, des antécédents judiciaires et faits d’armes ont été rappelés. Comme la nomination de Brice Laccruche-Alihanga, l’élection de Léandre Nzué à la tête de la mairie de Libreville a été accueillie avec scepticisme. Pour le PDG, son incarcération est la rançon de la surdité, le salaire de l’enfermement. En le désignant pour défendre ses couleurs, l’ex-parti unique jetait son dévolu sur une personnalité à la réputation de caïd. Au vu de la suite des événements, il doit au moins militer pour le respect des droits de la défense. Autrement, ce serait un lâchage de plus.

Au moment de l’arrestation de Magloire Ngambia, on avait épilogué sur l’inexpérience et la cupidité d’un jeune homme pas assez madré pour résister aux feux faustiens du pouvoir. Durant la chute de Brice Laccruche-Alihanga, ses déboires judiciaires et outrances avaient alimenté la chronique. Aujourd’hui, d’aucuns font leurs choux gras de la personnalité haute en couleurs de Léandre Nzué. Dans ces trois cas, le pouvoir établi a fait la promotion de cadres peu en phase avec les règles communément admises. De ce point de vue, sa responsabilité ne saurait être occultée. Pour le PDG et ses alliés, c’est un avertissement de plus. Peut-être de trop…

 
GR
 

14 Commentaires

  1. Fredie dit :

    « Avec de l’argent, on peut faire danser n’importe quel macaque »
    . . . . . Proverbe Créole . . .

    Le PDG est convaincu qu’avec l’argent on peut tout faire.
    mais force est de constater que dans le cas présent.. ben.. c’est raté.

  2. Dupond dit :

    A quand le tours d’Ali et de sa clique ?

  3. Gayo dit :

    Si on avait à la tête de ce pays un homme intelligent et non un médiocre depuis le banc de l’école et dont la mentalité etait celle d’un d’une personne qui avait le souci de l’excellence des qualités morales et professionnelles des personnes qui devraient servir une nation au sommet, on aurait jamais eu en première ligne de ce régime des hommes comme Matha dont la première qualité est la maîtrise du tripatouillage électorale depuis des décennies, donc le vole, Alain Claude Bilie dont tout le monde sait qu’il est de moralité douteuse, Serge William Akassaga, le trafiquant d’acte de naissance, Laccruche Alihanga dont les affres a la BGFI banque laissent présager d’une mentalité d’homme sulfureux, Accrombessi dont on ne sait trop de quel expertise, de quelle expérience il peut faire profiter le pays au sommet si ce n’est son affairisme qu’il partage avec Ali. Ali est plus a l’aise avec des gens peu recommandables parce que lui-même est un égoïste de mauvaise moralité. D’ou proviennent ses 600 milliards de fortunes? Il a besoin d’être avec les affairiste et opportunistes comme lui. Qui se ressemblent s’assemblent. Et la mégalomanie est le pire des défaut que puisse avoir un chef dont l’intelligence est limitee. L’Esprit de mégalomanie le pousse davantage dans les bras d’opportunistes de peu de fois qui sont prêts a tous les discours invraisemblables et antirépublicains et stupides pour plaire au chef et montrer qu’ils sont des supporters inconditionnelles Karine Arissani, Leandre Nzue et le defunt Leandre Nzue en sont les illustrations.

  4. Lavue dit :

    Très bonne analyse de Roxane Bouenguidi. Claire, nette et ptécise comme aimmait dire quelqu’un.
    Pour moi le PDG n’est pas un pati politique, c’est une secte où les adhérents y vont avant tout par par pur opportunisme attirés par l’espoir de l’argent facile, les postes juteux et où se pratiquent malheureusement des choses ignobles. Pas besoin d’exemples pour étayer mon propos. La franc-maçonnerie nègre avec son lot: les crimes rituels, la pédophilie, l’homosexualité, la promotion des cancres etc. Voilà le réalité du PDG d’aujourd’hui. Avec une telle « idélogie » ne peut rien produire de bien. Aujourd’hui tout ce qui préoccupe les PDGistes c’est la conservation coûte que côute du pouvoir. Le Développement du pays est secondaire. Des Léandre NZUE, des LACCRUCHE, des NGAMBIA, il y zn beaucoup au sein du PDG. Ce machin est à détruire, il faut reconstruire autre chose qui pourrait apporter un peu d’espoir. Avec le PDG et son bras armé la Garde Républicaine y a plus d’espoir. Les enfants vont souffrir dans le pays, car une relève bien formée et responsable n’est pas la préoccupation des tenants du pouvoir. On préfère faire dans le superficiel et le paraître et les petits calculs politiciens.

    Vraiment dommage de voir que le Gabon ne métrite que ça. Son rayonnement international d’antan est entrain de disparaître sans que ça ne émeuve personne. A croire qu’ils ne s’en rendent même pas compte.
    Pitié.

  5. Ipandy dit :

    En effet, ROXANE à qui incombe la responsabilité de tout ces échecs ? A ces erreurs de casting ?
    Je pense pour ma part ces arrestations et incarcérations ne rassurent pas les gabonais. Bien au contraire, les gabonais doutent de plus en plus de leurs dirigeants.
    Doit on simplement reconnaître que le parti au pouvoir a montré ses limites dans la gestion des affaires du pays ?!!

    Où que c’est le pays qui c’est perdu dans la gestion du PDG?

  6. moundounga dit :

    Bjr. Morceau choisis :
    L’entracte « 1-Pointant les ratés de sa gestion des ressources humaines, elles mettent en lumière les insuffisances de sa gouvernance.
    2-le symbole du renouvellement de l’élite politico-administrative
    3- l’Ajev était décrite comme un vivier de jeunes talents, censés revivifier l’appareil d’Etat
    4-C’est enfin dire si leur incarcération consacre l’échec de la «stratégie des 2R», c’est-à-dire «régénération et revitalisation

    L’épilogue

    6-c’est un avertissement de de trop

    • Fille dit :

      Morceau choisis :
      L’entracte « 1-Pointant les ratés de sa gestion des ressources humaines, elles mettent en lumière les insuffisances de sa gouvernance… Insuffisances de gouvernance datant d’aujourd’hui d’après vous ? Ce truc appelé pdg est imposé aux gabonais depuis plus de 50 ans, aucun résultat probant pour le pays et les populations et vous voulez en faire une actualité ?
      2-le symbole du renouvellement de l’élite politico-administrative…Tout juste de la belle phrase. Vous parlez du Gabon là ou bien les mots aussi y perdent de leur signification ?
      3- l’Ajev était décrite comme un vivier de jeunes talents, censés revivifier l’appareil d’Etat… C’est bien ce que je disais. Les mots, rien que les mots sans consistance deviennent des slogans vides et vagues. Vivier de jeunes talents ?
      4-C’est enfin dire si leur incarcération consacre l’échec de la «stratégie des 2R», c’est-à-dire «régénération et revitalisation…Juste des slogans autant que pdg Oyé, Rénovation, Emergence et j’en passe. Vous m’en direz tant.

      L’épilogue

      6-c’est un avertissement de de trop…Avertissement de qui ? Mettez nous au parfum. Pauvre de nous.

  7. moundounga dit :

    Bjr. Morceau choisi: « les partis politiques sont au service de l’intérêt général ». je trouve cela discutable. les partis sont d’abord privé à l’exemple d’un club de football. Il appartient d’abord à une personne physique. Il (le parti) acquiert le caractère public par défaut du fait de son immatriculation ou par effet d’entrainement par rapport à sa prise du pouvoir qui est sa conquête. Car par définition l’Etat est impersonnel et général comme la loi. c’est à ce moment peut être que l’intérêt général d’un parti par rapport à ses actes peut être mis en évidence. Ame.

  8. OBAME dit :

    @ Fille,
    Belle critique de l’analyse de Mme BOUENGUIDI.
    Quels termes auriez vous utilisez ppur traiter ce sujet vu que « les mots aussi y perdent de leur signification »

    • Fille dit :

      @OBAME, lorsque les mots perdent leur de leur signification, il y a entourloupe. Si on est honnête avec soi-même, le silence vaut encore mieux que la broderie. Mon intervention n’a rien de personnel contre notre Roxanne même si elle surfe sur les mots. Ce qui peut se comprendre.

  9. Akoma Mba dit :

    Le problème du Gabon ce sont nous tous les gabonais qui regardons comme des maboules comment la bande d’Ali Baba pillent le pays. Toute la famille Bongo devrait être en prison. Ils pillent le pays depuis 1967.A bon entendeur…

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