À en juger par les réactions des internautes, ni la menace ni la coercition et, encore moins, les entraves aux libertés ne restaureront la confiance.

Danger pour l’Etat de droit, menace pour la démocratie : «Si on critique Dieu, notre créateur, pourquoi pas vous ?», dixit un internaute gabonais. © Gabonreview

 

«Il y a deux types de lois : juste et injuste. Je serais le premier à soutenir l’obéissance à des lois justes. On n’a pas seulement une responsabilité légale mais morale à obéir aux lois justes. Inversement, on a une responsabilité morale à désobéir à des lois injustes. Je suis d’accord avec Saint Augustin qu’une loi injuste n’est pas une loi», écrivait Martin Luther King dans ‘’Lettre de la prison de Birmingham ». Y aurait-il aujourd’hui des gens pour défendre les lois Jim Crow ? Au vu de leurs effets, plus personne. Pourtant, d’aucuns peinent à tirer les leçons de l’Histoire. A la lecture de sa nouvelle loi organique, on peut le dire de la Cour constitutionnelle : désormais, «Toute personne (…) ou tout organe (…) auteur (…) d’attaques de quelque nature que ce soit contre la Cour constitutionnelle ou l’un de ses membres (pourra) être traduit devant le tribunal correctionnel suivant la procédure de flagrant délit.» Pis, «la Cour constitutionnelle (pourra) directement soit infliger des amendes soit prononcer des inéligibilités ou les deux sanctions à la fois.» En outre, l’auteur pourra «en plus faire l’objet de sanctions disciplinaires par l’autorité administrative dont il relève.» Danger pour l’Etat de droit. Menace pour la démocratie.

Raidissement généralisé

Au lendemain de l’adoption de cette ordonnance en Conseil des ministres, nous avions pointé les incongruités et non-sens contenus dans ce texte. Tirant la sonnette d’alarme, nous avions mis en garde contre l’instauration de la pensée unique et les atteintes à l’égalité devant la loi. «En créant le délit d’offense à la Cour constitutionnelle ou à l’un de ses membres (ce texte) consacre la personnalisation du débat public et de l’appareil d’Etat», écrivions-nous. Depuis lors, nombre de citoyens ont fait écho à nos inquiétudes. Sur la page Facebook de notre confrère Gabonactu.com, ils ne vont pas avec le dos de la cuillère. Dénonçant la marche vers un «régime autocratique et totalitaire», certains invitent la presse à ne plus «couvrir toute activité de la Cour constitutionnelle.» S’élevant contre une «dérive liberticide et des pratiques moyenâgeuses», d’autres présentent les juges constitutionnels comme des «intouchables.» «Si on critique Dieu, notre créateur, pourquoi pas vous», s’interroge un internaute. Et un autre de trancher : «Même la Corée du Nord a menti

Manifestement, l’opinion est scandalisée, exaspérée par cette réforme. Soupçonnant les juges constitutionnels d’œuvrer à l’installation de l’«obscurantisme», les accusant d’être allergiques à la critique, leur reprochant de ne pas mesurer combien «le Gabon recule dans tous les domaines», elle en arrive à imputer la «faute aux forces de l’ordre.» Autrement dit, elle se prononce pour les voies alternatives d’accession au pouvoir. Des réactions pas toujours compatibles à l’idéal démocratique. Des propos peu respectueux des institutions. Mais autant on doit faire grief à certains d’emprunter de tels raccourcis, autant on peut se demander si cette bunkérisation de la Cour constitutionnelle n’en rajoute pas à un raidissement généralisé.

Séismes juridico-institutionnels

Depuis la fin de la présidentielle d’août 2016, la juridiction constitutionnelle multiplie les décisions inédites. Se fondant sur une idée bien à elle du pouvoir d’interprétation, s’appuyant sur une compréhension particulière de la régulation, elle a été à l’origine de séismes juridico-institutionnels : révocation du gouvernement par ses soins, dissolution de l’Assemblée nationale puis transfert de l’intégralité des pouvoirs du Parlement au Sénat et, introduction de la notion d’«indisponibilité temporaire» dans la littérature juridique. Or, pour mettre fin aux critiques à son encontre, elle doit rendre des décisions justes, c’est-à-dire claires, compréhensibles par le plus grand nombre et motivées. Ni la menace ni la coercition et, encore moins, les entraves aux libertés ne restaureront la confiance. Perçues comme autant d’aveux de culpabilité, les protections particulières accroitront toujours la défiance, faisant le lit aux polémiques de toutes sortes.

Même si certaines personnalités peuvent le vivre mal, on ne peut dénier aux journalistes le droit au libre commentaire et à la critique, reconnus par la Charte de Munich. Comme le mentionne l’article 42 de la loi n° 019/2016 portant Code de la communication, on ne peut les contraindre à «exprimer une opinion contraire à (leur) conviction ou à (leur) conscience professionnelle.» Pour toutes ces raisons, les membres de Cour constitutionnelle n’avaient rien à gagner à accompagner un texte aussi ciblé et personnalisé. S’ils tenaient à leur réputation, ils auraient choisi de relire Saint Augustin. A moins d’un retrait pur et simple, l’article 13 de cette loi organique n’a pas fini de faire des remous.

 
GR
 

5 Commentaires

  1. SERGE MAKAYA dit :

    C’est bien ma fille, tu écris bien le français. Ce serait encore mieux de traduire cet article dans ta langue vernaculaire pour faire passer ton message à ceux de ton ethnie qui ne savent pas lire le français. Seulement, vois-tu, malgré toute la peine que tu t’es donné pour écrire cet article, les usurpateurs qui continuent à gérer ce pays s’en foutent éperdument de toi et de ton intervention. Ils n’en ont que foutre. Beaucoup comme toi, moi et bien d’autres dénonçons la supercherie, la duplicité de ce régime sorti tout droit des entrailles de l’enfer.

    Il est malheureusement IMPOSSIBLE de ramener le démon à la raison. le DIABLE, dans son essence, est MAUVAIS. Il ne pourra JAMAIS être BON. Comprends-tu cette vérité ma fille ? Par conséquent, le seul moyen de ramener le démon à la « raison », c’est de procéder à un EXORCISME qui le chassera définitivement de notre territoire. entendons ici par exorcisme une BATAILLE qui doit se faire avec les fils et filles de notre pays. Et pour arriver à gagner cette bataille, il nous faut d’abord construire (bâtir) l’unité nationale. Ce qui est très difficile à réaliser, parce que le démon gagne toujours en nous divisant. A Ntare Nzame !!

    Mais ne nous décourageons pas pour autant, car, comme dit si bien l’adage, quel que soit la durée de la nuit (des ténèbres), le jour fini toujours par se lever.

  2. Gayo dit :

    La sorcière Karaba, tu n’es pas éternelle. Tu peux encore te répentir et abandonner le mal. Commence par prendre ta retraite.

  3. NGUEMA BONGO dit :

    Cette triste sortie de la cour, les gabonais en sont définitivement habitués. Quand une élection se pointe, cette tour de pisse avec sa troupe de démons qui y habitent, cherchent par tous les moyens comment pérenniser le diable dans la maison.
    Un jour, oui un jour, les enfants de vos enfants et toutes vos descendances connaitront des milliers d’années d’oppression et de soumission dans les Terres de nos ancêtres.

  4. messowomekewo dit :

    Ces cannibales de la cc, ils pensent qu’ils sont éternels, même leur « créateur » a fini par s’en aller, alors pourquoi tant d’obstination pour un pouvoir temporel?

  5. Paul Bismuth dit :

    Ils mettent en cohérence le droit avec leur état d’esprit.

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