Alors que le Gabon se relève du renversement du régime Bongo-PDG, un tweet d’Alain-Claude Bilie-By-Nze en 2021 résonne étrangement comme un présage. Ce message, controversé, pointé d’un doigt accusateur mais aussi ignoré à l’époque, était pourtant un avertissement clair de la crise à venir. Avec le recul, l’appel sibyllin du ministre de l’Énergie de l’époque offre une perspective inestimable sur le climat politique pré-coup d’État.

«Avant la chute de Rome, les Romains étaient sûrs (…) que leur monde durerait toujours sans de grandes mutations. Nous serions bien sages de ne pas imiter leur certitude» (Alain-Claude Bilie-By-Nze).© GabonReview

 

Le 30 août 2023, le régime d’Ali Bongo et du Parti démocratique gabonais (PDG) s’effondrait après la prise du pouvoir par l’armée. Deux ans plus tôt, en août 2021, alors ministre de l’Énergie et des Ressources hydrauliques, Alain-Claude Bilie-By-Nze avait pourtant tenté d’alerter discrètement son camp politique sur les dangers qu’il courait (lire GabonReview dans «Tweets d’Alain-Claude Bilie-By-Nze : Une invite au sursaut».

«Avant la chute de Rome, les Romains étaient sûrs (…) que leur monde durerait toujours »

Dans un tweet sibyllin, Bilie-By-Nze avait appelé à la «vigilance» et à ne pas imiter «la certitude» des Romains avant la chute de Rome. Plus concrètement, quelques jours après le retrait de Jean Eyéghé Ndong de la Coalition pour la nouvelle République (CNR) et son retour au PDG, le tweet recommandait : «N’oublions pas de lire ou de relire le Cheval de Troie». Mettant en garde contre les «transfuges de l’opposition», qu’il comparait au «cheval de Troie», il ajoutait alors : «Avant la chute de Rome, les Romains étaient sûrs (…) que leur monde durerait toujours sans de grandes mutations. Nous serions bien sages de ne pas imiter leur certitude».

Ces mises en garde inhabituelles dans la bouche d’un baron du régime lui avaient valu une volée de bois vert de la part de ses coreligionnaires. Pourtant, deux ans plus tard, force est de constater que M. Bilie-By-Nze avait vu juste.

Entêtement du peuple, renforcement de l’opposition, renfort de l’armée

Le pouvoir Bongo-PDG, malgré des signes évidents de fragilité, a continué à naviguer «en eaux troubles», ne parvenant pas à mobiliser autour d’un projet politique. La dégradation économique et sociale s’est poursuivie, aggravée par le Covid-19. Et le peuple s’est braqué, renforçant l’opposition, jusqu’à provoquer la chute du régime, aidée en cela par les militaires coalisés au sein du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI).

Si le pouvoir avait écouté les mises en garde de M. Bilie-By-Nze, s’il avait accepté le débat interne et entrepris de vraies réformes, serait-il parvenu à redresser la barre et à éviter le naufrage ? En bâillonnant toute voix discordante, n’a-t-il pas précipité sa propre perte ?

Dernier Premier ministre du régime déchu, M. Bilie-By-Nze peut légitimement estimer avoir eu raison avant l’heure. Ses appels de 2021 au «sursaut» et au «ressaisissement» résonnent comme des occasions manquées pour le régime déchu. S’il peut être tenu pour partie prenante du bilan des années Ali Bongo, la chute du PDG lui donne, néanmoins, raison a posteriori.

 
GR
 

3 Commentaires

  1. Bertin dit :

    n’oublions pas également ce qu’il a dit du haut de la tribune de l’Assemblée Nationale »le PDG n’a pas l’intention de laisser le pouvoir… »

    • DesireNGUEMANZONG dit :

      En plus, il a eu le culot de dire que l’alternance n’est pas inscrite dans la Constitution gabonaise lors d’une interview télévisée.

      Ces « prétendument hauts fonctionnaires » ne méritent de pensions de retraite au regard des manquements graves observés dans leur fonction.

      L’Etat gabonais réaliserait des économies en sanctionnant ces « oiseaux de malheurs ». Leur incurie a failli précipité le pays dans les abysses dans lesquels on serait plongé à tout jamais.

      On ne va pas vous regretter! Déjà à l’UOB (je m’en souviens), vous foutiez la « merde » (Monsieur Ndemend’zo était Ministre de l’Enseignement supérieur) et c’est la même « merde » que vous avez foutu au gouvernement du pays. La Justice gabonaise doit statuer votre cas et bien d’autres. L’argument du « sentiment du travail accompli » est un « déni » majeur de votre responsabilité. Ce n’est pas recevable en l’état!

      « La durée de vie d’une dictature dépend de l’ampleur de notre silence » disait Alain Mabanckou (écrivain et enseignant franco-congolais). Votre silence (activisme) a fait prospérer la dictature d’Ali Bongo Ondimba.

      Votre patriotisme est de papier. Quand on est patriote, on agit contre l’obscurantisme d’Etat.

      Cordialement.

  2. SERGE MAKAYA dit :

    Lui et beaucoup d’autres rapaces n’ont jamais été au service du peuple Gabonais, mais plutôt d’eux-mêmes et de leurs familles. Etre ministre (ou 1er ministre) doit être un sacerdoce. Les ministres se sacrifient pour le peuple et non le contraire comme ça se passait chez nous depuis 1960. A Ntare Nzame. Pitié.

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