Toutes les concertations ayant viré au jeu de dupes, les tenants de ’’la Paix des Braves’’ sont sommés d’en décliner le contenu.

Si l’appel de Ndemezo’Obiang aux retrouvailles de «tous les fils spirituels de (…) Omar Bongo Ondimba» fut lancé au terme d’une audience à la présidence de la République, Ali Bongo observe le mutisme sur cette question. © Facebook/Capture d’écran par Gabonreview

 

Le Parti démocratique gabonais (PDG) peut-il faire évoluer sa pratique politique ? Peut-il rompre avec les méthodes du passé ? Vante-t-il une prétendue «régénération» ? Le voici engagé dans un flirt poussé avec un vieux baroudeur de la politique. Glose-t-il sur une supposée «revitalisation» ? Le voilà recyclant des techniques éculées. A la faveur d’une «fusion-absorption» avec Démocratie nouvelle (DN), il a ramené le curseur à 2002 : cette année-là, une opération similaire fut menée avec le Parti de l’unité du peuple (PUP) et le Mouvement commun de développement (MCD). Avec «l’Appel à la Paix des Braves», il est reparti à l’aube des années démocratiques quand Pierre-Louis Agondjo Okawé invitait la classe politique à se retrouver.

Jeu de dupes

Près de 20 ans en arrière, Louis-Gaston Mayila et Paul Biyoghé Mba acceptaient de fondre leurs partis dans le PDG. S’ils avaient été récompensés, ils n’avaient nullement contribué à l’amélioration de la gouvernance politique. Pour le premier cité, l’idylle dura un peu de moins de cinq ans : se plaignant d’être peu écouté, il choisit de s’en aller en juillet 2007, portant l’Union pour la nouvelle république (UPNR) sur les fonts baptismaux. Quant au second, il crie son mal-être depuis quelques années maintenant, se réfugiant dans un activisme associatif peu ordinaire. «L’Appel à la Paix des Braves» ? Ayant débouché sur les Accords de Paris, cette initiative reste, aux yeux de nombreux observateurs, le prélude à un processus de liquidation des acquis de la Conférence nationale de 1990. Pas vraiment engageant…

En apparence, la demande de limitation du nombre de partis politiques peut faire sens. De prime abord, la demande de dialogue participe d’un désir d’améliorer la gouvernance. Mais, les fondamentaux de la démocratie invitent à la prudence. Mieux, l’expérience du passé alimente la suspicion. Consacrée par le droit positif, la liberté d’association est un principe à valeur constitutionnel. De nature à réduire les risques de face-à-face entre l’individu et le pouvoir politique, elle contribue à la structuration de la vie civique. Comme le professe Alexis de Tocqueville, «pour que les hommes restent civilisés ou le deviennent, il faut que parmi eux l’art de s’associer se développe et se perfectionne.» Autrement dit, les partis comme les associations, contribuent à rendre les citoyens moins fragiles face aux abus des pouvoirs publics. De ce point de vue, le débat sur leur limitation paraît contreproductif voire antidémocratique. Surtout quand toutes les concertations ont viré au jeu de dupes, le parti au pouvoir cherchant à demeurer le régisseur exclusif des rapports sociaux.

Pétard mouillé

Peu importent les circonvolutions rhétoriques, les développements de ces derniers jours sentent bon la naphtaline. N’offrant aucune perspective, ils n’indiquent pas de dessein collectif. Après tout, à ce jour, René Ndemezo’Obiang cumule 42 ans de vie publique. Tour à tour chantre du Rassemblement social-démocrate gabonais (RSDG, parti unique à courants internes, mort-né, proposé par Omar Bongo en 1990) puis baron d’un PDG arrogant, il en démissionna en mars 2015. Au terme d’un intermède de six ans, et moins de 20 mois dans l’opposition, il ne devrait avoir aucun mal à renouer avec ses bonnes habitudes. Si «l’Appel à la Paix des Braves» venait à connaitre une suite, sa roublardise et son art consommé de la rhétorique ne devraient pas être de trop. Comme en 2017, quand il s’était agi de promouvoir le «Dialogue national d’Angondjé», on devrait le retrouver par monts et par vaux, battant les estrades pour prêcher la bonne parole.

Pour l’heure, l’ancien président de DN doit lever une hypothèque de taille : le silence du président de son nouveau parti. Si son appel aux retrouvailles de «tous les fils spirituels de (…) Omar Bongo Ondimba» fut lancé au terme d’une audience à la présidence de la République, Ali Bongo observe le mutisme sur cette question. Pis, tout en évoquant la disposition de son patron à «tendre la main», son porte-parole s’est refusé à dialoguer «pour le plaisir.» Les tenants de «l’Appel à la Paix des Braves» sont-ils disposés à en décliner le contenu ou à lui indiquer les «sujets (…) qui relèvent des préoccupations concrètes, au quotidien des populations» ?  Voire… En absence d’une prise de parole du président de la République, peuvent-ils faire aboutir leur idée ? On  en doute. Où l’on en vient à se demander si tout ce ramdam n’est pas un échec de plus, un pétard mouillé, révélateur d’une incapacité à se renouveler.

 
GR
 

3 Commentaires

  1. SERGE MAKAYA dit :

    JE POSE JUSTE UNE QUESTION AUX HOMMES ET FEMMES POLITIQUES DE CE PAYS : QUAND ALLONS-NOUS ARRÊTER CETTE MASCARADE ?

Poster un commentaire