La lettre adressée au Cocom, durant le sommet Rio+20, par Nicaise Moulombi, président de l’ONG Croissance Saine Environnement, démasque les défectuosités de nombreux aspects de la politique environnementale du Gabon. De quoi se demander à quoi jouent les spécialistes chargés de la matérialisation du pilier Gabon Vert cher au président Ali Bongo. Le Gabon fait-il donc beaucoup de bruit pour rien sur les tribunes environnementalistes mondiales ? 

Refusant d’être influencé par certains membres du Cocom (Comité de communication) qui exciperaient abusivement leur attachement à la présidence de la République pour sous-traiter une communication sur le site de son ONG, Nicaise Moulombi, président de l’ONG Croissance Saine Environnement et du Haut conseil des acteurs non étatiques du Gabon (HCANEG), a envoyé une longue lettre aux concernés avec lesquels il était alors au Sommet Rio+20.

Remontant aux sources du mouvement environnementaliste gabonais, au centre duquel il place le président Omar Bongo, Moulombi, qui assure appuyer le gouvernement et les partenaires au développement par son expertise, en vient à étaler sa déception et à distribuer les mauvais points. Il déplore la faible mise en œuvre de la vision du président décédé, non sans rappeler que C’est Omar Bongo Ondimba «qui initie les lois-cadres en matière de gestion durable juste après le sommet planétaire de Rio. C’est lui qui crée le premier ministère de l’Environnement en Afrique juste au sortir de la conférence de Stockholm en 1972. C’est lui qui accrédite les projets Ecofac, WWF, WCS, ADIE, etc.  C’est lui qui crée 13 Parcs Nationaux et commence à mettre en place les outils pour attirer les investisseurs (charte des investissements, loi 4/2000).»

Nicaise Moulombi note «une absence de cadre juridico-formatif adapté aux nouveaux enjeux et à cette vision: le nouveau Code de l’Environnement attend toujours d’être toiletté depuis 2005 et est toujours dans des tiroirs dorés ; le code forestier attend toujours d’intégrer la problématique des produits forestiers autre que le bois d’œuvre/produits forestiers non ligneux (PFABO/PFNL), notamment la fiscalité sur les PFNl, le cadre légal régissant le secteur des PFNL, la cadre juridique délimitant le domaine forestier rural intégrant les forêts communautaires.»

Continuant sa diatribe, le président du Réseau des organisations de la société civile pour l’Économie verte en Afrique centrale (ROSCEVAC) indexe l’absence au Gabon d’un cadre juridique pour les biocarburants : «aucun cadre juridique pour encadrer les biocarburants alors même que des études menées par l’Institut de l’Energie et de l’Environnement des Pays francophones (…) ont recommandés de suspendre l’utilisation des biocarburants en attendant d’analyser toutes incidences négatives tant sur les écosystèmes que sur les populations

L’illisibilité du Plan national climat n’est pas épargnée. Celui-ci, note le militant environnementaliste, n’a pas été «validé par la société civile, le secteur privé et même le gouvernement, hormis sa présentation à la présidence de la République. C’est un plan qui n’intègre nullement la stratégie nationale de développement durable, les grandes lignes du programme national sur la bonne gouvernance, le programme national sur l’économie verte (en cours d’élaboration).»

Et d’aborder les problèmes de pollution, d’accès à l’eau potable et à l’énergie, marqué par les  difficultés d’accès à l’eau potable et les délestages subis par les populations depuis 2004. La lettre mentionne également «les pollutions fréquentes d’Areva (Mounana plus de 200 maisons irradiées, Cf. film diffusé sur France 2 avant Rio), Eramet (assèchement et présence des métaux lourds dans la rivière Milouli), Addax et Perenco (plages et cours d’eau pollués, Cf. directives sanitaires Union Européenne sur la Pêche), Shell (enfouissement des déchets), Total (processus de traitement de déchets pétroliers non maîtrisés par l’administration dans le cadre des PGES et ce malgré nos nombreuses misions d’évaluation et cri d’alarme).»

Le militant vert estime que le Gabon n’est donc pas en phase avec la mise en œuvre des conventions internationales : «aucune mesure pour internaliser le principe 10 de la Déclaration de Rio et même du protocole de Nagoya dans notre législation nationale. Ce n’est pas à 10 jours de Rio + 20 que l’on organise de tels évènements juste pour faire croire au chef de l’État que nous sommes en phase dans la mise en œuvre des conventions internationales. Notre organisation ne se souvient même pas de la prise en compte des synergies liées à ces trois grandes conventions, encore moins de la capitalisation des mécanismes de mise en œuvre intégrant directement les populations.»

Avec tous les manquements signalés, on pourrait se demander si le pilier Gabon Vert cher au président Ali Bongo n’est pas un leurre, du moins si le président ne se fait-il pas bluffer par ceux à qui il a confié la mise en musique de ce pan de son projet de société. Il n’en demeure pas moins que cette sortie de Nicaise Moulombi est étonnante de la part de quelqu’un que les autres acteurs non étatiques présentent comme «le bon enfant» du pouvoir.

 
GR
 

3 Commentaires

  1. Antchouet le Maboule dit :

    Tout cela doit être vrai et on se doutait bien que le combat du Gabon pour la protection de l’Environnement s’est achevé avec la mort d’Omar. L’héritier du Gabon lui croit qu’on gagne beaucoup d’argent avec ça, que c’est un appât pour les financements internationaux. C’est pourquoi il parcourt le monde à faire des discours de baratin cousu de fil blanc. Rien ne marche au Gabon et les vraies ONG environnementales quittent une à une le Gabon. Nicaise Moulombi ne fait que crever un abcès déjà purulent. Mais c’est entre eux, tocards et bouffe-cadeaux.

  2. Le fils de la Veuve dit :

    Le vrai problème qui se pose au milieu environnemental gabonais est celui des promesses inconsidérées de financement faites opar certains apprentis-sorciers à l’hérotier autoproclamé du pays… L’autre problème est la naïveté de ce dernier qui, sans recul aucun, fonce tête baissée vers un objectif que personne ne connaît. Les paiements pour services environnementaux exustent mais ils sont si expérimentaix et si codifiés que l’on ne saurait en attendre un appui budgétaire conséquent comme le fait le putschiste de septembre 2009. tant qu’il se laissera berner et tant qu’on l’accusera de diriger le pays, l’environnement restera un sous-secteur om l’imprécation, le mensogne, les approximations et contre-vérités tiennent lieu de politique…

  3. lari yari dit :

    En fait j’ai l’impression que nous faisons tous la langue de bois.Pour reprendre un penseur »là ou il y a la vérité il n’y a point de dispute ». Nous savons tous que tout n’est que prétexte au Gabon.Celui de la politique environnementale consiste tout simplement à faire semblant d’être des dirigeants responsables, enfumer la communauté internationale, les bailleurs de fonds et continuer ainsi à piller le Gabon qui un jour sera totalement ruiné et dans lequel nous devrons continuer de vivre.Et nous osons appeler cela « politique », terme noble que nous pervertissons avec notre âme et esprit noir, quel honte!!!

Poster un commentaire