Dans le contexte pré-électoral actuel, l’ancien Premier ministre Alain-Claude Bilie-By-Nze et l’association Ossimane, soutien du président de la transition, se sont littéralement affrontés le week-end écoulé sur le terrain de la communication politique. Alors que le premier privilégie le dialogue direct avec les citoyens, ses antagonistes optent pour une stratégie d’attaques frontales. Une opposition de styles qui, selon l’expert Michel Essame Ondo, révèle les enjeux profonds de la présidentielle du 12 avril prochain.

Face à un Bilie-By-Nze qui tente de réinventer son image par la pédagogie, Ossimane peine à dépasser le registre de l’invective, révélant les limites de sa stratégie politique. © GabonReview (montage)

 

À l’approche de l’échéance cruciale du 12 avril 2025, le paysage politique gabonais se trouve à la croisée des chemins. Une analyse approfondie menée, le 3 février sur Facebook, par Michel Essame Ondo, directeur de l’agence Eye Advertising and Management, révèle le contraste saisissant entre deux approches de communication politique qui s’affrontent actuellement sur la scène nationale.

La stratégie du dialogue direct d’Alain-Claude Bilie-By-Nze

L’ancien Premier ministre a choisi une approche audacieuse en participant au forum ‘’Face aux Gabonais, tout se dire en public’’. Cette initiative, organisée par l’agence ‘Dire’, marque une rupture avec les meetings politiques traditionnels. Bilie-By-Nze y adopte une posture de transparence inhabituelle, acceptant la confrontation directe avec les citoyens et leurs critiques.

«En privilégiant l’échange direct, ACCBN [Alain-Claude Bilie-By-Nze -ndlr] démontre une volonté d’inclusion et de participation citoyenne», souligne Michel Essame Ondo. Ainsi l’ancien Premier ministre ne s’est pas contenté de répondre aux questions. Il a également utilisé cette tribune pour justifier certaines de ses décisions passées et reconnaître les limites de son action lorsqu’il occupait des fonctions de premier plan sous le régime déchu. En cela, il s’éloigne des discours typiquement défensifs et opte pour une certaine introspection, ce que Michel Essame Ondo qualifie de «transparence et humilité associées à l’acceptation des erreurs du passé».

En mettant l’accent sur la communication directe et la reconnaissance des erreurs, Bilie-By-Nze cherche à réinventer son image, à se dissocier de son passé controversé et à se positionner comme un acteur clé de la «rupture» qu’il appelle de ses vœux pour le Gabon. Toutefois, cette stratégie n’est pas sans risques. L’expert en communication pointe la difficulté de maintenir un équilibre entre transparence et maîtrise du message : «La complexité technique des explications pourrait créer une distance avec le public, tandis que l’exercice du dialogue direct expose à des situations potentiellement déstabilisantes

L’offensive d’Ossimane : les limites d’une stratégie d’attaque

En contraste flagrant, l’association Ossimane, soutien inconditionnel du président de transition Brice Clotaire Oligui Nguema, déploie une stratégie offensive centrée sur la disqualification personnelle. Son président provincial pour l’Estuaire, Léandre Nzue, a multiplié les accusations contre l’ancien Premier ministre, évitant soigneusement le terrain des idées et des propositions.

«Au lieu de défendre les réalisations des gouvernants ou de souligner les progrès accomplis, leur stratégie s’est concentrée sur des attaques, apparemment visant à discréditer personnellement ACCBN», constate l’expert en communication et marketing. Michel Essame Ondo décompose les caractéristiques de ce style : «Discours agressif et non constructif : Le recours à l’invective repose sur une approche émotionnelle visant à discréditer l’adversaire plutôt qu’à engager un débat constructif. Ce type de communication fonctionne souvent pour polariser davantage le discours politique et détourner l’attention des vrais enjeux

L’absence de contre-arguments solides face aux critiques formulées par Bilie-By-Nze apparaît, ainsi, comme une faille majeure dans la communication d’Ossimane. L’association semble s’enliser dans un discours essentiellement négatif, laissant la porte ouverte à une perception de faiblesse et de manque de substance.

Cette approche révèle ses limites, comme l’analyse Michel Essame : «Une communication basée uniquement sur l’attaque personnelle risque de se retourner contre ses auteurs. L’absence d’arguments constructifs peut être interprétée comme un aveu de faiblesse

Pour une maturité politique d’Ossimane

Pour dépasser cette opposition stérile, Michel Essame préconise une refonte de la communication politique autour de trois axes : Valorisation factuelle des réalisations (présenter les progrès accomplis sous la gouvernance actuelle, en s’appuyant sur des données concrètes) ; Reconnaissance des échecs tout en proposant des solutions (être honnête sur les défis actuels et les faiblesses, tout en mettant en avant les solutions envisagées) ; et, Instauration d’espaces de dialogue constructif (suivre l’exemple d’Alain-Claude Bilie-By-Nze en organisant des forums et des rencontres pour échanger directement avec les citoyens).

À l’aube d’une élection présidentielle déterminante, l’enjeu dépasse les simples stratégies de communication. Il s’agit d’établir les bases d’un débat politique mature, capable de répondre aux aspirations profondes de renouveau exprimées par le peuple gabonais.

Leçons et perspectives

L’analyse de Stael Junior Michel Essame Ondo (son nom complet) offre une feuille de route pour cette transformation nécessaire, appelant à une communication politique plus responsable et constructive.

L’opposition des styles de communication entre Alain-Claude Bilie-By-Nze et l’association Ossimane reflète les tensions et les défis de la scène politique gabonaise à l’aube d’une élection présidentielle déterminante. D’un côté, Bilie-By-Nze mise sur la proximité, la transparence et la pédagogie, des éléments qui, s’ils sont bien maîtrisés, peuvent lui conférer une image de leader réformateur et conscient des attentes de ses concitoyens. De l’autre, Ossimane semble enfermée dans une stratégie de confrontation qui risque de ne faire que polariser davantage les débats et affaiblir son propre camp.

Pour le Gabon, l’enjeu est de voir émerger une classe politique capable de s’engager dans des débats constructifs, de reconnaître les défis qui attendent le pays et de proposer des solutions pragmatiques. La maturité de la communication politique jouera un rôle crucial dans la légitimité et la stabilité des prochaines élections. Ainsi, les acteurs politiques gagneraient à s’inspirer de l’analyse de Stael Junior Michel Essame Ondo pour ajuster leurs stratégies de communication et mieux répondre aux attentes d’un peuple qui aspire à une véritable rupture avec les pratiques du passé.

 
GR
 

6 Commentaires

  1. Akoma Mba dit :

    Ossimane fait partie des chanteurs de louanges sans aucun esprit critique, comme la majorité des gabonais toujours enclin à la critique bidon qui consiste à insulter quand on n’est pas d’accord. Bref,du chemin à parcourir

  2. Gayo dit :

    Est-ce que le sauvageons de Léandre Nzué peut changer de style. Si Oligui et Ossimane avait le souci de changer les mentalités et la façon de faire la politique, ils n’allaient pas aller chercher Léandre Nzué pour nous ramener le style politique des insultes qui ne connaissent que l’invective et pa violence.

  3. Akoma Mba dit :

    Léandre Zuè tout commme Alihanga et sa bande de détourneurs mafiosi doivent bien cela à Oligui après les avoir fait sortir de Sans-Famille. Si c’est avec ça qu’on va faire le Gabon nouveau…

  4. Yann Levy Boussougou-Bouassa dit :

    La démarche de ACBBN est assurément celle qu’il faut adopter pour un acteur politique en quête de rédemption. En bon orateur cherchant l’adhésion, décline son identité, relate son parcours en mettant l’accent sur le milieu dont il est issu (il n’est pas d’ascendance patricienne, il est un homo novus) ce qui le rapproche davantage des plébéiens qui l’écoutent. En exposant son parcours syndicaliste et politique (il a été député, ministre délégué, ministre et premier ministre) il montre qu’il a une certaine expérience de la défense de l’intérêt public et la gestion de la chose publique dans des costumes variés, montrant ainsi son regard synoptique sur la thématique de la défense de l’intérêt général. Or, cela peut être un motif de sérénité et de confiance que de savoir que celui/celle qui préside à notre destinée est une personne expérimentée, rompue à la défense de l’intérêt du peuple. En comparaison, en France on a souvent reproché à Emmanuel Macron ses indélicatesses dans sa communication et la gestion de crise et mis cela sur le compte de sa jeunesse et de son inexpérience en politique (Emmanuel Macron a été brièvement ministre avant d’être président de la République, il n’ a pas été élu local, ni représentant de la Nation).

    Enfin, ACBBN sort cette phrase qu’on a besoin d’entendre et qui fait écho aux attaques dont il est l’objet : « j’ai d’abord défendu mon camp au lieu de l’intérêt du pays ». Plus loin il reconnaît le caractère globalement mauvais du bilan de la majorité à laquelle il a appartenu et fait amende honorable. Ceci n’est pas anodin quand dans le même temps l’association Ossimane par la voix de son messager Léandre NZUE semble reproduire et perpétuer les erreurs pour lesquelles ACBBN s’excuse (défendre d’abord et surtout son camp avant de penser aux concitoyens), et mêler cela à une forme de fatuité. Rappelons au passage que Léandre NZUE, tout comme ACBBN, fut un soutien très actif de Ali Bongo avant se ennuis judiciaires.

    Si les deux parties (ACBBN et Ossimane) parlent à la sensibilité des compatriotes, ACBBN recherche de l’apaisement et parle en même temps à leur intelligence (il expose les failles dans la gestion des ancien et nouveau régime, pointe les contradictions des deux systèmes et esquisse parfois des réponses aux problématiques constatées). De son côté Ossimane ne produit que l’outrance, l’outrage et des attaques ad hominem. En clair, Ossimane tient un discours de zélote et de kounabéliste, autrement dit tout ce qu’il y a de plus traditionnel et détestable dans la politique gabonaise. Loin de l’apaisement, Ossimane cherche à susciter l’ire, non pas du peuple (on parle au peuple quand on s’adresse à lui avec respect en faisant travailler son intellect), mais de la foule (on s’adresse à la foule quand on veut exciter les passions les plus violentes du peuple en laissant de côté la réflexion) à l’égard de celui qui personnifie à ses yeux l’ancien monde. Mais la conséquence est que ACBBN apparaît comme quelqu’un de plus présidentiable ; il semble incarner une forme de rupture et de nouveauté (on a rarement vu en politique gabonaise ce qu’il a fait, il a répondu sur tout et sans tabou, et son bref échange avec la dame de l’ogooué Ivindo sur la place de la communauté Haoussa au regard de la nouvelle constitution fait partie, à mon sens, des nombreux moments marquants des échanges). En ce qui les concernent Ossimane et le camp présidentiel, après cette sortie de Léandre NZUE, semblent un peu plus incarner la continuité. A la veille de l’élection « présidentielle anticipée », ce peut être un vrai problème pour ces derniers. Personnellement, si elle se tient, j’invite les compatriotes à voter (peu importe le camp) sous l’influence la raison d’abord avant la passion. Régulée, celle-ci est chose utile. Cependant, elle doit toujours seconder la raison chaque fois qu’il est question de l’avenir du pays.

  5. DesireNGUEMANZONG dit :

    Les analyses de Monsieur Michel Ondo Essame sont justes dans la globalité. En revanche, j’aurais quelques points de désaccords à soulever.

    D’abord la campagne présidentielle n’a pas démarré officiellement. Pour le moment ni le Général B.C Oligui Nguema, ni Monsieur A.C. Billie-by-Nzé ne se sont toujours pas portés candidat à cette élection.

    En conséquence (de mon point de vue), les propos de Monsieur L. Nzué lui
    appartiennent et ne sauraient être inclus dans la campagne présidentielle pour le compte d’Oligui Nguema pour une raison (ou plusieurs). La première est qu’une campagne électorale, c’est la confrontation de deux projets politiques. Nous savons les orientations politiques de Monsieur Oligui Nguema. Pour le moment, c’est « copie blanche » chez Billie-by-Nzé.

    La joute verbale entre L. Nzué et A.C. Billie-by-Nzé est d’ordre privé (officieux). C’est plus un règlement de compte entre deux personnages
    sulfureux du monde politique. Chacun cherchant à se donner une « virginité » politique en raison de leur passé sombre.

    Monsieur l’expert se trompe puisqu’il n’y a ni vainqueur ni perdant dans cette confrontation. On n’est pas en « campagne présidentielle ». Ça ne profite pas à
    Billie-by-Nzé et ça ne désavantage pas Oligui Nguema puisque Monsieur L. Nzué n’est pas « le Chef de Campagne » de ce dernier.

    En revanche je trouve choquant et blessant d’attribuer à Monsieur Billie-by-Nzé le « monopole du coeur » et de « l’intelligence ». Et nous dire en filigrane qu’il représente l’avenir du pays. Une question me taraude la carafe :

    Avec qui va t-il gouverner s’il est candidat et s’il gagne cette élection présidentielle? Aura t-il une majorité au parlement pour gouverner? Va t-il modifier la Constitution par référendum s’il est Président de la République? Quid du Code électoral? Quel sera le statut des militaires après son élection?

    Cordialement.

  6. DesireNGUEMANZONG dit :

    Monsieur A.C. Billie-by-Nzé et Monsieur L. Nzué sont « deux monstres politiques » comme le sont Charybde et Scylla en mer (lire l’odyssée d’Ulysse).

    Charybde avale et vomit. Scylla, quant à lui, dévore. Dans la mythologie grecque, ce sont deux dangers guettant les premiers marins.

    Ces gens n’ont rien à faire sur la scène politique. Le spectacle qu’il livre est déplorable. L’un est hypocrite. L’autre tranche dans le vif. Un vrai boucher. Messieurs, nous avons eu une meilleure classe politique que ça!

Poster un commentaire