Si elle veut instaurer une gouvernance de rupture, la nouvelle présidente de l’UN doit répondre aux messages envoyés durant cette campagne «ordurière.»

Si elle veut vraiment «rassembler pour reconstruire un parti de progrès et de modernité», Paulette Missambo doit rappeler ce principe fondamental : l’action politique est fondée sur la quête d’un idéal. © D.R.

 

Dans son adresse aux congressistes, Paulette Missambo a dit pardonner toutes les injures entendues durant la campagne. A l’annonce de sa victoire, elle a remercié son adversaire, le félicitant d’avoir «joué le jeu de la démocratie», avant de se dire disposée à travailler avec lui. C’est dire si la nouvelle présidente de l’Union Nationale (UN) a mal vécu les attaques ad hominem dirigées contre elle, contre Casimir Oyé Mba et contre l’ensemble de son équipe. C’est aussi dire si elle est consciente de la taille du fossé ouvert par le congrès raté de décembre 2020. C’est enfin dire si elle entend restaurer la confiance.

Les successions dynastiques ne sont pas une fatalité

Donnée pour mourante puis successivement traitée de «vieille», de «tchiza», de «marionnette des Fangs», de «candidate fabriquée», de «voleuse» puis de fauchée incapable de réunir 27 millions de francs, l’ancienne ministre de l’Éducation nationale aura tout entendu. Consciente de la rudesse du combat politique, elle a plié sans jamais rompre. Endurcie par son expérience, elle a profité de chacune des diatribes de ses adversaires, les retournant systématiquement contre eux. Ayant mobilisé la fine fleur de son parti, elle a déjoué tous les pièges dressés sur sa route. Ayant refusé de tomber dans un débat sur la vie privée, elle s’est gardée de se prononcer sur le poids des liens de sang et matrimoniaux ou le rôle de l’argent dans la vie politique.

Aux républicains de tout bord, l’élection de Paulette Missambo envoie un message simple : les successions dynastiques ne sont pas une fatalité, contrairement à une idée insidieusement véhiculée. Aux démocrates, cette victoire indique une chose : avec de la détermination et de l’organisation, on peut venir à bout de l’intimidation, de la manipulation et de l’achat des consciences. Autrement dit, ni la fraude électorale ni l’argent ne sont des panacées. Malgré le soutien appuyé du président sortant en faveur de son adversaire, en dépit des manigances du président du bureau du congrès, la nouvelle présidente de l’UN s’est imposée. Nonobstant un usage abusif des procurations ou la distribution d’argent liquide, elle est parvenue à ses fins. Au final, elle n’a pas seulement pris la tête de ce parti emblématique de l’opposition. Elle aussi fait une démonstration : si elles peuvent être efficaces, certaines méthodes sont peu efficientes. Avant d’en user, il faut s’assurer de n’avoir aucune limite. Or, s’ils ont minimisé l’engagement de leurs coreligionnaires à faire échec à une certaine pratique politique, les tenants de l’ordre ancien ne pouvaient recourir à des outils comme la force.

Une crise éthique et identitaire  

Au demeurant, cette victoire ne doit pas occulter l’ampleur de la tâche à venir. Ayant fait étalage d’une fortune supposée, s’étant livré à des promesses de financement, Paul-Marie Gondjout a obtenu 49,17% des suffrages. Ce score montre combien les convictions de nombreux militants sont friables, solubles dans l’argent. Révélateur d’une fracture morale, il souligne la nécessité de former et sensibiliser la base aux contraintes de la lutte politique. Désormais, l’UN peut être décrit comme une alliance hétéroclite : d’un côté les tenants d’une pratique politique mêlant corruption et manipulation, de l’autre les chantres d’une moralisation de la vie publique. Dans ce parti en proie à une crise éthique et identitaire, il ne suffira pas d’appeler au rassemblement. Il faudra aller au-delà. Il faudra mettre l’accent sur les valeurs et principes. Comme en atteste la tonalité de la campagne électorale, nombre de militants ne se sont jamais fixés de ligne rouge dans leur surenchère verbale, d’autres n’ont jamais eu de gêne à reproduire les schémas décriés. Samedi dernier, cela s’est ressenti, le bureau du Congrès ayant songé à émettre des procurations séance tenante, y compris après la clôture des bureaux de vote.

Face à ces manquements à la plus élémentaire des probités, à cette propension à ruser avec les règles, Paulette Missambo devra faire montre de dextérité et de fermeté. Si elle veut vraiment «rassembler pour reconstruire un parti de progrès et de modernité», elle doit rappeler ce principe fondamental : l’action politique est fondée sur la quête d’un idéal. Si elle entend instaurer une gouvernance de rupture, la nouvelle présidente de l’UN doit répondre aux messages envoyés durant cette campagne «ordurière.» En clair, elle doit tirer les leçons des 11 derniers mois. Autrement, elle pourrait être rattrapée par cette réalité : son élection n’a nullement mis un terme à la crise née de la volonté d’un clan de conserver le pouvoir… à tout prix.

 
GR
 

4 Commentaires

  1. Fiona Fiona dit :

    C’est vrai que Firmin Ollo’o achetait les procurations à 35 000 francs la pièce… je l’ai vu de mes yeux

  2. Maganga Octave dit :

    Il paraît qu’on a fait taper le diable à certains congressistes du G2 pour qu’ils votent M. Gendre

  3. BANDEGA-LENDOYE dit :

    Je me suis tenu, jusqu’à présent au silence nécessaire à l’accomplissement de ma la charge que j’ai assumé. Le congrès s’est tenu et s’est terminé.
    C’est peu dire que j’ai subi au cours de cette période, toutes la palette des imputations que l’être humain peut imaginer. J’en ai souvent souri mais il est difficile de rester stoïque devant l’obstination dans l’erreur. Les journalistes ou leurs organes doivent s’efforcer à l’exigence de vérité. Elle demande que l’on sache rendre à autrui le témoignage de ses mérites.
    Raphaël BANDEGA-LENDOYE président du Bureau du Congrès.

  4. Milangmissi dit :

    Maintenant il faut rassembler et preparer les legislatives et la présidentielle. Il faut faire de la place aux vaincus.
    “La politique nous rassemble en nous opposant : elle nous oppose sur la meilleure façon de nous rassembler ! ”André Comte-Sponville

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