La liste des invités ne peut ni susciter l’espoir ni nourrir l’espérance. C’est dire s’il faut mettre le holà aux initiatives unilatérales. C’est aussi dire s’il faut rendre à la science sa matière.

Que diront-ils de nouveau à Libreville ? Qu’apporteront-ils de plus dans la compréhension des défis, contraintes et enjeux liés à la crise climatique ou à l’érosion de la biodiversité ? Pourquoi leur participation serait décisive quand ils n’ont pu faire bouger les lignes lors de rencontres placées sous les auspices de l’Onu ? © Gabonreview

 

Plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) l’ont dit, mais il convient de le redire : année après année, les négociations sur le climat ou la biodiversité se ressemblent. Initiative après initiative, elles n’apportent rien au débat. Systématiquement, elles se transforment en villégiatures payées par le contribuable. Si l’on y ressasse les mêmes «fausses solutions», les mêmes personnalités s’y retrouvent. Selon nos confrères de Jeune Afrique, le One Forest Summit de mars prochain ne devrait pas faire exception. Aux côtés des présidents gabonais et français, on devrait y retrouver la plupart des dirigeants des pays membres de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). On devrait aussi y rencontrer le chancelier allemand, le Premier ministre norvégien et, la présidente de la commission de l’Union européenne. Pour apporter leur caution ou pour orner la photo de famille, quelques scientifiques ou militants écologistes seront de la partie.

Partenaires triés sur le volet

Parmi les participants, y aurait-il de la place pour des personnalités comme le congolais René Ngongo ou le burkinabé Yacouba Sawadogo, lauréats du Right Livelihood Award en reconnaissance de leur engagement écologique ? La même question vaut pour l’ivoirien Mathieu Wadja Egnankou, le camerounais Samuel Nguiffo, le rwandais Eugène Rutagarama, le congolais Corneille Ewango, la kenyane Ikal Angelei, la tanzanien Edward Loure, le libérien Alfred Brownell et, le gabonais Marc Ona Essangui, tous récipiendaires du Prix Goldmam pour l’environnement. Au-delà, on peut se demander si le coordonnateur du Réseau des populations autochtones et locales pour la gestion des écosystèmes forestiers d’Afrique centrale (Repaleac), Joseph Itongwa Mukomo, ou le fondateur de Forest Peoples Programme (FPP), le socio-anthropologue britannique Marcus Colchester, n’auraient pas dû être invités.

Au vu des personnalités annoncées, une chose est sûre : la rencontre de Libreville ne permettra pas de renforcer «la coopération et le dialogue sur la gestion durable des forêts». Comme elle mettra en scène des «partenaires du Partenariat pour les forêts du Bassin du Congo (PFBC)» triés sur le volet, elle ne valorisera pas les «initiatives existantes». Encore moins les vrais acteurs de terrain. En revanche, elle fera la promotion d’entités engagées dans l’expansion des monocultures. Du coup, cette liste montre le peu d’intérêt des organisateurs pour des problématiques pourtant cruciales : coupes à blanc, commerce de bois à la légalité douteuse, violation des droits des communautés, conflit homme/faune… Au-delà, elle souligne la nécessité d’en finir avec cet inutile affichage pour s’attaquer aux causes : l’exploitation des combustibles fossiles et les changements d’affectation des terres.

La bouteille à l’encre

S’il est ronflant, ce casting ne peut susciter l’espoir. Il ne peut nourrir d’espérance non plus. A quelques différences près, il renvoie aux aréopages réunis lors des différentes conférences des parties, singulièrement celles dédiées aux changements climatiques. En novembre dernier à Charm-el-Cheickh, Ali Bongo, Denis Sassou Nguesso, Paul Kagame et Évariste Ndayishimiye étaient déjà de la partie. Idem pour Emmanuel Macron, Olaf Scholz, Jonas Gahr Støre et Ursula Von der Leyen. Quant à Jane Goodall et Simon Lewis, ils sont de tous les raouts internationaux. Que diront-ils de nouveau à Libreville ? Qu’apporteront-ils de plus dans la compréhension des défis, contraintes et enjeux liés à la crise climatique ou à l’érosion de la biodiversité ? Pourquoi leur participation serait décisive quand ils n’ont pu faire bouger les lignes lors de rencontres placées sous les auspices de l’Organisation des Nations-unies (Onu) ? Le One Forest Lab ? Comment se positionnerait-il par rapport au Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), à la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) et à l’Observatoire satellital des forêts d’Afrique centrale (Osfac) ?

Comme sa pertinence, l’utilité du One Forest Summit reste à démontrer. Sur son statut, son financement, son objet, les résultats attendus, comme sur les critères de sélection des participants, le déroulement des sessions thématiques ou le suivi de ses résolutions, c’est la bouteille à l’encre. Y compris d’un point de vue diplomatique, on n’en voit pas la plus-value. Le pouvoir de Libreville peut toujours en tirer une gloriole, au risque d’apparaître comme l’un des derniers avatars de la Françafrique. Ce ne sera jamais à l’avantage de son pendant français, déjà accusé d’arrière-pensées politiciennes. Encore moins de la cause écologique, devenue un prétexte à toutes les collusions. C’est dire s’il faut mettre le holà aux initiatives unilatérales. C’est aussi dire s’il faut remettre les organismes de coopération au centre du jeu. C’est enfin dire s’il faut rendre à la science sa matière.

 
GR
 

3 Commentaires

  1. messowomekewo dit :

    Ce n’est ni plus ni moins qu’un rendez vous des dictateurs avec leur maître.

  2. KIEM dit :

    Macron et ses « Préfets de région » comme dirait Alpha Blondy

  3. CYR Moundounga dit :

    Bjr. Je voudrais juste savoir où est la pertinence de ce texte si déjà à l’avance l’on sait à quoi on s’attend ? Amen.

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