Libreville assoiffée : la SEEG face au défi de l’eau potable
Alors que les délestages rythment le quotidien des habitants, une autre crise – plus silencieuse encore – épuise les nerfs et les corps : celle de l’eau. Dans plusieurs quartiers de Libreville, la pénurie s’installe, contraignant les populations à s’approvisionner à la source ou à l’achat. Le directeur général de la SEEG, Steeve Saurel Legnongo, en livre le diagnostic sans détour et dévoile la stratégie mise en œuvre pour sortir la capitale de la soif.

À Libreville, les bidons s’alignent sur les trottoirs comme une armée silencieuse de patience, les visages se ferment, et les habitants, épuisés mais dignes, guettent la moindre goutte comme un miracle urbain. © D.R.
Dans certains quartiers de la capitale, l’eau ne coule plus qu’à l’aube ou au cœur de la nuit. Les seaux remplacent les douches, les bidons s’alignent sur les trottoirs, et les habitants guettent la moindre goutte comme une grâce. Ce décor devenu ordinaire traduit une réalité plus large : Libreville, ville humide par nature, traverse paradoxalement une crise hydrique majeure.
Un réseau sous pression et une ressource en recul

«L’eau n’est pas un privilège, c’est un droit. Notre mission est d’en garantir la continuité, même en période d’étiage», dixit Steeve Saurel Legnongo, ADG de la SEEG. © Service Communication SEEG
Selon Steeve Saurel Legnongo interviewé par le quotidien L’Union le 27 novembre 2025, les causes de cette pénurie sont multiples et structurelles. D’abord, la région de Ntoum – principale zone d’approvisionnement – enregistre un épisode prolongé d’étiage, période durant laquelle le niveau des rivières, notamment la Nzémé, chute brutalement en raison du manque de pluie. Cette sécheresse réduit considérablement la quantité d’eau brute disponible pour les usines de traitement.
Mais la crise est aussi urbaine. «La forte croissance démographique et l’urbanisation rapide du Grand Libreville augmentent la demande en eau, tandis que les infrastructures, elles, n’ont pas suivi», déplore le patron de la SEEG. Vieillissement des canalisations, fuites à répétition, actes de fraude : autant de plaies qui affaiblissent un réseau saturé et obsolète.
La riposte : anticiper, rationaliser, moderniser
Face à ce constat, la SEEG a engagé une riposte stratégique fondée sur l’anticipation hydrologique et la résilience technique. L’entreprise a renforcé son système de veille pour suivre en temps réel les niveaux d’eau dans les zones de captage. Cette surveillance permet de moduler la production et d’éviter les ruptures brutales.
Parallèlement, la société procède à une optimisation des systèmes de pompage et de traitement, en reconfigurant certains circuits de distribution pour mieux répartir les débits. Des investissements sont également engagés pour renforcer les capacités de stockage et sécuriser de nouvelles sources d’approvisionnement.
Le 7 avril 2025, la SEEG a signé un partenariat stratégique avec le groupe français SUEZ, visant à réhabiliter et moderniser le service public de l’eau sur tout le territoire. Ce partenariat, explique Legnongo, constitue «premier pilier du projet présidentiel de rétablissement des services publics de l’eau et de l’électricité».
Au-delà de l’urgence, c’est donc une refondation que la SEEG entreprend : passer d’une gestion de crise à une politique de durabilité. L’eau, bien vital, redevient ainsi un enjeu de souveraineté nationale et de dignité sociale.

















1 Commentaire
La seule et véritable cause à ce stress hydrique est l’incapacité des pouvoirs publics à anticiper les besoins des populations, traduisant une certaine impéritie des agents du pouvoir. Cela fera bientôt 20 ans que ce problème se pose. L’accroissement de la population n’est pas un phénomène soudain. Comment ce peut-il que rien n’ait été anticipé ?! Ailleurs on conçoit des plans, schémas dans lesquels ont fait un état de lieux des territoires et des projections pour anticiper les besoins des territoires en termes d’activités économiques et services publics (par exemple les SCOT, PLU… servent à cela) et derrière il y a de vraies actions. Chez nous on n’implémente aucune gestion prévisionnelle ; on gère à la petite semaine, comme certains foyers qui ne se projettent jamais. Et à la fin on se retrouve avec une montagne de problèmes et des petites gens qui souffrent plus que d’habitude. C’est terrible!