Ce retour au sein de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Extractive industries transparency initiative – EITI) est loin d’être une simple «récompense».

Retour du Gabon à l’EITI : la Norme 2019 se veut très exigeante. Sur les contrats passés après le 1er janvier 2021 ou les paiements effectués par les entreprises, elle recommande une divulgation maximale. © Montage Gabonreview

 

Le Gabon a réintégré l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Extractive industries transparency initiative – EITI). A l’unanimité, les parties prenantes en ont tiré une gloriole. Mais cette décision est loin d’être une simple «récompense». Elle redonne force et résonance au débat sur la gouvernance des ressources naturelles, notamment les hydrocarbures. Confronté à de nouveaux défis, le gouvernement sera particulièrement suivi. Sur la mise à disposition des données, comme sur l’implication et la responsabilisation des concernés, son action sera scrutée. En clair, il est appelé à faire évoluer sa pratique administrative. Déjà, Georges Mpaga a annoncé la couleur : «Le droit à l’information (…) ne doit souffrir d’aucune restriction totalitaire», a averti le président exécutif national du Réseau des organisations libres de la société civile pour la bonne gouvernance (Rol-BG).

Engagements vis-à-vis du FMI

Ayant adhéré à l’ITIE en mai 2004, le Gabon en était suspendu neuf ans plus tard. Il lui était alors reproché un déficit de transparence et une faible ouverture à la société civile. Il lui était, en outre, fait grief de dissimuler certains chiffres et de ne pas respecter les procédures. Pourtant, le gouvernement avait été prévenu : en juin 2011, le conseil d’administration de l’EITI lui avait donné 18 mois pour compiler, vérifier et divulguer les données couvrant la période 2008/2011. Las. Alors dirigé par Ange Macaire Longho, le Comité national rendit son rapport en février 2013, soit un peu plus de deux mois après l’échéance. Il n’en fallait pas plus de déclencher le courroux des partenaires : par courrier électronique daté du 07 mars 2013, le secrétaire général de l’EITI, Jonas Moberg, recommandait un inventaire des dysfonctionnements, conseillant d’en tirer des enseignements. Avait-il été entendu ? On ne saurait être péremptoire.

Pour l’heure, on rappellera cette réalité : ce processus de réintégration n’a pas été de tout repos. Porté à la tête du groupe d’intérêt en mai 2015, Michel Antsélévé, eut toutes les peines du monde à remplir sa mission. Malgré sa casquette de conseiller-chef de département à la présidence de la République, il fut gêné par un manque de moyens, accumulant des dettes, y compris des impayés de loyer pour le siège. Conséquence logique de cette léthargie ? Le Gabon ne fut pas aux rendez-vous de septembre 2019 et mars 2020, deux échéances pourtant fixées par ses soins. Il fallut attendre novembre 2020 et la nomination de Léontine Tania Oyouomi-Loumbou pour voir le processus redémarrer. Comme si le gouvernement s’était soudainement souvenu de ses engagements vis-à-vis du Fonds monétaire international (FMI), une allocation de fonctionnement de 250 000 000 F.CFA (environ 454 545 $ US) fut inscrite dans la loi de finances rectificative 2021. Avec ce budget, le Groupe de travail multipartite recruta un secrétaire technique permanent, avant d’accomplir le reste des tâches ayant abouti à l’heureuse issue du 21 octobre courant.

Norme très exigeante

Comme le relève Marc Ona Essangui, il faut maintenant espérer «que les mêmes causes ne (reproduisent pas) les mêmes effets.» Après tout, la Norme 2019 se veut très exigeante. Sur les contrats passés après le 1er janvier 2021 ou les paiements effectués par les entreprises, elle recommande une divulgation maximale. Or, ce principe est inconnu de la législation nationale. Pis, il va à l’encontre des certaines dispositions en vigueur. Concrètement, l’article 15 de la loi 009/2006 dispose : «Les archives publiques ne peuvent être communiquées au public qu’après 30 ans à compter de leur création.» Quant au Code de déontologie de la Fonction publique, il enjoint les agents publics de «respecter la confidentialité des informations dont (ils ont) connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de (leurs fonctions).» Des dispositions propices à l’éclosion puis à l’enracinement d’une culture de la dissimulation et de la corruption. Exactement le contraire des objectifs poursuivis par l’EITI.

Au lendemain de sa réintégration à l’EITI, le Gabon doit songer à réfléchir à sa conception du droit d’accès à l’information publique. Sur les modalités de formulation des demandes d’informations ou les délais de réponse, il doit édicter des règles claires et souples. Il doit tout autant offrir aux parties prenantes des voies de recours, en cas de refus. De même, il doit moderniser la gestion des archives, former les agents au traitement des demandes d’informations, lancer une campagne de sensibilisation sur la question et, le cas, échéant, prévoir un régime de sanctions. Faute de le comprendre et d’engager cette réforme, les mêmes causes pourraient produire les mêmes effets.

 
GR
 

1 Commentaire

  1. Mbadinga dede Alphonse dit :

    Bonne initiative5

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