Estimant avoir été arnaqué lors d’une transaction autour du masque Fang de la société secrète Ngil, un couple de retraités du sud de la France a saisi la justice pour faire annuler la vente à un brocanteur, pour 150 euros, de cette «pièce rarissime du XIXe siècle» qui leur appartenait et a ensuite été revendu pour plus de quatre millions d’euros, au cours d’une vente aux enchères, le 26 mars 2022 à Montpellier.

Collecté vers 1917, dans des circonstances inconnues, par le gouverneur colonial français René-Victor Edward Maurice Fournier (1873-1931), probablement lors d’une tournée au Gabon, le masque Fang de la société secrète Ngil, réapparu et vendu aux enchères, le 26 mars 2022, n’a pas fini de faire parler de lui. © D.R.

 

Collecté vers 1917, dans des circonstances inconnues, par le gouverneur colonial français René-Victor Edward Maurice Fournier (1873-1931), probablement lors d’une tournée au Gabon, le masque Fang de la société secrète Ngil, réapparu et vendu aux enchères, le 26 mars 2022, n’a pas fini de faire parler de lui. Six mois après les protestations des Gabonais résidents en France, à l’Hôtel des ventes de Montpellier, réclamant sa « restitution » à son pays d’origine, le masque adjugé pour 4,2 millions d’euros, hors frais, fait l’objet d’un litige entre ses anciens propriétaires et un brocanteur. Selon nos confrères du Parisien, l’affaire sera plaidée le 31 octobre devant le tribunal judiciaire d’Alès (Gard), dont la décision est attendue à la fin de l’année.

Les faits…

Selon une information publiée par le Monde et relatée par l’avocat des plaignants, Frédéric Mansat Jaffré, en septembre 2021, ce couple d’Eure-et-Loire aujourd’hui âgé de 88 ans et 81 ans avait fait appel à un brocanteur pour se débarrasser des objets présents dans leur résidence secondaire du Gard qu’ils voulaient vendre. Ils lui cèdent notamment, pour 150 euros, un masque en bois sculpté ayant appartenu à un aïeul, ancien gouverneur colonial en Afrique.

Six mois plus tard, le couple découvre en lisant leur journal que la vente d’ «un rarissime masque du XIXe siècle, apanage d’une société secrète du peuple Fang au Gabon», est organisée deux jours plus tard à Montpellier. La photo confirme qu’il s’agit bien de leur ancien masque, dont l’esthétique a inspiré les peintres Modigliani ou Picasso et dont il ne reste dans le monde qu’une dizaine d’exemplaires.

Lors de la vente, le 26 mars 2022, le masque est adjugé pour 4,2 millions d’euros, hors frais, pratiquement un record pour un objet de ce type. Le brocanteur a proposé la somme de 300 000 euros aux retraités, qui «n’ont jamais vu le chèque », a expliqué à l’AFP leur avocat. «Le tribunal d’Alès pourrait décider d’un partage plus équitable du produit de cette vente», a-t-il indiqué. D’ici là, les comptes bancaires du brocanteur restent bloqués, sur décision de la cour d’appel de Nîmes.

Les cris de protestation inaudibles de la diaspora gabonaise de France

La vente aux enchères dudit masque Fang, le 26 mars à Montpellier, n’a pas plu aux ressortissants gabonais. Ceux-ci ont vivement protesté après la vente de cet objet au prix de 3,4 milliards de francs CFA (avec les frais) à un acheteur anonyme, dénonçant «la commercialisation d’un objet important du patrimoine culturel de leur pays, acquis selon eux de manière «injuste». Durant la vente, un Français d’origine gabonaise avait déclaré que le masque a été volé au Gabon et doit revenir dans son pays d’origine.

«Si vous m’entendiez, cet objet ne serait pas en vente ici. Nous allons porter plainte, et cet objet va revenir au Gabon», avait-il déclaré. «Nous allons déposer une plainte. Nos ancêtres, mes ancêtres, de la communauté Fang, nous récupérerons cet objet», a ajouté un autre manifestant, décrivant le masque comme un «gain colonial mal acquis».

Ce remous ménage judiciaire au tour du prix d’acquisition par le brocanteur, et sa vente au prix astronomique de 3,4 milliards de francs CFA par ce dernier, serait-il la conséquence des menaces des Gabonais résidents en France ? Pour Paul-Henri Gondjout Mbone Nze, le porte-parole du collectif Gabon Occitanie à Montpellier, ces dernières péripéties ne sont pas dues au hasard, alors que ce masque est selon lui un exemple des spoliations liées à la colonisation française. «Nous avons deux voleurs qui se disputent un objet, et nous, les dignes héritiers de ce masque, nous allons tout faire pour le ramener au pays», a-t-il martelé, le 4 octobre 2023, assurant, dans les lignes du média Midi-Libre, que ce masque est toujours chargé en puissance mystique. «Il fait tout pour qu’on parle de lui», a-t-il averti.

 
GR
 

1 Commentaire

  1. Serge Makaya dit :

    Vous n’avez encore rien vu concernant la VALEUR de notre art africain et de notre culture africaine. A Ntare Nzame. L’AFRIQUE NE CESSERA DE VOUS SURPRENDRE.

Poster un commentaire